Formation
ANIMAUX DE COMPAGNIE
Auteur(s) : ARNAUD MULLER*, GWENAËL OUTTERS**
Fonctions :
*diplomate ECVD, praticien à Lomme (Nord). Article rédigé d’après la conférence « Quand et comment moduler le traitement d’un pemphigus foliacé ? », présentée au congrès 2010 de l’Afvac, à La Défense.
– Le protocole thérapeutique classique repose sur une immunosuppression massive, à base de prednisolone (2 à 4 mg/kg/j en traitement d’attaque).
– Ce protocole est souvent à modifier par la suite. Ses effets secondaires constituent la première cause d’euthanasie lors de pemphigus.
Le pemphigus foliacé est la principale dermatose auto-immune chez le chien et le chat. Cette affection dermatologique superficielle, fréquemment généralisée, est liée à la production d’autoanticorps dirigés contre les jonctions interkératinocytaires (les desmosomes). Il s’ensuit une perte d’adhérence entre les kératinocytes et la libération de kératinocytes libres nucléés (les acanthocytes). Chez le chien, le pemphigus foliacé se caractérise par des lésions pustuleuses, généralement superficielles, qui forment un halo érythémateux en périphérie (voir photo 1). Les lésions secondaires sont des collerettes épidermiques, des squames et des croûtes. Des sur-infections bactériennes ou fongiques sont fréquentes. Le prurit est présent dans 50 % des cas. Chez le chat, il existe des lésions généralisées (comme chez le chien) et particulières : une atteinte de la base des griffes (voir photo 2) ou des lésions périmammelonnaires peuvent constituer les seules altérations.
Le protocole thérapeutique classique repose sur une immunosuppression massive, à base de prednisolone (2 à 4 mg/kg/j en 2 prises) en traitement initial. Des anti-infectieux, des antalgiques et des soins locaux sont également prescrits en début de soins. La calcinose et les surinfections sont des effets secondaires à surveiller : elles induisent un prurit qui n’est pas une récidive.
3 situations incitent à modifier le protocole : la recherche de la dose minimale efficace, l’inefficacité et les effets secondaires.
Dans les cas les plus fréquents, après 1 à 3 mois de traitement et si une stabilisation est observée, la prednisolone est administrée tous les 2 jours pendant 1 à 2 mois, puis tous les 3 jours pendant 1 à 2 mois. L’objectif est une administration 2 fois par semaine. Il est également possible de moduler, non la fréquence, mais la dose, en suivant ce schéma : 2 à 4 mg/kg/j pendant 1 à 2 mois, puis 1 à 2 mg/kg/j pendant 1 à 2 mois afin d’arriver à 0,5 mg/kg/j en entretien. Ce protocole semble cependant donner de moins bons résultats (les 2 dernières doses ne sont plus immuno-suppressives). Thierry Olivry1 propose une autre solution : 10 mg/kg de prednisolone per os pendant 3 jours, puis 1 à 2 mg/kg/j, avec la possibilité de répéter les doses “flash” pendant 3 jours, en les espaçant d’au moins 7 jours, 2 à 3 fois. 13 chiens ont bénéficié de ce protocole : le taux de rémission à 1 an s’élève à 92 % (versus 61 %) et la tolérance au traitement est meilleure. Si les résultats sont intéressants, l’hospitalisation est toutefois recommandée. Dans l’attente de publications, ce protocole est réservé aux spécialistes.
Une efficacité thérapeutique insuffisante des glucocorticoïdes utilisés seuls pendant 1 à 2 mois et des effets secondaires trop importants (première cause d’euthanasie lors de pemphigus) incitent à prescrire d’autres molécules. La méthylprednisolone est susceptible de remplacer la prednisolone pour lutter, par exemple, contre une polyuro-polydipsie majeure, difficilement gérable par les propriétaires (effets minéralocorticoïde plus faible et glucocorticoïde 25 % plus élevé). La dexaméthasone est proposée à la dose de 0,2 à 0,4 mg/kg/j, puis de 0,1 à 0,2 mg/j tous les 2 à 3 jours (sans publication). L’azathioprine (Imurel(r)2 1 à 2,5 mg/kg/j ou tous les 2 jours), immunosuppresseur par cytotoxicité sur les lymphocytes, représente une alternative (proscrite chez le chat) qui peut être utilisée d’emblée et associée aux corticoïdes. Le conférencier recommande un protocole initial de 2 mg/kg/j de prednisolone et de 1 mg/kg d’azathioprine tous les 2 jours. La myélosuppression, rare, est surveillée via une numération-formule tous les mois pendant les 3 premiers, puis tous les 6 mois. L’effet proinfectieux est le même que celui des corticoïdes. L’apparition de diarrhée peut entraîner l’arrêt momentané ou définitif de l’administration de la molécule. La pancréatite, rare, est également décrite. À forte dose (2 à 2,5 mg/kg), l’hépatite est un effet secondaire fréquent. Elle est cependant réversible : un bilan biochimique, effectué tous les mois pendant les 3 premiers puis tous les 6 mois, est conseillé. Le luflénomide (Arava(r)2, 2 à 4 mg/kg/j et 10 mg/j chez le chat, pendant 6 semaines, puis 2 fois par semaine) est une alternative à l’azathioprine. Cette molécule inhibe le métabolisme des pyrimidines des lymphocytes et présente une meilleure tolérance que l’azathioprine pour une efficacité similaire. Néanmoins, son coût et l’absence de validation scientifique en limitent l’utilisation. Les topiques immunomodulateurs sont utilisés sur des lésions localisées,? en première intention ou après un traitement par voie générale. Ils sont indiqués en relais ou en complément des glucocorticoïdes. Les dermocorticoïdes sont utilisés à puissance décroissante : 1 fois par jour pendant 7 jours puis à jours alternés. L’acéponate de dihydrocortisone (Cortavance(r)) se révèle particulièrement utile dans cette indication (voir photo 3 ci-dessus). Il présente l’avantage de ne pas pénétrer au niveau cutané de façon trop importante. Arnaud Muller conseille de pulvériser le produit sur une compresse et de tamponner les lésions. Les effets secondaires apparaissent lors de traitements longs (atrophie cutanée, surinfection, alopécie). Le tacrolimus (Protopic(r)2 0,1 %) est proposé en première intention 1 fois par jour, puis à dose dégressive jusqu’à 2 fois par semaine. Optimmune(r) ne pénètre pas dans la peau. Il est donc inefficace.
En cas d’échec de l’intégralité des traitements proposés ci-dessus, la cyclosporine (5 à 15 mg/kg, per os) donne épisodiquement des résultats intéressants. Dans les cas réfractaires, le recours au chlorambucil, au cyclophosphamide ou à la dapsone est envisageable.
1 Congrès mondial de dermatologie vétérinaire, Hong Kong, 2008.
2 Pharmacopée humaine.
Sources : Oberkirchner U, Linder KE, Olivry T. Promeris-associated pemphigus foliaceus-like drug reactions in dogs: 22 cases. Veterinary Dermatology 2010, 21: 319. Oberkirchner U, Linder K, Olivry T. Recognizing and treating Promeris-triggered pemphigus foliaceus in dogs. Veterinary Medicine; 2011, 106, 6: 284-293.
22 cas de pemphigus foliacé induits par l’utilisation de Promeris(r) (metaflumizone et amitraze) sont décrits. Les signes cliniques sont des lésions classiques de pemphigus foliacé, possiblement associés à des signes généraux. Dans un tiers des cas, les lésions ont débuté au niveau du site d’application du spot on et, dans deux tiers des cas, à distance. Un traitement est nécessaire pour faire régresser les symptômes, mais l’arrêt est possible au bout de 5 à 7 mois.
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