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Auteur(s) : ÉRIC VANDAËLE
L’ordonnance législative du 20 janvier 2011 et ses textes d’application fixent les conditions dans lesquelles des actes vétérinaires sont autorisés à des non-praticiens. De plus, les vétérinaires libéraux peuvent désormais salarier des techniciens et des inséminateurs.
Les États généraux du sanitaire du printemps 2010 ont conduit le gouvernement à prendre, le 20 janvier dernier, une ordonnance législative pour définir plus précisément les actes de médecine et de chirurgie vétérinaires, et mieux encadrer ceux qui sont permis aux éleveurs, à certains techniciens et, plus récemment, aux dentistes équins et aux ostéopathes pour animaux. Ces rencontres résultaient des premières campagnes de prophylaxie contre la fièvre catarrhale ovine, avec la revendication des éleveurs de pouvoir vacciner leurs animaux « en toute sécurité juridique ».
Dans l’ordonnance, les actes de médecine et de chirurgie vétérinaires sont plus clairement définis. Ils incluent :
→ le diagnostic de gestation, les bilans de santé (bilans ou certificats sanitaires) ;
→ le diagnostic des maladies, leur prévention et leurs traitements, la prescription de médicaments et leur administration par voie parentérale ;
→ en chirurgie, toute intervention affectant l’intégrité physique de l’animal dans un objectif thérapeutique ou zootechnique.
Ces actes relèvent donc du monopole d’exercice des vétérinaires (diplômés et inscrits à l’Ordre), à l’exception de personnes qui sont autorisées à en réaliser quelques-uns sans être vétérinaires, et au premier rang desquelles figurent les éleveurs.
Un décret et un arrêté d’application, tous deux datés du 5 octobre 2011, précisent les conditions de formation et les modalités d’exercice de ces non-vétérinaires, et donnent la liste des actes visés par ces dérogations, lorsqu’ils ne sont pas mentionnés dans la loi.
Seuls les « propriétaires ou détenteurs professionnels » d’animaux de rente ou d’équidés peuvent réaliser certains actes vétérinaires (article L.243-2 du Code rural). Les éleveurs ou détenteurs professionnels de chiens, de chats ou de nouveaux animaux de compagnie (chenils, chatteries, animaleries, refuges, etc.), voire d’animaux de zoo, sont clairement exclus du dispositif.
Les compétences exigées par le décret font en sorte de placer tous les éleveurs ou presque dans une grande sécurité juridique vis-à-vis des actes vétérinaires qu’ils sont susceptibles de réaliser. Ils doivent ainsi remplir l’une des 3 conditions suivantes :
→ soit disposer d’une expérience professionnelle en élevage d’au moins un an (période consécutive ou non), ce qui permet d’inclure d’ores et déjà la (quasi) totalité des éleveurs ;
→ soit être titulaire d’un brevet d’études professionnelles agricoles ou d’un brevet professionnel agricole (ou d’un titre européen équivalent), ce qui, là aussi, englobe presque tous les éleveurs (notamment les jeunes qui ont moins d’un an d’expérience) ;
→ soit, à défaut, disposer d’une attestation de formation à la pratique des actes vétérinaires autorisés aux éleveurs, délivrée par un organisme de formation continue. Ce document concerne alors seulement les éleveurs installés depuis moins d’un an et qui sont sans diplôme.
Pour être correctement réalisés, certains actes listés, tels que la castration et l’écornage, nécessitent une anesthésie et une analgésie (parfois obligatoires dans le cadre de la réglementation européenne sur le bien-être animal). La question des moyens anesthésiques et analgésiques pouvant être détenus et employés par l’éleveur se pose alors au-delà des seuls anti-inflammatoires non stéroïdiens autorisés en productions animales (le méloxicam pour la castration des porcelets, par exemple). Car beaucoup de ces médicaments (α2-agonistes, kétamine, etc.) sont en effet étiquetés avec la mention « Administration strictement réservée aux vétérinaires, ne pas délivrer au public ». Cette mention n’est toutefois pas présente pour la xylazine.
De plus, la xylocaïne a perdu ses indications en productions animales en raison de l’absence de limite maximale de résidus (LMR) dans ces espèces cibles. Cependant, les LMR sont fixées pour les équidés (sans temps d’attente). Cette molécule n’est donc pas interdite en productions animales. Dans le cadre de la cascade, elle peut être prescrite par un vétérinaire chez les bovins et dans les autres espèces avec un temps d’attente de 28 jours pour la viande et de 7 jours pour le lait. L’administration hors autorisation de mise sur le marché est alors effectuée par le praticien ou le détenteur des animaux, mais toujours sous la responsabilité du premier.
Il semble difficile d’accorder à l’éleveur le droit de réaliser ces interventions courantes, sans lui permettre de le faire dans de bonnes conditions, en termes de contention, d’anesthésie et d’analgésie.
Pour les actes vétérinaires, les techniciens aviaires et porcins sont placés « sous l’autorité et la responsabilité d’un vétérinaire », selon l’article L.243-3, 6°, du Code rural. Cette disposition ne précise toutefois pas si ce confrère doit ou non connaître les élevages dans lesquels les techniciens interviennent, ou seulement encadrer ces derniers.
Sur le plan des compétences, le décret, dans son article D. 243-2, précise que ces techniciens doivent « maîtriser les techniques de contention et les gestes applicables aux actes visés dans l’espèce et le type d’élevage concernés ». Ces compétences sont « certifiées par une attestation délivrée par un vétérinaire ». Le texte n’exclut pas que celle-ci provienne d’un praticien différent (à l’issue d’une formation, par exemple) de celui qui a l’autorité et la responsabilité de ces professionnels.
Les techniciens “lapins” ne sont pas concernés par la dérogation, sauf à considérer ces animaux à fourrure comme une production aviaire ! Les actes vétérinaires leur sont donc interdits.
La liste des interventions permises aux techniciens aviaires et porcins est la suivante :
→ « vaccination » ;
→ « castration » (porcelets, chaponnage, etc.) ;
→ « débecquage ou dégriffage » ;
→ « examens lésionnels descriptifs externes et internes des cadavres » (autopsies).
Contrairement aux éleveurs professionnels, les techniciens ne sont donc pas autorisés à administrer des traitements par voie parentérale (sauf les vaccins), ni à pratiquer des prélèvements.
Selon l’article L.243-3, 7°, du Code rural, ces techniciens et inséminateurs doivent être des « salariés ». Nouveauté importante : ils peuvent être embauchés par des praticiens libéraux (société d’exercice libéral, société civile professionnelle, etc.). Il leur est également possible d’être salariés d’un groupement de défense sanitaire, d’un centre d’insémination artificielle (inséminateurs) ou d’une organisation de production (un groupement ou une coopérative), qu’elle soit agréée ou non au titre de la pharmacie vétérinaire.
La dérogation ne permet donc pas aux inséminateurs diplômés de faire des diagnostics de gestation ou d’aptitude à la reproduction (donc des échographies) sous un statut indépendant (non salarié). En revanche, elle reconnaît le droit à des vétérinaires libéraux de salarier ces techniciens.
En termes de compétences, le décret, dans son article D. 243-3, précise que ces techniciens doivent disposer de l’un des diplômes ou titres suivants :
→ une licence de chef de centre d’insémination équine ou d’inséminateur pour l’espèce équine ;
→ un « certificat d’aptitude aux fonctions de technicien d’insémination » (pour les espèces bovine, ovine, caprine et porcine) ;
→ un diplôme de niveau égal ou supérieur à celui du baccalauréat professionnel agricole ;
→ ou, à défaut, une attestation de formation à la pratique des actes énumérés, délivrée par un organisme de formation continue reconnu.
L’arrêté du 5 octobre 2011 classe les actes qui leur sont autorisés en 4 catégories :
1. Les « actes relevant de la conduite d’élevage :
→ la caudectomie dans les espèces ovine et porcine ;
→ l’écornage ;
→ l’encochage ».
2. « Les prélèvements biologiques à visée zootechnique », mais pas dans un but diagnostique.
3. « Certains actes relevant de la reproduction :
→ les opérations de reproduction par cœlioscopie dans les espèces bovine, ovine, caprine et porcine ;
→ la production d’embryons in ovo ou in vitro ;
→ l’application de protocoles de traitements hormonaux pour la maîtrise du cycle œstral des femelles. » L’article L. 234-2-II du Code rural indique toutefois que « l’administration de ces médicaments [progestagènes] ne peut être effectuée que par ou sous la responsabilité d’un vétérinaire » en raison de leur détournement possible comme anabolisant ;
→ « les constats d’aptitude à la reproduction et les constats de gestation hormis tout acte de diagnostic d’affection des organes génitaux dans les espèces bovine, ovine, caprine et porcine ».
4. Pour les actes de dentisterie :
→ « le meulage de dents ;
→ l’extraction des dents de lait ;
→ la coupe de dents dans l’espèce porcine ».
Par rapport aux éleveurs (propriétaires ou détenteurs des animaux), les actes suivants ne sont donc pas autorisés à ces techniciens :
→ l’administration de traitements par voie parentérale (à l’exception de ceux pour la maîtrise du cycle œstral) ;
→ les vaccinations ;
→ les castrations ;
→ les autopsies ;
→ les parages des pieds ;
→ le débecquage et le dégriffage (toutefois permis aux techniciens aviaires).
En outre, ce texte autorise assez clairement les vétérinaires et les sociétés vétérinaires à salarier des techniciens pour réaliser les actes énumérés ci-dessus, en particulier dans le cadre de l’insémination (ou inséminateur) ou d’actes de dentisterie (équine).
Le nouveau dispositif renforce beaucoup les sanctions en cas d’exercice vétérinaire illégal : jusqu’à 2 ans de prison et/ou 30 000 € d’amende. La fermeture de l’établissement et la confiscation du matériel peuvent aussi être ordonnées par le tribunal.
Retrouvez le nouveau dispositif sur l’acte vétérinaire en intégralité sur WK-Vet.fr http://www.wk-vet.fr/mybdd/? visu=164&article=164_3701
La liste des actes vétérinaires autorisés aux éleveurs est fixée par arrêté et comprend les interventions suivantes :
→ « le traitement par voie parentérale », qu’il soit « individuel ou collectif, préventif ou curatif », ce qui permet, notamment, les vaccinations ou la métaphylaxie. La voie intraveineuse n’est pas exclue. En revanche, la prescription des médicaments correspondants relève du monopole du praticien (tout comme les actes du ressort du vétérinaire sanitaire) ;
→ « la réalisation de prélèvements biologiques à visée diagnostique ou zootechnique », ce qui inclut les prises de sang ;
→ les autopsies rebaptisées dans l’arrêté « examen lésionnel externe ou interne des cadavres » ;
→ « les traitements hormonaux de maîtrise du cycle œstral » (induction et synchronisation des chaleurs, etc.), y compris ceux qui sont à base de progestagènes. Toutefois, selon l’article L.234-2-II du Code rural, « l’administration de ces médicaments [progestagènes] ne peut être effectuée que par ou sous la responsabilité d’un vétérinaire » en raison de leur détournement possible comme anabolisants ;
→ les diagnostics de gestation (appelés « constats de gestation ») chez les vaches, les brebis, les chèvres et les truies, ainsi que les « constats d’aptitude à la reproduction ». Le diagnostic de gestation des juments relève donc des vétérinaires ;
→ l’assistance à la mise bas par voie naturelle (vêlage, agnelage, poulinage, etc.) et les soins péri- et post-partum. La césarienne est exclue ;
→ la castration des bovins, des ovins, des caprins, des porcs et dans les espèces aviaires (chaponnage), sans précision sur un éventuel âge maximal quant à la pratique de cette intervention par l’éleveur. La castration des équidés est exclue ;
→ l’écornage ;
→ l’encochage (marquage ou encoche à l’oreille) ;
→ les caudectomies dans les espèces ovine et porcine ;
→ la taille des appendices cornés, comme le débecquage, le dégriffage et le parage des pieds ;
→ quelques actes dits « de dentisterie », tels que la coupe des dents chez le porc, le meulage et l’extraction des dents de lait.
→ Ordonnance n° 2011-78 du 20 janvier 2011 relative aux conditions dans lesquelles certains actes peuvent être réalisés par des personnes n’ayant pas la qualité de vétérinaire (Journal officiel du 21 janvier 2011) modifiée par l’article 3 de l’ordonnance n° 2011-862 du 22 juillet 2011 relative à l’organisation de l’épidémiosurveillance, de la prévention et de la lutte contre les maladies animales et végétales, et aux conditions de délégation de certaines tâches liées aux contrôles sanitaires et phytosanitaires.
→ Décret n° 2011-1244 du 5 octobre 2011 relatif aux conditions dans lesquelles certaines personnes peuvent réaliser des actes de médecine et de chirurgie vétérinaires.
→ Arrêté du 5 octobre 2011 fixant la liste des actes de médecine ou de chirurgie des animaux que peuvent réaliser certaines personnes n’ayant pas la qualité de vétérinaire.
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