Formation
NAC
Auteur(s) : JULIEN GOIN
Fonctions : praticien à Pornic (Loire-Atlantique)
– Ces affections sont fréquentes chez ces animaux, en particulier aux localisations cutanées et tympaniques.
– Leur structure, constituée de pus solide et d’une coque épaisse, les rend imperméables aux antibiotiques. Par conséquent, leur traitement est d’emblée chirurgical.
– Une infection bactérienne est le plus souvent en cause.
Les abcès, fréquents chez les reptiles, sont susceptibles d’affecter toutes les espèces, sans distinction d’âge ni de sexe.
Le système immunitaire des reptiles est constitué de monocytes, de lymphocytes et de 3 types de granulocytes (hétérophiles, éosinophiles et basophiles). À la différence des mammifères, leurs granulocytes ne possèdent pas les lysozymes qui liquéfient les débris tissulaires résultant de la réaction immunitaire. Par conséquent, leur pus est habituellement solide et caséeux. Il peut parfois être pâteux ou liquide. Les abcès sont classiquement constitués d’une cavité centrale, qui contient un pus solide organisé en lamelles concentriques, et entourée par une coque épaisse et fibreuse (voir photo 1).
Les abcès superficiels (cutanés, sous-cutanés, articulaires, buccaux, tympaniques, hémipéniens, précornéens, etc.) se distinguent des profonds (hépatiques, intestinaux, pulmonaires, rénaux, cérébraux, rétrobulbaires, cœlomiques, etc.).
Les abcès superficiels entraînent un gonflement localisé, parfois volumineux, généralement sans autre signe inflammatoire de type érythème, chaleur ou rougeur. Les abcès cutanés et sous-cutanés sont les plus fréquents, car la peau est un organe étendu et sujet aux traumatismes : morsure, abrasion, etc. (voir photo 2). Chez les tortues, l’abcès tympanique ou de l’oreille moyenne est assez fréquent, notamment chez les espèces aquatiques et les tortues-boîtes. Il se caractérise par un gonflement de la membrane tympanique, uni ou bilatéral, susceptible d’entraîner sa rupture. Le pus se moule dans les trompes d’Eustache et est souvent visualisable au fond de la cavité buccale (voir photo 3). Chez les serpents et les geckos ne possédant pas de paupières (Gekko sp., Phelsuma sp., Uroplatus sp., par exemple) et dont l’œil est protégé par une écaille transparente appelée lunette, l’abcès précornéen désigne un abcès qui se forme dans l’espace situé entre la cornée et la lunette, ce qui confère à l’œil un aspect opaque (voir photo 5)1. Les abcès articulaires entraînent un gonflement de l’articulation atteinte (voir photo 4).
Les abcès profonds génèrent des symptômes variables selon leur localisation : dégradation progressive de l’état général lors d’abcès hépatique ou intestinal, dyspnée lors d’abcès pulmonaire, signes neurologiques lors d’abcès cérébral, exophtalmie lors d’abcès rétrobulbaire, présence d’une masse abdominale palpable lors d’abcès cœlomique, etc. (voir photo 6).
Le diagnostic différentiel inclut les granulomes inflammatoires, les kystes mycosiques et parasitaires, ainsi que les tumeurs. La ponction est généralement inutile, car le pus est solide. Un examen radiographique permet d’évaluer l’atteinte des structures ostéo-articulaires adjacentes à l’abcès.
Les abcès sont fréquemment secondaires à une infection bactérienne : bactéries aérobies Gram négatif (Aeromonas sp., Pseudomonas sp., Pasteurella sp., germes fécaux de type Klebsiella sp. ou Salmonella sp.) ou, plus rarement, Gram positif (Streptococcus sp., Staphylococcus sp.), bactéries anaérobies (Clostridium sp.) ou mycobactéries (Mycobacterium sp.). Plus rarement, ils peuvent être consécutifs à une infection fongique, une infestation parasitaire ou à la présence d’un corps étranger plastique, métallique ou végétal (épine, copeau d’écorce, etc.). Une hygiène insuffisante et une immunodépression secondaire à des conditions de maintenance inadaptées (surpopulation, température inadéquate) sont des facteurs favorisants. La réalisation d’un examen bactériologique (voire mycologique) du pus, avec antibiogramme, est indiquée.
Les abcès cutanés ont généralement une origine traumatique : griffure ou morsure d’un congénère, abrasion rostrale chronique par frottement contre les parois du terrarium, substrat trop abrasif, etc.
L’abcès tympanique est la conséquence de plusieurs facteurs concomitants : conditions de maintenance inadaptées (température inadéquate), mauvaise hygiène (filtration insuffisante qui entraîne une ingestion quotidienne d’eau souillée), hypovitaminose A (qui déclenche une métaplasie squameuse des trompes d’Eustache favorisant leur obstruction et leur infection). L’abcès précornéen peut être consécutif à un traumatisme de la lunette, à une septicémie ou à une stomatite bactérienne par remontée des germes depuis la cavité buccale vers l’œil via le canal naso-lacrymal. L’abcès hémipénien des lézards et des serpents mâles est susceptible de résulter d’une infection ou d’un traumatisme, à la suite d’un accouplement, d’une excitation sexuelle prolongée ou d’un sexage par sondage mal réalisé (voir photo 7). Les abcès profonds sont généralement consécutifs à une septicémie, qui a pour départ un foyer primaire cutané, intestinal ou pulmonaire.
En raison de leur structure, les abcès des reptiles sont imperméables aux antibiotiques. Leur traitement est d’emblée chirurgical, réalisé sous anesthésie générale, sauf pour les petits abcès qui requièrent seulement une anesthésie locale. Une antibiothérapie générale, d’une durée minimale de 2 semaines, est essentielle et prolongée en cas de besoin (fluoroquinolones, céphalosporines, métronidazole, etc.). Lors d’abcès cutanés et sous-cutanés, le site opératoire est laissé ouvert ou suturé partiellement, afin de permettre une antisepsie quotidienne et une cicatrisation par seconde intention, qui nécessite généralement 4 à 6 semaines (voir photo 8). Lors d’abcès tympanique, la membrane tympanique est incisée et la cavité tympanique curetée (voir photo 9). En cas d’abcès précornéen, la lunette précornéenne est incisée et la cornée rincée à l’aide d’un antiseptique pour permettre l’évacuation du pus.
Le pronostic des abcès superficiels est généralement bon, sous réserve d’une intervention chirurgicale suffisamment agressive, d’absence d’atteinte des structures adjacentes et de septicémie. Une récidive est à prévoir si l’abcès n’a pu être retiré dans sa totalité. Le pronostic des abcès profonds est plus réservé, en raison des lésions parfois sévères et irréversibles que ces derniers peuvent entraîner.
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