L’évaluation nutritionnelle, un levier pour l’activité vétérinaire

Le vétérinaire reste, aux yeux des propriétaires, l’interlocuteur le plus légitime et crédible en nutrition animale, a rappelé notre consœur Géraldine Blanchard, diplômée de l’European College of Veterinary and Comparative Nutrition (ECVCN), lors de la soirée lilloise du 13 février dernier. Une politique nutritionnelle solide appuie durablement la qualité des soins apportés. De plus, elle participe à multiplier le nombre de visites par 4 et le chiffre d’affaires alimentaire par 2, signifiant une marge de progression importante. La formation des vétérinaires autorise une prescription avisée, qui se révèle toujours plus efficace qu’une simple vente de produits.

Un conseil à chaque fois

Le vétérinaire peut adapter son conseil en nutrition à chaque animal et à chaque consultation. En effet, entre 2 visites, de nombreux paramètres sont susceptibles d’évoluer : alimentation (nature et quantité), temps disponible pour les activités et les sorties, statut physiologique de l’animal, etc.

Impliquer l’équipe, dès la salle d’attente

Une évaluation nutritionnelle systématique ne prend que quelques minutes et est facilitée par le remplissage d’un questionnaire en salle d’attente². L’équipe d’accueil, préalablement formée, recueille les données dont le vétérinaire prendra connaissance avant la consul-tation, afin d’envisager des conseils et des objectifs adaptés. Dans les cas les plus simples, l’enquête permet de relier les erreurs alimentaires à leurs conséquences cliniques : absence de rationnement chez un animal stérilisé en surpoids, sur-alimentation et obésité, régime tout viande et atteinte orthopédique, ration déséquilibrée et carence chronique généralisée ou désordre du transit.

Poids optimal, race, activité, statuts physiologique et pathologique permettent de calculer précisément le besoin énergétique d’entretien (BEE). Une fois le BEE connu, l’apport alimentaire peut être précisé, affiné ou corrigé selon la densité énergétique de l’aliment, en prenant en compte la qualité et la quantité de l’ensemble des ingrédients, sans oublier les friandises et les compléments. L’indice corporel de l’animal peut orienter vers la gamme alimentaire à privilégier (hyper-calorique ou hypocalorique). Enfin, certaines notions permettent d’affiner la nutrition des animaux malades ou hospitalisés (en cas de pancréatite ou d’entérectomie, par exemple).

Le vétérinaire délivre ainsi déjà des conseils éclairés sur la base de quelques documents : questionnaire alimentaire, liste de poids optimal des races, illustration de l’estimation objective de l’indice de condition corporelle, tableaux de la valeur énergétique des aliments industriels et des ingrédients ménagers.

Faire prendre conscience au propriétaire du surpoids de son animal

Il apparaît moins évident de parvenir au juste équilibre entre alimentation idéale et investissement du propriétaire. L’art du praticien consiste à induire une verbalisation de l’embonpoint de l’animal par son maître, conduisant à une prise de conscience essentielle. Les souhaits (ingrédients, formulation de l’aliment) autant que les contraintes (coût, nombre d’animaux et spécificités nutritionnelles de chacun) sont à prendre en compte. « Cela permet de canaliser les quantités. Préférer inclure une petite quantité fixe de friandises connues peut être préférable à leur suppression complète, souvent non respectée par le propriétaire », souligne la conférencière. Dans certains cas, un calcul des apports en protéines, fibres, lipides et amidon permet d’adapter la quantité et/ou la qualité des nutriments. La complexité de certains contextes appelle à approfondir la formation, voire à référer à un vétérinaire nutritionniste.

Les conseils diététiques sont à retranscrire sur l’ordonnance

Enfin, dans l’optique que les informations transmises aux propriétaires soient appliquées, il est indispensable de les rédiger clairement sur une ordonnance. La pesée rigoureuse de l’apport alimentaire autrement que dans un gobelet fait partie de ces conseils. Le propriétaire est rendu acteur grâce à l’élaboration d’objectifs qu’il peut notamment contrôler par une pesée bimensuelle à la clinique. L’élaboration et la correction de rations mixtes ou ménagères peuvent nécessiter plus de temps que le seul aliment industriel. Enfin, en conclusion de la prescription, un suivi téléphonique et/ou physique permet de consolider le suivi des recommandations autant que le suivi clinique.

• 1 Groupe d’étude en nutrition, alimentation et diététique de l’Afvac.

• 2 Retrouvez sur WK-Vet.fr ce questionnaire santé http://www.wk-vet.fr/mybdd/?visu=164&article=164_3790