Mission ordinale contre la mesure 29
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PHARMA
Auteur(s) : ÉRIC VANDAËLE
Le rapport de l’Ordre accepte à regret le plafonnement ou l’arrêt des remises arrière sur les antibiotiques, mais sans croire en l’efficacité de la mesure…
Ce n’est pas une surprise. La mesure 29 du plan contre l’antibiorésistance fait l’unanimité. Mais l’unanimité contre elle. Chez les vétérinaires ou les centrales vétérinaires, personne n’accepte l’interdiction des remises arrière et des contrats de coopération commerciale, toutes classes thérapeutiques confondues. Cette interdiction est acceptée pour les seuls antibiotiques, surtout pour une question d’image et non pour son efficacité. Car, selon le rapport ordinal, les vétérinaires n’ont « aucune raison » de se sentir responsables ou de « plaider coupables » de l’émergence de résistances. Les fautifs seraient les antibiotiques génériques, dont le prix trop faible incite à la consommation et, en filigrane, les administrations qui devraient « agir sur le flux d’autorisations des génériques ».
Le 19 décembre 2011, le ministre de l’Agriculture, Bruno Le Maire, avait chargé le président du Conseil supérieur de l’Ordre (CSO) d’imaginer, en 3 mois, « un nouveau modèle économique du marché du médicament vétérinaire » qui fasse consensus auprès de tous les acteurs du marché et tienne compte de la fameuse mesure 29. Mi-novembre, il venait d’annoncer, à travers cette mesure, son intention d’interdire rapidement les remises arrière et les contrats de coopération commerciale. Devant le tollé provoqué par cette annonce, il en diffère l’application au 1er janvier 2013 pour laisser le temps aux vétérinaires de s’adapter à un nouveau modèle économique et à l’Ordre d’en définir le contour.
Aujourd’hui, à la veille des élections présidentielles et, quel qu’en soit le résultat, d’un changement de gouvernement, le projet de décret prévu pour le 15 mars n’est toujours pas déposé devant le Conseil d’état. Il ne le sera sans doute jamais, du moins par ce gouvernement.
De son côté, le 19 mars, le président du CSO a rendu son rapport, dont La Semaine Vétérinaire s’est procuré une copie. Il devait jeter les bases d’un nouveau modèle économique sans remises arrière. Il ne le fait pas. Car si ces dernières avaient, en leur temps, concentré toutes les critiques, ce rapport milite surtout pour leur maintien. Il décrit essentiellement l’impact négatif de l’interdiction de ces remises et des contrats de coopération commerciale.
Les remises arrière étaient autrefois accusées de favoriser les grosses structures au détriment des plus petites. Mais leur suppression aurait aussi pour conséquence la fermeture des structures libérales, surtout les plus petites ou celles spécialisées en productions animales hors sol, au profit des groupements de producteurs. L’impact serait également négatif pour tous les vétérinaires, y compris les canins (voir tableau).
En effet, selon ce rapport, l’interdiction de toute remise arrière aboutirait à une diminution du tarif “centrale” des médicaments et, par conséquent, du prix de revente public par les vétérinaires, ainsi que des chiffres d’affaires. Paradoxalement, le prix de vente des laboratoires aux ayants droit, toutes remises déduites, augmenterait de quelques points. Car le rapport n’imagine pas que les industriels réinjecteraient l’intégralité des remises arrière dans la diminution de leurs prix de vente aux centrales. La marge brute diminuerait, avec un impact direct sur le résultat, jusqu’à 10 % de pertes en canine, 16 % en rurale ou 30 % dans les filières hors sol.
En résumé, pour compenser l’impact négatif de la mesure 29, l’État « devrait être en situation d’injecter 150 à 200 millions d’euros dans l’économie des entreprises vétérinaires ». À l’évidence, l’état, à supposer qu’il le souhaite, n’est pas aujourd’hui en situation de le faire. Il peine déjà à étendre la visite sanitaire bovine aux autres filières, pour un coût pourtant 10 fois inférieur, toutes espèces confondues.
Les remises arrière étaient accusées d’inciter à prescrire plus que nécessaire, notamment pour les antibiotiques. Mais, sur ce plan, « leur interdiction sera contre-productive », écrit le rapport. Car la baisse attendue des tarifs “centrale” et des prix de revente aux éleveurs des antibiotiques génériques conduirait « à une augmentation probable de leur consommation ».
La constitution de GIE pour négocier des remises arrière de plus en plus élevées favorisait déjà le développement des dépositaires, au détriment des distributeurs en gros. Mais ces derniers semblent redouter encore davantage ce déséquilibre avec la suppression des remises arrière. « Les distributeurs en gros se verraient contraints de migrer vers un modèle dépositaire avec pour conséquences [entre autres] une atteinte sévère à la liberté de prescription et une compression de [leurs] effectifs. »
Mais l’Ordre réserve aussi une surprise de taille aux vétérinaires qui appellent fréquemment à l’instauration d’un prix unique du médicament. Dans ce scénario, même en imaginant une marge fixée par l’État de 10 points supérieure à celle des pharmaciens pour le médicament humain, l’impact sera encore plus négatif que l’interdiction des remises arrière, et sans épargner les praticiens canins…
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