ESCALE SANITAIRE POUR LES OISEAUX SAUVAGES EN DÉTRESSE

Au-dessus des étangs, tout est calme. Soudain, la silhouette majestueuse d’un héron cendré apparaît dans le soleil. Instant magique. Seul le roulis de l’autoroute toute proche vient rappeler au visiteur que ce coin de paradis n’est pas au bout du monde. Une cohabitation étonnante. Les oiseaux migrateurs qui survolent les Pyrénées viennent se poser et reprendre des forces sur ce magnifique site de 100 ha. Nous sommes à Mazères, en Ariège, entre Toulouse et Foix, sur le Domaine des oiseaux. Un espace superbement aménagé pour permettre au public d’observer près de 230 espèces de la faune sauvage, comme la grande aigrette, le balbuzard pêcheur, le guêpier d’Europe, ou encore l’échasse blanche, devenue le symbole du domaine.

Rencontre inédite entre progrès et faune sauvage

Le Domaine des oiseaux n’est pourtant pas un espace naturel. Il est même né en raison de la réalisation de l’autoroute, en 2005. « Des carrières ont dû être créées pour les besoins du chantier, explique Louis Marette, maire de Mazères. Pendant les travaux, nous avons vu beaucoup d’oiseaux se poser sur ces étendues d’eau. L’échasse blanche nichait même au milieu des camions. L’idée de réhabiliter ce site constitué de zones humides a pris tout son sens en constatant qu’il servait de halte migratoire entre l’Espagne et l’Europe du Nord. Nous avons voulu en faire un lieu de découverte de la biodiversité sous toutes ses facettes. »

Un lourd projet porté par cette commune de 4 000 habitants, en partenariat avec la Fédération départementale des chasseurs et la Fondation nationale pour la protection de la faune sauvage. Avec le concours de l’État et des collectivités publiques, 3 millions d’euros ont été investis pour transformer cet entrelacs d’étangs (28 ha) en base de loisirs nature qui accueille chaque année près de 18 000 visiteurs.

L’Aouselou accueille tous les oiseaux blessés

Mais ici, on ne se contente pas d’observer. Les oiseaux sont recueillis, soignés et élevés. Hervé Guillon est aux petits soins pour une chouette hulotte qui a besoin de reprendre des forces. Ce praticien à la retraite, qui a exercé longtemps à Mazères, a accepté de devenir le vétérinaire référent bénévole pour l’Aousélou, le nouveau centre de sauvegarde des oiseaux en détresse, inauguré en février dernier. « Nous avons déjà accueilli une soixantaine de pensionnaires, explique-t-il, et nous avons pu en relâcher la moitié. Nous assurons les premiers soins, le nourrissage et nous remettons les oiseaux en milieu naturel seulement s’ils sont à 100 % de leurs capacités. »

Vautour fauve, faucon crécerelle, grand duc d’Europe, chevêches Athéna et même un ibis chauve ont bénéficié des soins et des installations de l’Aouselou. Infirmerie, nurserie, espace de quarantaine, box de récupération et grandes volières permettent d’accueillir, 24 heures sur 24 et dans les meilleures conditions, les oiseaux blessés apportés par des particuliers ou des associations. Un projet de 35 000 € financé à 30 % par le conseil général.

Les animaux sont pris en charge par les 2 animateurs à temps plein du domaine, qui ont l’autorisation de transport, en lien constant, bien entendu, avec Hervé Guillon. « Un partenariat efficace a été mis en place avec l’école vétérinaire de Toulouse. En cas d’intervention lourde, l’animal est envoyé à la clinique des oiseaux, de la faune sauvage et du gibier qui nous apporte un appui scientifique et technique. De son côté, l’ENVT nous envoie des oiseaux qui ont besoin d’être replacés dans leur biotope, car le domaine est un lieu idéal pour cela. »

Une chaîne de vie

Toute une chaîne s’est donc mise en place avec la Fédération départementale des chasseurs, qui assure le transport vers Toulouse, des associations naturalistes et les services de l’État (Offices nationaux des forêts, de la chasse et de la faune sauvage) qui participent au recueil des oiseaux blessés.

« Seule structure de ce type entre Haute-Garonne, Aude et Ariège, ce centre de soins est le complément naturel du Domaine des oiseaux, se félicite le maire. Il participe à notre démarche de sensibilisation, de prévention et d’éducation du public pour protéger et faire vivre la faune sauvage. »

Une démarche parfaitement illustrée par la création d’un centre d’élevage de la cigogne, l’un des rares en France. Plus d’une trentaine de ces magnifiques oiseaux mythiques vivent là en toute quiétude et se laissent admirer avec grâce.