« Une bonne ordonnance est une façon de sanctuariser l’acte » - La Semaine Vétérinaire n° 1496 du 18/05/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1496 du 18/05/2012

Délivrance du médicament

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Auteur(s) : MARINE NEVEUX

Selon Michel Baussier, président du Conseil supérieur de l’Ordre (CSO), la majorité des dysfonctionnements résultent de « la méconnaissance des lois et des règlements ».

Un fossé peut exister entre la grande inquiétude des dirigeants des organisations professionnelles vétérinaires et l’“insouciance” rencontrée chez certains de nos confrères. » Michel Baussier, président du CSO, a ainsi planté le décor de la 11e étape régionale ordinale relative au médicament vétérinaire, le 15 mai dernier, en interpellant les praticiens.

Un cycle d’une trentaine de réunions est, en effet, programmé dans l’Hexagone d’ici à l’automne. Cette démarche de communication est soutenue par les autres organisations professionnelles. Griefs contre les vétérinaires repris par leurs détracteurs, problématique médiatisée de l’antibiorésistance, propos vifs vis-à-vis de l’industrie pharmaceutique, rappels sans concession, etc. Tous les ingrédients d’un débat et d’une interpellation étaient présents.

« Il convient de ne jamais perdre de vue le diagnostic », a martelé Michel Baussier, en soulignant également l’importance de rédiger une ordonnance dans les règles de l’art. Ce document constitue un moyen de matérialiser la prescription. L’heure n’est donc plus à l’approximation, a fortiori dans un contexte d’évolution du médicament en médecine humaine et au niveau européen.

Un contexte délicat pour la profession

En 2010, notre profession s’est fait clouer au pilori en raison de la crainte d’un conflit d’intérêts et d’une vindicte médiatique contre le vétérinaire « qui prescrit plus que de raison » des médicaments par intérêt commercial, selon les dires de ses détracteurs.

Des devoirs et des obligations

Michel Baussier et Pierre Brouillet ont donc insisté sur la nécessité de respecter les règles en termes de cascade, de renouvellement, etc., pour pallier les dysfonctionnements reprochés à certains confrères.

Il existe d’autres principes de base : les vétérinaires ont la possibilité de délivrer le médicament sans tenir officine ouverte, dans le prolongement direct de l’acte. Le produit est donc remis en main propre : « Ce point important se trouve au centre de la délivrance du médicament. C’est le fait du vétérinaire et non de l’auxiliaire. C’est le fait du pharmacien et non du préparateur. » Un vétérinaire est forcément présent dans le cabinet. « L’Ordre des pharmaciens est d’ailleurs intransigeant sur ce point et les sanctions sont exemplaires. » Si le pharmacien n’est pas physiquement dans l’officine, l’étape suivante est l’achat en grande surface !

Dans certains cas, une dérogation est possible via un intermédiaire (colisage). Ce dernier peut être l’auxiliaire à condition que le colis soit scellé et préparé dans le respect de règles encadrées.

Les accusations à l’encontre de la profession

Les griefs établis contre notre profession sont de plusieurs ordres. 6 axes sont identifiés : la méconnaissance de la loi et des règles, la dépendance de l’industrie, le conflit d’intérêts, l’abus de position dominante, le défaut de traçabilité, les défauts de pharmacovigilance. « Pour la majorité, les dysfonctionnements résultent d’une inconscience : la méconnaissance des lois et des règlements », a estimé Michel Baussier. Seuls un petit nombre de confrères sont conscients des contournements de la loi et l’assument volontairement. Ces pratiques sont le fait de quelques affairistes, couramment pointés du doigt par les confrères qui en pâtissent en pratique rurale. Cependant, « ce cumul collectif peut créer un bruit de fond ».

La médecine vétérinaire en bouc émissaire

Le sujet de l’antibiorésistance figurait également au programme des débats. « Le médicament vétérinaire est extrêmement médiatique, a constaté notre confrère Pierre Brouillet. Nous sommes montrés du doigt sur l’antibiorésistance, mais il ne faut pas être le bouc émissaire, car les vétérinaires s’en occupent depuis de nombreuses années. » Des guides de bonnes pratiques ont d’ailleurs été édités, ou sont en cours d’élaboration, par plusieurs organisations techniques professionnelles vétérinaires en France et en Europe. « Plus de 50 % des antibiotiques sont aujourd’hui utilisés dans le monde sans problématique infectieuse, a déploré Pierre Brouillet. L’amalgame sur le vétérinaire est facile ! »

Valoriser l’expertise vétérinaire sur la pharmacovigilance

« Je souhaite obtenir que l’expertise du médicament soit unanimement reconnue comme une expertise vétérinaire », a poursuivi Michel Baussier, qui place la pharmacovigilance au rang des priorités et des enjeux pour notre profession. L’effet positif est la reconnaissance de l’expertise vétérinaire en post-AMM1. « Il est aujourd’hui aisé de contribuer à cette pharmacovigilance. Le centre [de pharmacovigilance] apporte également des données intéressantes pour les praticiens. » Citant la récente parution de la liste des substances exonérées2, Michel Baussier explique que la remontée des effets secondaires des pilules contraceptives chez la chatte a pesé dans la décision de faire retirer ces principes actifs de la vente en officines. La profession a donc un rôle d’acteur majeur à jouer.

« Est-ce aux vétérinaires de laver plus blanc que blanc ? », s’interrogent certains participants à l’issue de la soirée, alors que notre profession apparaît à certains comme un fusible face aux problématiques des médecins et aux enjeux de lobbies, et à l’heure où d’autres acteurs du médicament devraient balayer devant leur porte… En outre, comment intégrer la réalité et les contraintes de terrain ? De nombreux autres points noirs, tels que les sites de vente directe de médicaments vétérinaires à destination du grand public qui font florès, semblent aussi difficilement contrôlables. Des exemples récents, comme medicanimal.com qui monte en puissance, en témoignent. Certains confrères ont vu arriver des clients munis d’une ordonnance établie via Internet, sur laquelle ils n’avaient plus qu’à signer !

« Nous présentons des points de dysfonctionnement à corriger, a indiqué Michel Baussier. Ce n’est pas difficile. La prescription est un acte vétérinaire, la délivrance est un acte pharmaceutique. Nous avons 2 fonctions différentes. En faisant tout en un, les étapes sont parfois effectuées avec quelques imprécisions que nos détracteurs ont beau jeu de souligner. » Alors, charge à chacun de ne plus prêter matière à la critique. « Une bonne ordonnance est une façon de sanctuariser l’acte », a conclu notre confrère.

Un groupe de réflexion sur l’éthique du prescripteur a été constitué : la première réunion aura lieu fin juin.

  • 1 Autorisation de mise sur le marché.

  • 2 Voir en pages 23 à 25 de ce numéro.

Les responsabilités du praticien

La responsabilité du vétérinaire peut être engagée à 3 niveaux.

→ Responsabilité civile professionnelle

Les infractions intentionnelles au Code de la santé publique amènent les assurances en RCP à ne pas couvrir les dommages. En outre, dans le cadre de la cascade, il convient de garder à l’esprit que le vétérinaire est aussi responsable de l’administration du médicament.

→ Responsabilité pénale

En chiffres, la pharmacie représente 80 % des affaires pénales (80 % concernent des “laïcs”, 65 % des pharmaciens, 40 % des vétérinaires). Des liens fréquents sont établis avec l’exercice illégal de la médecine vétérinaire, des trafics d’animaux, des mauvais traitements à animaux, etc.

→ Responsabilité disciplinaire

Les infractions au Code de la santé publique engagent une responsabilité disciplinaire. La pharmacie représente 20 % des affaires disciplinaires.

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