UN VÉTÉRINAIRE DEVENU CHAMPION DE TENNIS EN FAUTEUIL

Autriche, 1996. Un terrible accident de moto le cloue sur un lit d’hôpital. Stéphane Houdet vient de perdre, à 25 ans, l’usage normal de sa jambe gau­che. Son avenir, d’un coup, se décline en pointillés. Jeune vété­rinaire, tout juste engagé dans la vie professionnelle, il mesure jour après jour le poids de son handicap dans l’exercice de son métier. Aussi vit-il l’amputation de sa jambe, en 2004, comme « un véritable soulagement ». L’arrêt de travail qu’elle entraîne scelle la fin de son premier parcours de libéral. Désormais, il ne soignera plus les animaux.

Mais c’est juste la fin d’un chapitre de sa vie. Il en ouvre aussitôt un autre, celui de champion sportif. Meurtri dans sa chair, Stéphane Houdet a en effet décidé de soigner son âme. Il veut vivre son rêve de gosse de participer un jour aux jeux Olympiques ! Golfeur de haut niveau, il apprend que le golf ne sera pas une discipline olympique à Pékin, en 2008. Il fera donc du tennis en fauteuil.

Des podiums, jusqu’au numéro 1 mondial

Il commence ses premiers tournois en 2005 et, le jour J, il est là, au rendez-vous qu’il s’est fixé : il remporte l’or au double messieurs paralympique de Pékin, avec Michaël Jérémiasz. L’un de ses meilleurs amis, le vétérinaire Marc Wuyts, est venu de France l’encourager jusqu’en Chine, à vélo…

Vainqueur de nombreux tournois prestigieux du grand chelem en double messieurs (Roland-Garros, US Open, Wimbledon, Open d’Australie), Stéphane Houdet finit par décrocher le Graal, en juin dernier : la victoire dans le simple messieurs à Roland-Garros. « C’était pour moi une émotion intense. Le même jour, je remporte le tournoi le plus emblématique lors­qu’on est Français, je bats le grand joueur japonais Shingo Kunieda, vainqueur de 13 tournois du grand chelem, et je deviens n° 1 mondial ! »

Perfectionniste, il ne laisse rien au hasard

Son parcours de joueur professionnel, sillonnant la planète toute l’année, le conduit aux jeux Paralympiques de Londres. Là, au début de septembre 2012, il complète brillamment sa collection de médailles : l’argent en simple, battu par son grand rival Shingo Kunieda, et le bronze en double, avec Michaël Jérémiasz ! Des résultats qui ne doivent rien au hasard. Perfectionniste, il n’a de cesse de travailler à améliorer son matériel roulant. À sa demande, un collège de compétences s’est constitué, auquel il est intégré. Il y a là le laboratoire de biomécanique des Arts et métiers, à Paris, le Centre d’études et de recherche sur l’appareillage des handicapés, à Créteil et à Whoippy dans la région de Metz, ainsi qu’une chirurgienne du sport et des affections de l’épaule : « Un thésard s’est emparé du sujet et de nom­breuses amé­liorations techniques ont déjà été apportées à mon fauteuil ; j’associe du reste toute l’équipe à ma victoire de Roland-Garros. D’autres sont à venir ; elles concernent le poids du fauteuil, tout en carbone, le dimensionnement des roues, la position des mains courantes, etc. Nous y travaillons. »

Sous contrat avec le ministère de la Défense, en tant qu’agent civil, il bénéficie d’un emploi réservé aux athlètes de haut niveau. Détaché à 100 %, il participe cependant régulièrement aux travaux du ministère concernant l’amélioration technique des prothèses pour les handicapés : « Sans doute est-ce pour partie le résultat de ma formation de vétérinaire ; j’en ai conservé le goût d’apprendre, de comprendre, d’expérimenter, d’amé­liorer les choses. C’est une caractéristique que possèdent, je crois, de nombreux confrères. »