Les diarrhées néonatales en élevage canin - La Semaine Vétérinaire n° 1510 du 05/10/2012
La Semaine Vétérinaire n° 1510 du 05/10/2012

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Aurélien Grellet*, Gwenaël Outters**

Fonctions :
*DMV, PhD, scientific support manager chez Royal Canin

POINTS FORTS

– En élevage, la prévalence des agents responsables de diarrhées est forte (94 %).

– Le parvovirus peut être responsable de symptômes allant de simples troubles digestifs, sans atteinte de l’état général, à des diarrhées suraiguës mortelles.

– La prophylaxie médicale (vermifugation, vaccination) et la prophylaxie sanitaire (nettoyage et désinfection des locaux) sont garantes d’une bonne santé des chiots.

Les infections digestives représentent 40 % des maladies en élevage canin : il s’agit d’un phénomène fréquent, complexe, mais encore mal connu. La littérature présente peu d’études globales, seulement quelques travaux sur un agent en particulier. Notre confrère nous présente le résultat de son travail dans ce domaine.

CONTEXTE

Les diarrhées néonatales, par la déshydratation et l’hypothermie qu’elles induisent, représentent un risque mortel pour le chiot. Leur approche pratique doit être globale, pluridisciplinaire et plurifactorielle. Il convient de distinguer les diarrhées néonatales pures chez des animaux de moins de 3 semaines des diarrhées pédiatriques pour lesquelles les agents infectieux et la gestion de la maladie diffèrent. En élevage, ces troubles digestifs ont un impact financier direct, et sont une source de mauvaise image lorsque la diarrhée apparaît quelques jours après l’adoption.

LES DIARRHÉES NÉONATALES

Septicémie

La septicémie néonatale, 2e cause de mortalité chez le chiot, se manifeste dans 81 % des cas par des troubles digestifs. Elle survient principalement au cours de la 1re semaine et son pronostic est particulièrement mauvais.

La prévention s’intéresse à la chienne gestante et à la mise bas, afin de limiter les causes prédisposantes. Elle comprend un suivi attentif de la mise bas (prédiction de la date, suivi de température, toilettage de la chienne, surveillance pendant la mise bas) et nécessite de veiller à ce que la prise colostrale soit la plus précoce possible. Une attention particulière est apportée aux mesures de réanimation, pour lutter contre l’hypothermie, l’hypoglycémie et la déshydratation.

La prise de colostrum, fondamentale, doit être rapide, avant la 24e heure. La qualité de la prise colostrale serait davantage liée au moment où elle est effectuée, avec un passage maximal au cours des 9 premières heures, plutôt qu’à la qualité du colostrum.

Des publications recommandent d’administrer l’association amoxicilline-acide clavulanique ou de la céfalexine pour gérer ces septicémies. Les antibiotiques actifs sur les germes anaérobies et ceux qui présentent une toxicité chez le chiot (gentamycine, fluoroquinolones, tétracyclines) sont contre-indiqués.

Mammite ou syndrome du lait toxique

Une mammite clinique ou subclinique (syndrome du lait toxique) provoque des troubles digestifs chez le chiot. Dans les 2 cas, les animaux sont isolés de leur mère et alimentés artificiellement.

Autres

L’herpès virus ou le virus minute (CPV1) sont des causes de diarrhées néonatales. Le CPV1 est un parvovirus de type 1 différent du parvovirus “classique” responsable de gastro-entérite en périsevrage (CPV2).

LES DIARRHÉES PÉDIATRIQUES : DE 3 SEMAINES AU SEVRAGE

Notre confrère a mené une étude1 sur les diarrhées pédiatriques dans 33 élevages canins (67 portées et 316 chiots) afin de définir les facteurs de risque des troubles digestifs en phase de périsevrage (voir tableau).

Cette étude met en évidence la forte prévalence des agents responsables de troubles digestifs en élevage canin (94 %), avec des pluri-infestations dans 75 % des cas. La forte prévalence de T. canis montre que les antiparasitaires internes ne sont pas utilisés correctement (dose, fréquence, molécule, etc.).

Comme son impact est controversé dans l’apparition des diarrhées pédiatriques, le coronavirus n’est pas abordé dans cet article.

Giardiose

L’infestation par Giardia est responsable d’une perte de poids, de diarrhées chroniques et de stéatorrhée souvent associée à une coprophagie : les lipases pancréatiques sont inhibées, ce qui rend les fèces grasses, mal formées, mais appétentes.

Ascaridiose

Le portage de Toxocara peut se manifester par des vomissements dans lesquels les parasites sont parfois présents, une perte de poids, de la toux, une distension abdominale et un pelage terne.

Coccidiose

Une diarrhée en “gelée de groseilles” secondaire à la lyse cellulaire, souvent accompagnée d’une perte de poids, est assez caractéristique de l’infestation par Isospora. Il existe 2 coccidies majeures chez le chien. I. ohiensis se manifeste précocement de 3 semaines à 7 semaines, tandis qu’I. canis est responsable de diarrhées de sevrage à partir de 6 semaines et jusqu’à 10 à 13 semaines. Les 2 infestations sont possibles chez le même chiot, et responsables de 2 épisodes de diarrhées : il n’y a pas de protection croisée, et il existe une grande variabilité entre les élevages et les portées.

Parvovirose

Le parvovirus est l’un des agents responsables des diarrhées de sevrage. Il est caractérisé soit par une diminution du score fécal2 sans atteinte majeure de l’état général, soit par une diarrhée fatale.

IDENTIFIER LES AGENTS

Dans cette étude, 94 % des chiots étaient infestés par au moins un agent, mais celui-ci n’était visible macroscopiquement que dans 0,6 % des cas.

Coproscopie

La coproscopie apporte une idée sur l’état sanitaire de l’élevage (coccidies, Giardia, Toxocara). Elle est nécessaire en première intention, même quand tout va bien. La charge parasitaire devrait ainsi être évaluée 1 fois par an.

Des prélèvements sont effectués chez les chiots, les adultes en anœstrus et les chiennes en gestation et en lactation. En élevage, il est possible de réaliser des coproscopies poolées, en regroupant les prélèvements des animaux de chacune de ces catégories.

Pour chaque individu, les fèces sont récoltées 3 jours de suite. Les diarrhées avec des fèces liquides provoquent une dilution des agents, elles biaisent parfois les résultats. Un résultat négatif conduit à réitérer les prélèvements 10 jours plus tard.

Polymerase chain reaction

La PCR permet l’identification de virus, voire de certains parasites digestifs. Cette technique, très sensible, ne recherche cependant qu’un seul agent pathogène à la fois. Ainsi, lors de diarrhée sévère ou de mortalité subite au périsevrage, l’action d’un parvovirus est à suspecter, et une PCR parvovirus doit être réalisée.

TRAITEMENT ET PRÉVENTION

Présence de signes cliniques

L’état de déshydratation de l’animal conditionne son hospitalisation et sa mise sous perfusion intraveineuse. Les absorbants intestinaux fixent les bactéries, limitent les phénomènes sécrétoires et retiennent l’eau : à ce titre, la montmorillonite est 20 fois plus efficace que le kaolin. Les traitements spécifiques (antiparasitaires, antibiotiques) sont adaptés selon les résultats des examens de laboratoire.

La qualité des aliments et leur fractionnement améliorent le score fécal. Les litières sont renouvelées quotidiennement. Lors de l’introduction d’un nouvel animal, la mise en quarantaine de celui-ci est nécessaire avant son introduction dans la collectivité. Lorsque des signes cliniques apparaissent, les animaux atteints doivent être isolés (infirmerie de l’élevage ou hospitalisation).

Prophylaxie sanitaire

Les diarrhées du chiot sont un phénomène complexe, elles nécessitent une approche globale. Mettre en œuvre une prophylaxie sanitaire est fondamental pour le traitement. Le nettoyage inclut une phase mécanique, l’utilisation de détergents et le rinçage des surfaces. La désinfection est ciblée contre l’agent pathogène identifié, avec un temps de contact respecté. Le parvovirus est sensible à l’eau de Javel, mais celle-ci favorise la sporulation des coccidies et augmente leur vitesse de réinfestation. Les ammoniums quaternaires sont utilisés pour lutter contre les Giardia.

Prophylaxie médicale

La prophylaxie médicale comprend un traitement contre Toxocara, qui doit être systématiquement appliqué à l’âge de 2 semaines, puis tous les 15 jours jusqu’au sevrage.

Un traitement contre les coccidioses est à prévoir 4 ou 5 jours après une période de stress (transport, sevrage).

  • 1 Grellet A. et coll. Prevalence of Tritrichomonas foetus in puppies from french breeding kennels. Ecvim congress. Toulouse (France) 2010.

  • 2 Grellet A., Feugier A., Chastant S. et coll. Validation of a fecal scoring scale in puppies during the weaning period. Preventive Veterinary Medicine 2012, 106 : 315-323.

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