Crin-Blanc au Connemara

Les Travellers forment une communauté insolite en Irlande, où ils existeraient depuis le Moyen Âge. Rejetés par le reste de la population, ces nomades sont aussi appelés Tinkers (rétameurs). Par extension, ce terme désigne également les chevaux¹ qu’ils élèvent quand ils se sont sédentarisés dans les banlieues défavorisées. Le contraste entre la riche culture de ces Tsiganes autochtones et leur précarité dans l’Irlande moderne a inspiré, en 1992, Le Cheval venu de la mer qui ressort en salles pour les fêtes.

Mélange de réel et de merveilleux, le film exploite une croyance celte selon laquelle les âmes des morts prennent une forme animale pour protéger leurs enfants. Un superbe cheval blanc, magiquement surgi de l’océan, est adopté par un jeune enfant traveller qui vit avec son frère et son père dans un HLM délabré de Dublin. Le cheval devient rapidement l’enjeu d’une course-poursuite vers l’ouest sauvage de l’île. Une chevauchée initiatique entre présent et passé, modernité et tradition, qui permettra au trio de faire le deuil de la mère disparue (dont le cheval est l’incarnation) et de renaître à leurs identités perdues.

D’un syncrétisme original, entre western, fantastique, document social et récit pour enfants, le film, s’il n’évite pas un côté fourre-tout et des clichés dramatiques, n’en dessine pas moins un conte de fées moderne propre à marquer l’imaginaire des jeunes aussi durablement que l’admirable Crin-Blanc² qui vient d’être réédité en DVD.

• 1 Communément appelés gypsy vanner ou irish cob, ces chevaux semi-lourds, à la robe pie, aux fanons et aux crins abondants, constituent aujourd’hui une race reconnue (premier stud-book créé en 1998).

• 2 Film d’Albert Lamorisse (1953), disponible chez Shellac (www.shellac-altern.org).