Formation
NAC
Auteur(s) : Hugues Beaufrère*, Hugues Beaufrère**
Fonctions :
*diplomate ECZM Avian, université de Louisiane, à Bâton-Rouge (États-Unis).
– La salpingo-hystérectomie est indiquée pour traiter ou prévenir certains troubles de l’appareil reproducteur et du comportement.
– Des précautions doivent être prises lors de la mise en œuvre de cette chirurgie invasive, qui nécessite un matériel adapté.
La majorité des oiseaux ne possède qu’un ovaire et un oviducte. L’exérèse chirurgicale de l’appareil reproducteur femelle consiste principalement en une salpingo-hystérectomie. L’ovaire est rarement retiré en raison de sa nature diffuse et de sa proximité avec les veines cave caudale et iliaque commune. Il est situé cranio-ventralement au lobe cranial du rein gauche. L’oviducte, qui présente des circonvolutions, court le long du rein ventralement à celui-ci et de l’uretère gauche caudalement. Il est divisé en cinq parties : l’infundibulum, le magnum, l’isthme, l’utérus et le vagin.
Les indications d’une salpingo-hystérectomie sont variées : une torsion et un prolapsus de l’oviducte, la stérilisation d’oiseaux hybrides, le traitement ou la prévention de troubles reproducteurs, tels les dystocies (particulièrement les œufs non calcifiés, malformés et en position haute dans l’oviducte), les salpingites, les pontes chroniques, les cœlomites à jaune d’œuf et les troubles comportementaux. L’ablation de l’oviducte est supposée diminuer la stimulation hormonale et l’activité ovarienne, mais ce postulat est sujet à controverse. En effet, cette exérèse peut entraîner des cœlomites à jaune d’œuf chroniques, comme cela a été montré chez le pigeon, la caille, le canard et la poule. Dès lors, sans indication clinique évidente, cette procédure doit être évitée dans les espèces à ovulation fréquente. Cependant, pour les perroquets, chez lesquels la salpingo-hystérectomie est communément réalisée, ce risque semble mineur (cela peut aussi être lié à des formes subcliniques de cœlomites, non diagnostiquées, chez ces espèces) et acceptable compte tenu des autres risques reproducteurs graves qui peuvent être prévenus par ce type de chirurgie.
Un traitement hormonal préalable (implant de desloréline) peut être bénéfique pour réduire la taille de l’ovaire, de l’oviducte et des vaisseaux associés, et ainsi favoriser la visualisation des structures anatomiques et minimiser les complications et les hémorragies.
Cette chirurgie abdominale est invasive. Elle s’effectue dans le système respiratoire et n’est pas sans risque. Il est préférable que l’oiseau soit en bonne santé et stable avant d’envisager une telle procédure. Une fluidothérapie peropératoire est primordiale. De préférence, l’oiseau est mis à la diète pendant quatre à cinq heures pour diminuer la taille du système gastro-intestinal et faciliter l’intervention. L’emploi de matériel chirurgical approprié maximise les chances de réussite et la rapidité de la procédure. Ainsi, il convient que l’opération soit pratiquée à l’aide de loupes chirurgicales comportant une source de lumière à LED, d’un appareil Ellman de chirurgie à haute fréquence avec une électrode bipolaire (pince de Harrison de préférence), d’instruments de microchirurgie avec des extrémités miniaturisées, d’hémoclips et d’un écarteur abdominal circulaire Lone Star®.
La salpingo-hystérectomie peut être entreprise par une cœliotomie médiane ou latérale gauche. L’approche médiane est habituellement utilisée lorsque l’oviducte est large, pour les dystocies, les pontes ectopiques, les césariennes ou les torsions de l’oviducte. Lorsque la procédure est mise en place dans un but préventif, sur un oviducte de taille normale à diminuée, l’approche latérale gauche, considérée comme classique, permet une meilleure visualisation chirurgicale. Une technique par voie endoscopique, réalisable chez des oiseaux de plus de 300 g, est décrite.
Pour une cœliotomie latérale gauche, l’oiseau est placé en décubitus latéral droit, avec la patte gauche en abduction (position minimale chez les oiseaux) et positionnée caudalement. La peau est incisée à l’aide d’une pince chirurgicale bipolaire de l’extrémité du pubis gauche jusqu’à 1 cm cranialement aux côtes. La technique d’incision consiste à insérer la branche rectiligne de la pince sous la peau (en la transperçant), à l’avancer cranialement, à fermer délicatement la pince en ramenant la branche courbée au contact de la peau, à activer la fonction cut-coag à l’aide de la pédale pendant que le forceps est déplacé caudalement, en prenant soin de couper entre les follicules plumaires (technique d’incision dite de Harrison). Cette étape est répétée jusqu’à obtenir la taille d’ouverture désirée. Cette technique permet de limiter les pertes sanguines chez de petits oiseaux. Ensuite, la paroi abdominale est inspectée, l’artère superficielle fémorale médiale est coagulée et la paroi abdominale est incisée en utilisant la même technique que pour la peau. Pour augmenter la taille du champ chirurgical, les deux dernières côtes peuvent être coupées aux ciseaux après coagulation des espaces interosseux. L’écarteur Lone Star® est mis en place et la cavité abdominale est inspectée. La fine membrane transparente de la cavité intestino-péritonéale, qui recouvre tous les organes abdominaux, est incisée. Le ligament suspenseur ventral de l’oviducte est disséqué et incisé caudo-ventralement avec le forceps radiochirurgical, ce qui libère l’oviducte. En cas de prolapsus de l’oviducte, il est réduit en tirant délicatement sur la partie distale. Un hémoclip est placé entre l’ovaire et l’infundibulum ou le plus proximalement possible au niveau de l’infundibulum. Pendant que l’oviducte est rétracté ventralement, le ligament suspenseur dorsal de l’oviducte est incisé avec la pince bipolaire. Un hémoclip doit être posé sur tout vaisseau de taille significative rencontré dans ce ligament (ce n’est généralement pas nécessaire chez les perruches et les conures).
La dissection progressant caudalement, un hémoclip ou une suture est placé sur l’utérus à quelques millimètres de la jonction avec le cloaque, et l’oviducte est ôté. L’uretère doit être identifié dorsalement par rapport à l’oviducte et préservé pendant la dissection chirurgicale. La musculature et la peau sont fermées de façon standard avec des nœuds simples à l’aide d’un monofilament résorbable (PDS 4-0 ou 5-0), suture la moins réactive chez les oiseaux. Aucun bandage n’est apposé, ou seulement un Tegaderm®.
Pour une approche ventrale, la peau est incisée de l’extrémité caudale du bréchet jusqu’entre les os pubiens. La ligne blanche, ténue, est ouverte en prenant soin de ne pas endommager les organes sous-jacents. L’oviducte est excisé, comme précédemment décrit, sauf que la partie craniale ne peut être enlevée totalement car l’accès à la région ovarienne est réduit. Par cette approche, les sacs aériens ne sont pas ouverts, contrairement à l’abord latéral. L’incision peut être étendue latéralement le long du sternum. Pour une césarienne, l’oviducte est incisé au niveau de l’œuf bloqué dans une zone avasculaire. Après le retrait de l’œuf, il est suturé de manière classique. Une suture inversante n’est pas nécessaire, voire elle est contre-indiquée (diminution de la lumière de l’oviducte).
Une salpingo-hystérectomie est une chirurgie lourde et les soins postopératoires sont primordiaux. L’analgésie doit être poursuivie pendant plusieurs jours, associant du butorphanol (1 à 5 mg/kg selon l’espèce) et du méloxicam (0,5 à 1 mg/kg). Le cathéter peut être laissé en place durant les premières 12 à 24 heures. Un support nutritionnel est recommandé par gavage tant que l’oiseau ne se nourrit pas seul (au moins pendant les premières 12 à 24 heures). L’animal doit aussi être maintenu dans un incubateur.
Les infections et les problèmes de plaies chirurgicales sont rares. Les complications liées à l’anesthésie et à la chirurgie sont plus fréquentes. Une perruche callopsitte avant, pendant et après l’intervention chirurgicale peut perdre environ 0,8 ml de sang au total (soit 1 % de son poids), ce qui constitue seize gouttes de sang. Ainsi, une hémostase parfaite est requise. L’hypothermie est fréquente et peut entraîner la mort si elle n’est pas prévenue pendant et après l’opération par l’intermédiaire d’incubateurs, de matériels chirurgicaux appropriés et de techniques d’asepsie adaptées (pas d’alcool). Un emphysème sous-cutané se développe parfois en cas de fermeture inappropriée de la paroi abdominale.
Chez quelques individus ou dans certaines espèces, une ascite chronique peut survenir après cette chirurgie. Elle est liée aux dépôts de jaune d’œuf dans la cavité intestino-péritonéale.
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