La philosophie, tout bêtement

Jusqu’à la fin du précédent millénaire, les animaux n’avaient pas encore réellement d’existence dans la pensée française. En 1998, Le Silence des bêtes d’Elizabeth de Fontenay fit l’effet d’un pavé dans la mare. Se proposant de mettre « la philosophie à l’épreuve de l’animalité », ce livre, unique en son genre, d’une érudition impressionnante, revisitait pas moins de vingt-cinq siècles de philosophie occidentale (des présocratiques à Deleuze et Derrida) pour reconstituer « la trajectoire des systèmes de représentation qui tissent le destin occidental de l’animal ». Fondant par là même une « critique de la métaphysique humaniste, subjectiviste et prédatrice » (autrement dit de la pensée verrouillée autour du « propre de l’homme »), cette vision inédite et hétérodoxe de l’histoire de la philosophie participa notoirement au glissement sensible de point de vue, observé aujourd’hui dans toutes les sciences humaines, à l’égard de la question animale.

Référence incontournable de toute réflexion sérieuse sur le sujet, ce gros livre est aujourd’hui disponible dans une belle édition de poche qui devrait faciliter son accès auprès de ceux que notre manière de penser les animaux intéresse¹.

Le Silence des bêtes : la philosophie à l’épreuve de l’animalité d’Elizabeth de Fontenay, Points Essais (éditions du Seuil), 1 088 pages, 14,50 €.

• 1 À signaler également la parution, dans la Petite bibliothèque Payot, d’un autre grand classique de la réflexion sur l’animal (plus radical !) : « La libération animale » de Peter Singer, 10,65 €.