Élégie pour un retriever

Mélodie¹ est un livre étonnant, écrit comme une petite musique, à la mémoire d’un chien défunt, une femelle golden retriever qui s’appelait… Mélodie. La passion exceptionnelle que l’écrivain Akira Mizubayashi lui voua, l’ouvrage en célèbre doucement la mémoi­re, dans l’indifférence de la censure morale que l’héritage philosophique impose encore à nos sentiments envers les animaux.

Que ceux qui auraient trop été les témoins des excès de pathos déchaînés par la mort d’un animal se rassurent. L’écriture riche, précise, délica­te de l’écrivain japonais maintient à distance la mièvrerie et le sentimentalisme. Elle bâtit au contraire une œuvre élégiaque originale, ô combien littéraire. « L’homme a inventé la littérature pour y déposer les marques laissées par la douleur qu’il a éprouvée au moment crucial où il a pris conscience de sa condition d’homme », justifie l’auteur.

En retraçant par de courts chapitres² la vie de l’être perdu, l’auteur érige leur relation partagée en une expérience initiatique et poétique. Magnifique livre d’affliction et de réflexion sur la vie d’un animal aimé, Mélodie, au-delà de sa mort, témoigne avec un raffinement rare d’une infinie gratitude pour tout ce qu’il a incarné.

Mélodie, chronique d’une passion d’Akira Mizubayashi, collection “L’un et l’autre”, éditions Gallimard, 280 pages, 19,50 €.

• 1 Dans la même collection que « Les Larmes d’Ulysse » de Roger Grenier, qui creusait déjà la question du lien entre chiens et littérature.

• 2 Aux titres d’une simplicité désarmante : Premier repas, Promenade, Les derniers jours.