Entreprise
Auteur(s) : Patrick Lelong
Le projet de loi sur la sécurisation de l’emploi, voté le 9 avril 2013 par l’Assemblée nationale, offre de nouveaux droits aux salariés. Toute entreprise devra proposer une complémentaire santé à ses employés, d’ici au 1er janvier 2016. Explications.
Aujourd’hui, près de 400 000 salariés ne disposent pas d’une complémentaire santé et près de 4 millions d’actifs financent eux-mêmes leur assurance ou leur mutuelle, sans participation de l’employeur. Dans le cadre de la loi sur « la sécurisation de l’emploi et des parcours professionnels des salariés », en cours d’examen au Sénat, deux articles sont consacrés à la généralisation de la couverture complémentaire des frais de santé. Celle-ci sera effective au 1er janvier 2016. Ces articles 1 et 2 de l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013, ou « accord sur l’emploi »1, vont changer la donne pour l’ensemble des entreprises.
Tous les salariés, peu importe la taille de la structure où ils travaillent, sa forme ou son domaine d’activité, seront couverts par une « complémentaire santé d’entreprise » dont la moitié du coût (au minimum) sera payé par l’employeur et l’autre moitié par le salarié. Un nouvel article issu de cette loi (L.911-7) figurera dans le Code de la Sécurité sociale. Il constitue un socle minimal de garantie ou de couverture dont devront bénéficier tous les salariés. Il s’agit d’un “panier de soins” qui comprend la prise en charge totale ou partielle de la participation de l’assuré au ticket modérateur, le forfait journalier hospitalier, les soins de prothèses dentaires et un forfait optique.
Selon l’accord national interprofessionnel, la mise en place de ce dispositif se déroulera en trois étapes, sur trois années.
> La première phase consiste à ouvrir les négociations avec les branches professionnelles, avant le 1er juin 2013. Les entreprises liées par une convention collective ou par des accords professionnels devront négocier le contenu et le niveau des garanties accordées, la répartition du paiement des cotisations, les modalités du choix de l’organisme assureur (assurances, mutuelles, groupes de protection sociale). En l’état actuel, le principe du libre choix de l’organisme assureur est laissé aux partenaires sociaux dans le cadre de la négociation. Un décret d’application doit préciser les modalités d’une procédure dite de transparence.
Un délai de dix-huit mois est laissé aux entreprises à compter de l’entrée en vigueur de la convention pour se conformer aux nouvelles obligations.
> Dans une deuxième phase, si aucun accord de branche n’est signé avant le 1er juillet 2014, l’article L.2242-11 du Code du travail, qui traite de l’obligation annuelle de négocier sur la prévoyance, prendra le relais.
> La troisième étape prévoit que, si aucun accord d’entreprise n’est obtenu au 1er janvier 2016, l’employeur devra prendre une mesure unilatérale pour que ses salariés bénéficient d’une couverture collective minimale.
Le second article de l’accord national interprofessionnel porte sur la portabilité de la couverture santé et prévoyance. Par rapport au système de santé actuel, deux améliorations sont adoptées et concernent ceux qui quittent l’entreprise.
Le nouvel article L.911-8, inscrit dans le Code de la Sécurité sociale, prévoit d’abord le maintien à titre gratuit de la couverture santé et prévoyance pour ceux qui perdent leur emploi, sous réserve qu’ils aient droit à une prise en charge par le régime chômage (quelle que soit la cause, sauf la faute lourde). Il est laissé un délai d’une année aux entreprises pour mutualiser la couverture santé, et deux années pour la couverture « garanties de prévoyance ». Ce nouvel article complète l’article 4 de la loi Evin. C’est ainsi que le salarié peut demander un maintien de sa couverture complémentaire, à titre individuel, pour les six mois qui suivent son départ de l’entreprise, ou davantage si le régime de cette dernière est plus favorable.
La seconde amélioration concerne l’allongement de la durée de la portabilité. Celle-ci passe de neuf à douze mois, tant pour la couverture santé que pour celle de la prévoyance.
Les salariés des très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME) vont pouvoir disposer d’une assurance collective. Souvent, ils devaient opter pour une couverture individuelle, dont le coût est en moyenne 20 % supérieur à celui des polices de groupe. En n’acquittant plus que la moitié du montant des primes (l’autre moitié est payée par l’employeur), la complémentaire collective permettra à chacun de faire des économies.
L’anti-sélection est une autre caractéristique, et non des moindres, des systèmes collectifs. Cela signifie que l’âge, le sexe, la bonne ou la mauvaise santé des uns et des autres sont mutualisés. Pas d’exclusion donc, ni de majoration de prime par individu.
Parmi les organismes susceptibles de tirer profit de cette généralisation de la complémentaire santé figurent, en première place, les institutions de protection sociale (telles qu’AG2R La Mondiale, Humanis, Malakoff Médéric, etc.). Ils assurent déjà la moitié des salariés du secteur privé, avec quelque 6,5 millions de bénéficiaires et 5,3 milliards d’euros de cotisations chaque année. Leur mode de gouvernance paritaire, avec deux présidents ou coprésidents qui cohabitent, l’un désigné par les syndicats de salariés, l’autre par les groupements d’employeurs (comme le Medef), en fait aussi les grands favoris. Le dialogue est donc la règle. Les grands perdants seront les courtiers qui commercialisent essentiellement des complémentaires santé individuelles. Au milieu se situent les mutuelles, avec des situations fortement contrastées selon leur taille et leur secteur d’éligibilité.
Certains assureurs ne cachent pas leur souhait de se rapprocher des institutions de prévoyance pour établir des partenariats, sachant qu’elles sont le plus à même de remporter les contrats collectifs. Des regroupements sont donc à prévoir.
Mais davantage de mutualisation ne signifie pas, loin s’en faut, plus de marchés pour les mutuelles, souvent moins présentes sur le secteur de la complémentaire collective. Pour certains dirigeants politiques, la complémentaire pour tous va progressivement affaiblir le mouvement mutualiste. La discussion reste ouverte. Selon le ministre du Travail, Michel Sapin, les « partenaires choisiront le dispositif qui leur paraît le meilleur en toute liberté », soulignant qu’aucun acteur ou aucune catégorie ne serait propriétaire de ce marché.
Toujours est-il que les petites entreprises ont clairement indiqué que cette nouvelle couverture devait relever de la compétence des partenaires sociaux, dans le cadre des accords de branches professionnelles. Pour celles-ci, le fait de se présenter isolément avec de faibles effectifs face à un assureur, c’est apparaître en état de faiblesse. Laisser aux branches professionnelles le soin de négocier au mieux les intérêts des salariés et des entreprises qu’elles représentent, en toute transparence, comme le prévoit le décret à venir, constitue la meilleure solution, y compris quand il s’agit de désigner un organisme gestionnaire.
Plusieurs questions restent néanmoins en suspens. La première concerne le contenu du “panier de soins”. Sera-t-il a minima ? Les entreprises auront la possibilité de le rendre plus attractif, selon leurs salariés. Ce sera tout l’objet des négociations. Une entreprise qui emploie, par exemple, de jeunes salariés, avec une majorité de femmes, examinera le contenu du panier de soins différemment qu’une structure qui salarie majoritairement des seniors.
Ainsi, une bonne complémentaire santé sera un élément d’attractivité pour l’entreprise, et un instrument de fidélisation des salariés.
Reste à connaître le coup d’après. Par exemple, est-ce que ce transfert des dépenses de la Sécurité sociale vers les complémentaires santé n’est pas le début d’un désengagement de la puissance publique ? L’avenir le dira.
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