Lorsque le droit communautaire s’invite… - La Semaine Vétérinaire n° 1542 du 31/05/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1542 du 31/05/2013

Entre nous

VOUS AVEZ LA PAROLE

Auteur(s) : Christian Lemaire

Fonctions : praticien au Havre (Seine-Maritime)

Notre confrère réagit à l’affaire des exportations illégales de médicaments, évoquée notamment dans La Semaine Vétérinaire n° 1540 du 17 mai 2013 en pages 14-15.

Un journal professionnel titre : « Importation de médicaments espagnols : les juges angéliques de Niort »… Mais qui sont vraiment “les angéliques” dans cette affaire ? En effet, devant une chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Niort, notre droit national vient d’être neutralisé en raison du manquement de la France à ses obligations, avec des conséquences “désastreuses” pour la profession vétérinaire.

Quatre éleveurs des Deux-Sèvres, impliqués dans une importation illégale de médicaments vétérinaires en provenance d’Espagne, ont été interceptés par les Douanes avec un coffre de voiture bourré de « cartons remplis de boîtes de médicaments à usage vétérinaire », pour un « gain de 45 % par rapport au prix national »… Ici des “vaccins pour chiens”.

En dépit de la gravité des faits, le juge répressif de Niort a prononcé la relaxe, en fondant sa décision sur le droit communautaire et la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), rappelant au passage « la supériorité des normes juridiques européennes sur le droit interne ». « Cette décision est jugée désastreuse par le Syndicat national des vétérinaires d’exercice libéral (SNVEL), surtout au regard de la promotion de l’usage raisonné des antibiotiques dans le cadre du plan ÉcoAntibio 2017 », commente-t-il. En effet, il existe dans notre réglementation un décret1 relatif aux importations vétérinaires qui soumet à autorisation celles dites parallèles, c’est-à-dire les importations de médicaments identiques à ceux autorisés en France.

Sans entrer dans les détails d’une affaire relativement technique, on observera simplement que les éleveurs poursuivis ont été blanchis en dépit des violations avérées des règles françaises, au motif que soit ces règles étaient contraires au droit communautaire, soit elles n’avaient pas fait l’objet d’une notification en bonne et due forme à la Commission européenne, ce qui empêche le juge répressif de caractériser l’infraction, avec la relaxe comme conséquence.

Et, parce que notre droit n’était déjà pas conforme, une ordonnance de non-lieu a été confirmée par la chambre d’instruction de la cour d’appel de Rennes, le 13 novembre 2003, procédure dans laquelle le conseil ordinal de Bretagne, le Conseil supérieur de l’Ordre, le Syndicat de l’industrie du médicament vétérinaire, le magazine Que choisir et le SNVEL, parties civiles, avaient été déboutés de leur action, visant en vain à faire condamner des éleveurs importateurs d’antibiotiques sans autorisation. Pour avoir méconnu ses obligations de notification, les autorités françaises ont donc conduit inévitablement le juge à devoir écarter la norme réglementaire française, pourtant en vigueur, conformément au droit européen et à la jurisprudence de la CJUE.

Nul doute que plusieurs éleveurs devraient s’engouffrer dans cette brèche béante creusée par nos autorités méconnaissant leurs obligations, peut-être par “angélisme”… en tout cas pour notre plus grand malheur. « Il ne pourra qu’induire des flux transfrontaliers massifs de médicaments vétérinaires », ajoute l’un des responsables du SNVEL. D’où la nécessité de nos autorités de bien connaître le droit de l’Union, pour pouvoir appliquer la réglementation en vigueur, plus restrictive. Et cela en toute sécurité juridique.

Dans ces conditions, le jugement du tribunal de grande instance de Niort, certes “désastreux” pour notre profession, n’est pas surprenant, car le juge a fait son travail en rendant, le 21 mars 2013, une décision de qualité solidement argumentée. En revanche, ce sont bien les manquements graves des ministères à leurs obligations de notification qui sont à l’origine de ces relaxes, avec le risque de porter un lourd préjudice à la profession. Celle-ci pourrait d’ailleurs demander réparation à la France par le versement de dommages et intérêts. Nul doute, Bercy appréciera. Le parquet a fait appel de cette décision.

  • 1 Décret n° 2008-558 du 27/5/2005.

  • 2 Arrêt de principe rendu le 3/10/2009 par le Conseil d’État.

  • 3 Article 8 de la directive 98/34 CE du 22/6/1998 : « Tout État membre qui souhaite adopter une nouvelle règle technique au sens de cette directive ou modifier une règle technique existante doit, sauf exception expressément prévue par la directive, en informer la Commission européenne dans les conditions prévues par cet article. »

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