Blanche-Neige et le toro bravo

Voilà un film pour séduire les aficionados de la tauromachie comme ses détracteurs. Si la corrida y est montrée sans artifice, elle y est aussi tournée en dérision. Les taureaux sont toujours épargnés, l’habit de lumière est porté par des nains et c’est finalement une femme qui triomphe dans l’arène. Blancanieves est l’insolite transposition de l’univers des contes (Blanche-Neige, Cendrillon, La Belle au bois dormant) dans la Séville des années 20.

Tandis qu’un célèbre matador est encorné et devient tétraplégique, sa femme meurt en accouchant d’une fille, aussitôt confiée à sa grand-mère. À la mort de celle-ci, l’enfant est renvoyée chez son père où elle est maltraitée par l’infirmière manipulatrice qui a épousé le veuf. Devenue jeune femme, l’orpheline est recueillie par une troupe ambulante de nains toreros et débute une vie nouvelle qui va la réconcilier avec son passé. Muet, ce film en noir et blanc rend ici un hommage impressionnant (de maîtrise) au cinéma des origines – de Tod Browning à Luis Buñuel – comme au patrimoine culturel intime du réalisateur (espagnol) : contes, corrida, flamenco, art baroque, toiles de Goya, etc. Un dessein qui aurait pu cantonner le film à n’être qu’un exercice de style virtuose, amusé et un brin plaqué, à l’instar de The Artist. Blancanieves est un peu plus que cela. Son héroïne nous émeut réellement. La fin, onirique et surprenante, est particulièrement belle.

Blancanieves de Pablo Berger avec Macarena Garcia, Sofia Oria, Daniel Giménez Cacho, Maribel Verdù, Angela Molina, 2012, 1 h 44, France Télévisions Distribution, DVD : 14,99 €, Blu-Ray : 20 €.