« Élever des chiens ? Mais tu vas mourir de faim ! »

Un chiot scottish ou westie coûte 2 000 €. Par rapport aux autres éleveurs, ce tarif est nettement plus élevé. Mais j’estime que c’est le prix à payer pour avoir un chiot issu d’une sélection prestigieuse et élevé dans des conditions exceptionnelles », prévient la fondatrice du Moulin de Mac Gregor, à Béville-le-Comte (Eure-et-Loir). Ruth O’Connor n’y va pas par quatre chemins. Et pour cause, en une vingtaine d’années, l’élevage, qui accueille à l’année une trentaine de West Highland white terriers et une vingtaine de scottish terriers, a reçu de nombreuses distinctions : meilleur élevage de westies en France (de 1998 à 2010 et en 2012) et meilleur élevage de scottish terriers pendant 14 ans (1996-2004 et 2006-2012). Présentés dans 38 pays, les chiens de Ruth O’Connor ont remporté 350 titres de champions. Avec eux, elle compte sept titres de champion du monde et six de champion d’Europe. Cerise sur le gâteau, les titres de meilleure race en 2003 (scottish), 2007 et 2008 (westie) ont été conquis à Crufts, en Grande-Bretagne, là où se tient chaque année la plus grande exposition canine au monde. Le palmarès de ses chiens et son savoir-faire en font, aujourd’hui, une experte courtisée. « Résultat, n’importe quel possesseur de westie m’appelle, oubliant parfois que les chiots sont des êtres vivants, avec les aléas que cela suppose », explique Ruth O’Connor. Trop impliquée dans la filière pour faire partie des jurys, elle préside toutefois depuis six ans le Club des amateurs de terriers d’Écosse.

Faire le plus beau chien du monde

Pour elle, l’élevage est un art, mais aussi un art de vivre. Quand, au lendemain de ses études vétérinaires à Maisons-Alfort, elle goûte aux remplacements et aux gardes, elle regarde désespérément la pendule. « Je voulais vivre avec des chiens », se souvient-elle. Petite déjà, sa mère l’avait mise en garde : « Élever des chiens ? Mais tu vas mourir de faim ! » Alors, elle a choisi la formation de vétérinaire, pour rester à leur contact. « Lorsque j’étais à Maisons-Alfort, on nous a apporté un westie dans un état lamentable. J’ai eu pitié, je l’ai soigné et emmené chez moi. » Dès sa sortie de l’école en 1990, soutenue par sa famille, elle achète dix westies et se lance, « à une époque où cette race devenait à la mode ». Aujourd’hui, elle connaît des hauts et des bas. « Certaines années, je suis même dans le rouge, confie-t-elle. Dans l’ensemble, on ne gagne pas grand-chose. Mais mon but est de faire le plus beau chien du monde. Alors, je voyage beaucoup. À Bordeaux, à Porto, mais aussi en Suisse ou en Nouvelle-Zélande. Je participe en moyenne à deux concours par mois. Mais voyager à l’étranger avec des chiens coûte cher. » Même si, reconnaît-elle, sa formation de vétérinaire lui permet de réaliser de sérieuses économies, de gagner du temps et d’échapper au stress. « Avec 50 chiens, je me lève à 6 h et me couche à 22 h tous les jours et je travaille comme deux personnes. Je m’occupe personnellement de chaque animal. Je les peigne, les épile un par un et veille particulièrement à la sélection. À tel point qu’en 20 ans, j’ai pu éradiquer certains défauts et je suis présente dans les pedigrees du monde entier », estime Ruth O’Connor qui organise aussi des stages de toiletteurs, « comme ça, je sais où envoyer mes clients ».