Réforme de la politique agricole commune
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SOCIOPRO
Auteur(s) : Serge Trouillet
Dans le cadre de la mise en œuvre de la politique agricole commune (PAC), le président de la République a rendu ses arbitrages lors du Sommet de l’élevage à Clermont-Cournon, du 2 au 4 octobre. Ils marquent clairement la priorité qu’il accorde au soutien de l’élevage.
Une PAC pour sauver l’élevage » : tel était le message qu’affichaient les autocollants sur fond vert, distribués par milliers aux visiteurs du 22e Sommet de l’élevage de Clermont-Cournon (Puy-de-Dôme), à quelques heures de son inauguration par le président de la République. François Hollande y était très attendu. Ses promesses de réorientation de la PAC en faveur de l’élevage résonnaient en écho aux oreilles des professionnels de ce secteur agricole, qui s’étaient déplacés en masse pour l’écouter. L’exercice présidentiel était risqué. L’ensemble des organisations professionnelles du grand Massif Central, soutenues par des élus politiques toutes tendances confondues, l’avaient en effet exhorté, dans leur “appel de Tulle” du 20 septembre dernier, à traduire concrètement cette réorientation en faveur des zones agricoles les plus fragiles en France.
François Hollande ne pouvait se présenter les mains vides dans la capitale auvergnate. L’amphithéâtre bondé de la Grande Halle cournonnaise peut alors l’attester : les décisions annoncées au fil de l’allocution présidentielle se traduiront effectivement par « un gain de revenu qui pourra aller jusqu’à 30 % pour un éleveur à la fin de la période » (en 2020), selon le chef de l’État. Son discours, aux accents chiraquiens, a fait mouche. François Hollande a eu des mots forts à l’endroit d’une profession qui « traverse depuis des années des difficultés structurelles. (…) Or, quand la production animale recule, c’est tout un équilibre qui s’effondre (…) et c’est la ruralité qui est menacée dans ses fondements ».
Conscient cependant que de belles paroles ne suffiraient pas à convaincre un auditoire peu réputé pour partager ses idées politiques, le président de la République a décliné un train de mesures qui aboutiront bel et bien à réorienter vers l’élevage plus de 800 millions d’euros d’aides par an, dans la future PAC 2014-2020, au détriment des productions végétales. « Il ne s’agit pas seulement d’un rattrapage. C’est une reconnaissance de la place de l’élevage dans notre agriculture », a-t-il déclaré.
Pour étayer son propos, il s’est attaché à replacer ces mesures dans une stratégie politique globale, tout en rappelant que le gouvernement agit dans cette direction depuis un an. Qu’il s’agisse de la loi bancaire de juillet 2013 « qui permet de mieux lutter contre la spéculation sur le prix des matières premières », du projet de loi de consommation « qui rénove les relations entre l’industrie de transformation et la distribution », ou encore de l’accord européen qu’il a pu « arracher » en février dernier avec le ministre de l’Agriculture, « garantissant globalement le budget agricole et la position de la France ». Il s’est félicité au passage du maintien de l’enveloppe d’aides pour la France à près de 64 milliards d’euros sur la période 2014-2020. L’amphithéâtre a retenu son souffle lorsque François Hollande, maîtrisant habilement le teasing, s’est mis à dérouler le détail de ses annonces. Évoquant l’élevage non comme un simple patrimoine, mais « comme un investissement d’avenir », il a énoncé ses priorités tant attendues : le soutien de ce secteur, un plus grand accompagnement des agriculteurs dans les territoires fragiles, un suivi de la compétitivité des entreprises agricoles, une meilleure répartition des aides.
Dans le détail, la possibilité d’augmenter la part des aides couplées concernant l’élevage sera utilisée complètement, les modalités de répartition étant « modifiées au profit des volumes produits ». Une prime à la vache laitière et une aide à l’engraissement seront introduites « pour encourager la valorisation des produits sur les territoires et conforter les abattoirs et les coopératives ». De même, seront mises en place des aides destinées à encourager la production nationale de protéines végétales, « afin d’améliorer l’autonomie fourragère, qui constitue un objectif stratégique pour la France ».
La principale revendication des éleveurs, l’indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), fera l’objet d’une première revalorisation de 15 % dès 2014, dans toutes les zones. Le plafond de cette indemnité compensatoire sera rehaussé à 75 hectares et, en termes de simplification, elle sera fusionnée avec la prime herbagère agro-environnementale (PHAE) en 2015. Au total, a résumé le chef de l’État en insistant sur « le caractère national de cette politique », « au terme de cette réforme qui bénéficiera à 85 000 agriculteurs, l’ICHN sera revalorisée de 300 millions d’euros par an pour atteindre un budget annuel global de près de 1,1 milliard ». Un geste salué chaudement par l’auditoire auquel l’homme politique François Hollande ne manque pas de rappeler qu’il s’agit là, « quarante ans après la création de l’indemnité spéciale montagne, de la plus forte augmentation jamais réalisée ».
L’effort supplémentaire de 100 millions par an, pour promouvoir l’installation, réjouit Pierre Chevalier, président de la Fédération nationale bovine (FNB) : « Dans les zones d’élevage agricoles fragiles, la moitié de nos chefs d’exploitation ont plus de 50 ans. Nous sommes face à une véritable nécessité de renouvellement des générations. Il fallait donner un coup de pouce à l’installation dans ces régions. » Il en est de même pour l’annonce de la création d’un fonds de modernisation alimenté par l’État à hauteur de plus de 200 millions par an : « Nos exploitations d’élevage ne pourront pas être compétitives sans modernisation de l’outil de travail, notamment les bâtiments. C’est une nécessité pour la moitié d’entre elles. Cette enveloppe doit faciliter le travail des éleveurs, qui ont beaucoup de contraintes, mais aussi répondre aux préoccupations environnementales, sanitaires et de bien-être animal. »
En confirmant la surdotation des 52 premiers hectares, combattue par la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), François Hollande a réaffirmé sa volonté politique de « soutenir l’activité et l’emploi dans les exploitations », en particulier les plus petites comme en élevage, « afin de consolider le tissu économique de notre territoire ». En outre, sur l’épineux sujet de la convergence des aides au niveau national, entre les 60 % réclamés par la FNSEA et les 100 % souhaités par son ministre Stéphane Le Foll, le président de la République a opté pour une voie progressive à partir de 2015 pour atteindre 70 % en 2019, avec des pertes liées à la mise en place de cette convergence plafonnées à 30 % du montant des aides.
Soucieux de ne pas déstabiliser les productions animales intensives, et de ne pas opposer les productions agricoles les unes aux autres, le chef de l’État a semble-t-il réussi son grand oral sur la réforme de la PAC. Du côté de la FNSEA, le président Xavier Beulin1 se veut constructif : « François Hollande a reconnu deux choses : il faut rendre l’agriculture française compétitive ; il faut renforcer sa diversité, c’est-à-dire celle de notre alimentation. » Au moment où nous entrons dans une phase de négociation avec les États-Unis dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce, Xavier Beulin redoute en effet que la France se voit imposer une forme de banalisation de l’alimentation : « Notre chance, c’est au contraire de jouer sur d’autres registres comme la diversité, la qualité, le terroir, les produits segmentés ; nous devrons tirer notre épingle du jeu. »
Quant à Pierre Chevalier, son voisin de Corrèze, il se félicite « que la France prenne des décisions économiques pour l’élevage. C’était urgent. Parce que cette activité concentre les plus faibles revenus agricoles et que les contraintes de temps de travail sont énormes, nous sommes aujourd’hui à un point de rupture économique et sociologique. Nous étions sur une véritable cause nationale de politique d’aménagement du territoire sur un tiers de la France ».
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