TEIGNE ET POUX, FLÉAUX DES TANNERIES DE VEAUX

L’amélioration de la qualité des cuirs n’est pas un vain mot en Alsace. « Aujourd’hui, dans le “cinquième quartier des filières”, le cuir a pris une place plus importante. Pour nous, il est intéressant de comprendre les pré­occupations des tanneurs, confie Béatrice Lemaire, présidente du directoire de Financière Serval, passionnée par la visite. Si nous arrivons à fournir davantage de belles peaux, tout le monde y gagnera. »

« Les peaux sont classées de 1 à 5, selon des critères de qualité », explique Jean-Christophe Muller, président de la tannerie Haas. Pour lui, qui travaille majoritairement avec le secteur de la maroquinerie, il est essentiel d’avoir des peaux classées 1 et 2. Mais les deux problèmes principaux auxquels il est confronté sont la teigne et les poux, dont la prolifération est exponentielle depuis quelques années. Pour contrer le premier fléau, l’entreprise alsacienne participe à la vaccination contre la teigne, sous conditions. Face au retour des poux, « différents produits nous ont été proposés. Certains, moins chers, étaient moins efficaces », constate Michel Bach, directeur technique et qualité chez Serval. Ces parasites ne gênent pas seulement les animaux, ils laissent des marques sur leurs peaux.

Le travail de “rivière”, une étape primordiale

Chef d’entreprise passionné, Jean-Christophe Muller est un fin pédagogue dès qu’il s’agit d’expliquer les différentes étapes du tannage.

Tout commence par le travail “de rivière”, autrefois pratiqué au fil de l’eau, qui prépare les peaux au tannage en transformant la peau brute en peau “en tripe”. La trempe (ou le reverdissage) s’effectue en foulon (ou en coudreuse) dans de l’eau additionnée de produits chimiques pour transformer les souillures superficielles et tout ce qui est soluble. L’épilage et le pelanage éliminent chimiquement l’épiderme, la laine et les poils. Enfin, l’écharnage et le refendage ôtent les résidus graisseux sur le côté chair de la peau et égalisent son épaisseur.

Les défauts passés au peigne fin

Grâce aux tanins végétaux (châtaignier, mimosa, quebracho), minéraux (sulfate de chrome essentiellement) et synthétiques (aldéhydes), le tannage transforme la peau en cuir, non putrescible. « Le tannage au chrome est utilisé dans plus de 85 % de la production mondiale, car il est facile d’emploi et permet d’obtenir rapidement un cuir semi-fini de couleur bleutée, le wet blue », précise Jean-Christophe Muller. À ce stade, le tanneur effectue un contrôle qualité, le premier d’une longue série. Car plus il y a de défauts, moins la peau a de valeur. Épaisseur, surface, veines, rides, cicatrices de teigne ou autres, coutelures, défauts de dépouille (traces de sang liées à l’écorchage à l’abattoir), tout est passé au peigne fin.

Il faut ensuite essorer, mettre au vent (pour dérider la peau), sécher sous vide, cadrer (pour mettre à plat) et palissonner (assouplissement mécanique).

Le finissage rend les peaux plus homogènes, avec des caractéristiques d’aspect, de toucher et de résistance conformes au cahier des charges du client.

« Il n’y a pas de définition officielle de la peau de veau, mais usuellement, ce terme est employé pour des peaux dont le poids est inférieur à 18 kg », précise le tanneur. Aujourd’hui, il reste en France cinq tanneries spécialisées dans la transformation des peaux de veau en cuir.