Formation
NAC
Auteur(s) : Samuel Sauvaget
Fonctions : praticien exclusif NAC à la clinique Massilia (Marseille)
Un lapin bélier femelle de quatre ans est référé pour une exophtalmie gauche, à la suite de l’échec des traitements antibiotiques et anti-inflammatoires. Son état général est bon et son transit normal, malgré une légère baisse de l’appétit. L’œil gauche présente une exophtalmie, une kératite d’exposition et un ulcère cornéen superficiel. Une procidence de la troisième paupière et un épiphora purulent sont constatés. Les capacités visuelles semblent altérées du côté gauche. Les propriétaires ont notamment observé chez leur lapin une difficulté à trouver la nourriture lorsque celle-ci est placée de ce côté de l’animal. Les réflexes photomoteurs sont présents. Un examen de la cavité buccale, réalisé sans anesthésie et à l’aide d’un otoscope (donc incomplet), ne révèle pas d’anomalie dentaire.
Le tableau clinique évoque un abcès orbitaire. Une origine dentaire est suspectée. L’examen de choix est le scanner. Il permet d’évaluer la présence d’un abcès, de la dent impliquée et de l’intégrité du globe oculaire.
Les images, compatibles avec la présence de lésions liquidiennes dans les régions rétrobulbaire et massétérique gauches, s’accordent avec l’existence d’un processus infectieux, probablement secondaire à une maladie parodontale. Même s’il est déplacé, le globe oculaire ne présente pas d’images anormales. Aucune lésion dentaire n’est mise en évidence.
Il est envisageable de soigner cet abcès sans avoir recours à une extraction dentaire et en conservant le globe oculaire. Il est cependant impossible, à ce stade, d’établir un pronostic relatif à la récupération de la vision.
Le lapin reçoit en prémédication du midazolam (0,5 mg/kg), de la médétomidine (0,03 mg/ kg) et de la kétamine (10 mg/ kg) par voie intramusculaire, ainsi que de la buprénorphine (0,05 mg/kg) par voie sous-cutanée. Un cathéter est posé à la veine saphène. Une induction à l’alfaxalone (1 mg/kg) permet l’intubation de l’animal sous contrôle endoscopique. Un examen de la cavité buccale confirme l’absence d’anomalie dentaire et de pus dans la région maxillaire gauche. Un relais gazeux à l’isoflurane est mis en place.
La zone sous-orbitaire gauche est préparée chirurgicalement. La peau est incisée sur 2 cm sous la paupière inférieure. Deux fils de traction y sont placés, ce qui permet de récliner le globe oculaire, de disséquer les tissus sous-cutanés et d’accéder à la cavité abcédée. Du matériel purulent et inflammatoire est retiré à l’aide d’une curette et grâce à un rinçage abondant au sérum physiologique. Une mèche iodoformée est introduite dans la cavité. La plaie est marsupialisée et une blépharorraphie permet de protéger la cornée.
Une analgésie, une antibiothérapie (métronidazole à raison de 20 mg/kg deux fois par jour per os ; pénicilline G à la dose de 30 000 UI/kg par voie intramusculaire tous les trois jours) et une collerette sont mises en place. La reprise de l’appétit et du transit est constatée au bout de 48 heures. L’animal est rendu à son propriétaire après le retrait de la mèche.
Au bout de 15 jours, un contrôle permet de constater un bon état général, une plaie de marsupialisation propre et un retour presque à la normale de la position du globe oculaire. Les points de blépharorraphie sont retirés. L’ulcère a presque disparu. Un mois et demi après l’intervention chirurgicale, l’œil a totalement repris sa position. L’ulcère a cicatrisé. Le propriétaire a l’impression que le lapin est en train de recouvrer la vue du côté gauche. Au bout de deux mois, cela est confirmé et l’animal se dirige normalement vers sa nourriture, même lorsque celle-ci est présentée à sa gauche.
Les abcès orbitaires chez le lapin sont majoritairement d’origine dentaire. Ils se manifestent par une exophtalmie unilatérale et des lésions oculaires plus ou moins marquées (de la kératite d’exposition à l’abcès oculaire). L’infection part généralement d’une dent située en regard de la cavité orbitaire. L’extraction de celle-ci est indispensable afin de retirer la source du foyer infectieux. Le traitement peut alors être instauré par voie buccale lorsqu’il est possible d’atteindre la cavité abcédée par le trou laissé par la dent extraite. Un abord chirurgical externe, qui inclut éventuellement une énucléation lorsque l’œil n’est plus viable, est également possible. Si l’œil est susceptible d’être sauvé, il importe d’envisager un traitement conservateur. L’originalité du cas présenté réside dans l’absence d’implication dentaire constatée au scanner. Néanmoins, le passage de germes issus des cavités buccale ou nasale est à suspecter. Une voie hématogène ne peut être totalement écartée.
L’évaluation clinique des capacités visuelles est relativement difficile chez le lapin, qui est un animal peu expressif. Le pronostic de récupération de celles-ci est difficile à établir. La prudence est donc de mise en attendant l’éradication du phénomène infectieux.
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