Un stress pendant la gestation des brebis altère le comportement des agneaux

Des conditions d’élevage stressantes pour les brebis durant la gestation affectent durablement la réactivité comportementale ultérieure des agneaux, d’après les résultats d’une étude présentée aux Rencontres autour des recherches sur les ruminants à Paris, en décembre 2013¹ par Marjorie Coulon, de l’Inra de Theix (Puy-de-Dôme) en collaboration avec l’Inra de Nouzilly (Centre) et financée par l’ANR (contrat ANR Psy-sheep 11 PDOC 01601).

Parmi 120 brebis de race romane, 20 brebis actives (qui bêlaient et se déplaçaient le plus) et 20 passives (qui exprimaient le moins ces comportements) ont été sélectionnées. Pendant le dernier tiers de leur gestation, dix animaux de chacun des groupes ont été soumis à un stress quotidien et imprévisible (transport, manipulation, etc.), les dix autres servant de témoins. Les agneaux sont restés avec leur mère jusqu’à l’âge de deux mois, puis la moitié d’entre eux, dans chaque groupe, ont été élevés dans des conditions standard, et l’autre moitié dans un milieu enrichi. Leurs comportements ont été observés à un mois et quatre mois d’âge.

Les agneaux des brebis actives plus craintifs

Les agneaux nés de brebis stressées sont plus craintifs à un mois, et cet effet s’accentue à quatre mois. Ils sont en effet moins actifs en présence d’un homme inconnu (l’inhibition des comportements reflète la peur chez les moutons), fuient davantage devant un objet nouveau, immobile ou en mouvement, ou tentent de fuir lors d’isolement social. De plus, les agneaux nés des brebis les plus actives sont plus craintifs que ceux dont les mères ont un tempérament passif. Il semble que les bre­bis actives perçoivent plus négativement les événements stressants, et une partie du cortisol maternel pourrait traverser la barrière placentaire et affecter l’axe corticotrope du fœtus, donc son futur comportement face à une situation stressante. L’agneau pourrait également imiter les réactions de sa mère, ou être affecté par un comportement moins maternel.

Un effet du sexe est également noté, car les agneaux mâles sont moins stressés que les femelles. Cela est davantage observé à quatre mois qu’à un mois d’âge, peut-être en raison de l’effet anxiolytique des androgènes.

Une réactivité réduite avec un milieu enrichi

Enfin, les agneaux qui sont élevés dans des conditions enrichies (ajout de ballons et de brosses et signalement de la distribution alimentaire par un son une minute avant) sont moins craintifs que ceux élevés dans les conditions standard. Ils utilisent la brosse et le ballon et montrent des comportements d’anticipation de la distribution alimentaire en réaction au son.

Cet effet est moins marqué chez les agneaux nés de mères stressées. Toutefois, l’enrichissement des conditions d’élevage pourrait être une piste pour réduire les effets du stress prénatal sur la réactivité des agneaux, et pour améliorer la docilité et le bien-être des animaux. Des études complémentaires restent à mener pour déterminer si l’enrichissement du milieu dès la naissance des agneaux est susceptible de limiter les effets liés à un stress prénatal.

• 1 Coulon M., Mallet C., Levy F. et coll. Conséquences d’un stress durant la gestation des brebis sur le comportement de leurs agneaux et effets d’un enrichissement des conditions d’élevage postsevrage. Renc. Rech. Rum. 2013;20:205-208.