Bien préparer la mise bas d’une chienne - La Semaine Vétérinaire n° 1590 du 20/06/2014
La Semaine Vétérinaire n° 1590 du 20/06/2014

Formation

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Laurent Masson*, Alain Fontbonne**, Émilie Rosset***

Fonctions :
*diplomate ECAR, maître de conférences à l’ENVA
**diplomate ECAR, praticien hospitalier à VetAgro Sup

Pour le propriétaire d’une chienne gravide, le moment le plus angoissant est la mise bas. Or tout praticien dispose de moyens pour dater assez précisément le stade de la gestation au cours de son suivi, et prévoir ainsi le moment de la mise bas (ou de la césarienne programmée, notamment pour les races brachycéphales ou géantes).

La durée apparente de la gestation est de 57 à 72 jours. Néanmoins, quels que soient la taille et l’âge de la chienne, la durée réelle de la gestation est de 63 ± 2 jours à partir de l’ovulation dans 80 % des cas environ : à l’exclusion du mois de février, cela correspond à deux mois et deux jours. Elle est plutôt égale à 62 à 63 jours chez les chiennes de moins de 10 kg, versus 64 à 65 jours chez celles de plus de 40 kg. Lors de portée de moins de trois chiots, la gestation dure un peu plus longtemps.

ÉVALUER LA DATE DE LA MISE BAS

Plusieurs méthodes permettent de dater le jour de l’ovulation de manière plus ou moins précise, donc de prévoir la date de la mise bas ou de la césarienne programmée (voir encadré).

Le dosage d’hormone lutéinisante (LH) est théoriquement le meilleur examen, car l’ovulation a lieu 48 heures après le pic de LH. Il existe un kit1 prévu à cet effet.

Le dosage de la progestéronémie est la technique recommandée, car l’idéal est d’effectuer un suivi d’ovulation. La progestéronémie est basale en période préovulatoire. La mise bas a lieu 65 jours ± 2 jours après l’augmentation. En fin de gestation, une chute de la progestéronémie est recherchée par un ou deux dosages par jour. Hormis lors de portée très petite ou de mort fœtale, elle est observée dans les 12 à 24 heures avant la mise bas (48 heures avant au maximum).

À l’échographie, l’ovulation est détectée en présence de liquide autour de l’ovaire. En période périovulatoire, un examen quotidien et un opérateur expérimenté sont requis.

Le frottis vaginal est peu précis : la mise bas intervient 57 jours après la réapparition des cellules nucléées, mais cette méthode conduit souvent à des erreurs de datation. La sonde Ovulstart®, qui mesure la résistivité du mucus vaginal, n’est validée que chez la chienne beagle.

En l’absence de datation de l’ovulation, un examen est réalisé dès 21 à 25 jours après la saillie, à la recherche des vésicules embryonnaires, dont la palpation devient difficile entre 35 et 45 jours. La relaxine permet de confirmer la gestation, mais pas de la dater.

SUIVI DE LA MISE BAS

Il importe d’estimer le moment de la mise bas, de reconnaître ses différentes étapes et d’identifier une dystocie pour les expliquer simplement au client.

La mise bas est divisée classiquement en trois phases.

Les prodromes : la chienne est inquiète (grattage du sol, etc.). Un basculement du bassin se produit, ainsi qu’un écoulement de la glaire cervicale (fonte du bouchon muqueux, 24 à 36 heures avant). Le propriétaire, qui connaît son animal, joue alors un rôle important. Ces signes révèlent que la mise bas est proche, mais pas forcément imminente ou en cours. La montée de lait peut ainsi apparaître jusqu’à une semaine avant. Néanmoins, il est difficile de renvoyer les propriétaires chez eux sans réaliser des examens complémentaires. Enfin, le suivi de la température n’est pas fiable à 100 %, car il dépend de la chute de la progestéronémie. Cette dernière évolue en paliers, et peut être absente lors de chiot unique ou de mort. Elle s’observe la veille de la mise bas, à condition de prendre la température quatre ou cinq fois par jour, et est plus nette chez les petites races que chez les grandes.

La phase d’expulsion des chiots se caractérise par des contractions abdominales intenses, en décubitus latéral, avec un temps moyen de 30 minutes entre deux chiots. La chienne peut cependant se reposer plusieurs heures lors de portée nombreuse.

La délivrance et l’expulsion des placentas interviennent dans un délai de 15 minutes. Il convient de ne pas laisser la chienne manger plus de deux placentas (risque de diarrhée).

QUAND VENIR EN CONSULTATION

Le propriétaire doit consulter son vétérinaire dans les cas suivants :

> Une absence de travail malgré une baisse de température ou un dépassement de la date prévue, et de toute manière à 64 jours après l’ovulation (pour une échographie et un dosage de progestérone).

> Une expulsion débutée depuis quatre heures sans délivrance.

> 30 minutes de contraction utérine intense sans expulsion.

> Une dernière expulsion il y a plus de deux heures. La durée d’expulsion est plus longue pour le premier chiot et lors de présentation postérieure (40 % des cas). Une mise bas sur plusieurs jours avec des chatons viables est parfois observée chez la chatte, mais il s’agit d’une exception rarissime.

> Une hémorragie ou l’observation d’un liquide verdâtre (utéroverdine) sans expulsion d’un chiot dans les 30 minutes. Chez la chatte, il n’y a pas d’utéroverdine (le placenta est entouré d’un liquide rouge) ;

> Un chiot engagé depuis plus de 15 minutes.

> Une chienne tremblotante, épuisée ou douloureuse, qui présente une baisse de l’état général.

ASSISTANCE MÉDICAMENTEUSE À LA MISE BAS

Une dystocie apparaît dans 5 % des gestations environ. La cause la plus fréquente est l’inertie utérine (primaire ou secondaire), largement devant les disproportions materno-fœtales. L’inertie se traduit par une absence de contractions, soit par épuisement après l’expulsion de plusieurs chiots, soit lors de prédisposition raciale (boxer, par exemple), de stress ou d’obésité. Elle peut être prise en charge au domicile des propriétaires en leur prescrivant du gluconate de calcium. Une ampoule entre chaque chiot, administrée per os, potentialise les contractions utérines, même avec une calcémie normale. Son utilisation est possible chez la chatte, mais les données disponibles sont peu nombreuses.

L’utilisation d’ocytocine est, en revanche, dangereuse : il faut que la chienne soit à terme, que le taux de progestérone soit bas et surtout le col ouvert. Elle n’est recommandée que si un chiot est engagé, en raison du risque de rupture utérine. Elle augmente les risques de mortalité fœtale, d’hypotension et de vasodilatation chez la mère. Toutefois, elle se révèle fort utile en fin de mise bas à la dose de 0,25 UI/kg pour favoriser la résorption utérine, et stimuler le comportement maternel et la montée de lait. Son efficacité diminue dans les heures qui suivent la mise bas.

SOINS PÉRINATAUX

Les soins aux nouveau-nés sont importants. Il convient de ne pas tirer sur le cordon ombilical, de dégager les voies respiratoires, de sécher le chiot, de lui faire boire le colostrum dans les huit premières heures. La température du nid doit atteindre 31 °C la première semaine (chiot hétérotherme au cours du premier mois), grâce à un tapis chauffant ou à une lampe infrarouge. Ce type d’équipement est à conseiller aux éleveurs amateurs, y compris pour une mise bas prévue en été. La température rectale du chiot ne doit pas être inférieure à 35 °C, sous peine de perte du réflexe de succion. Le poids de naissance est susceptible de baisser les premiers jours, mais doit doubler au cours des deux premières semaines et avoir quadruplé au bout d’un mois. Il ne faut pas hésiter à biberonner (à raison de 5 % du poids corporel, quatre à six fois par jour). Lors de fatigue de la chienne, notamment après une césarienne, il convient de stimuler également la miction et la défécation des chiots.

  • 1 Laboratoire Zoetis.

PROTOCOLE DE CÉSARIENNE PROGRAMMÉE1

> Détermination du jour d’ovulation (J0), où la progestéronémie est autour de 6 ng/ml.

> Consultation à J60 : si la progestéronémie est inférieure ou égale à 2 à 3 ng/ml, la césarienne est effectuée le jour même.

> Sinon, une injection d’Alizine® (15 mg/kg par voie sous-cutanée) à J60 et une hystérotomie à J61 sont pratiquées.

1 Utilisé au centre de reproduction des carnivores de Maisons-Alfort.

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