« Le vétérinaire rural un peu baroudeur n’est plus l’image unique »

Lorsque le président de la Société des vétérinaires suisses a salué les étudiants débutants à Berne et à Zürich, il n’a vu pratiquement que des femmes dans l’auditoire ! Il m’a alors demandé de conduire une étude sur cette féminisation. Selon le rapport annuel 2012 de cette organisation professionnelle, les femmes représentent 49 % des 2 787 vétérinaires qui exercent en Suisse, mais le découpage par tranches d’âge est éloquent : elles représentent 87 % des moins de 30 ans, 54 % des 30-40 ans et des 41-50 ans, versus 33 % seulement des 51-60 ans.

Actuellement, 80 % des nouveaux étudiants dans l’une des deux facultés du pays sont des étudiantes. L’examen des statuts d’emploi révèle que les femmes sont majoritaires parmi les praticiens assistants, les praticiens salariés (71 %), les chômeurs ou les sans-activité-professionnelle. Sur les 703 vétérinaires qui exercent en libéral et propriétaires de leur cabinet, 35 % sont des femmes, ce qui est une proportion en augmentation. Cependant, il convient de signaler qu’elles ne bénéficient pas de l’aide d’un conjoint non-vétérinaire, ce qui a longtemps été le cas des vétérinaires hommes. Enfin, les hommes restent majoritaires dans toutes les spécialités. Par ailleurs, les femmes travaillent proportionnellement davantage avec les petits animaux et les chevaux. Pourquoi ? L’impression que les étudiantes retirent de leur stage de fin d’étude en rurale semble primordiale. Celles qui renoncent à s’orienter dans cette direction le décrivent un peu comme une épreuve initiatique très difficile, où elles se sont senties testées ou placées dans des situations compliquées. Toutefois, d’autres facteurs, tels que le rapport d’origine avec le milieu agricole, la date de mise en couple ou d’arrivée des enfants, influencent aussi certainement ces choix d’orientation. De plus, la canine est un secteur dont l’attractivité tant économique que technique augmente. Il n’y a plus d’image unique de la profession valorisée d’un vétérinaire rural un peu baroudeur.

Cela pose-t-il problème ? Démographiquement, comme davantage de professionnels partent à la retraite en campagne, c’est là qu’il semble y avoir le plus de postes libres, parfois difficiles à pourvoir. Même les vétérinaires masculins ne s’orientent plus actuellement vers la rurale en majorité. En Suisse, ils se tournent plutôt vers la pratique mixte, surtout lorsqu’ils forment un couple avec un autre praticien. Si la profession change, la féminisation n’est que l’une des causes de cette transformation. Cette dernière est à replacer dans un contexte d’évolution plus globale de la profession vétérinaire d’une part, d’autres métiers d’autre part (notamment les agriculteurs), et globalement de la société.