Notre père tout-puissant

Par conviction, Xavier Fortin et sa famille suivaient un mode de vie marginal, hors du système. Quand en 1998, sa compagne se lasse de cette existence et se sépare, elle obtient la garde des enfants. Refusant cette décision de justice, Fortin reprend ses deux garçons et s’évanouit dans la nature. Assurant lui-même leur éducation, il parviendra à les maintenir dans la clandestinité durant onze ans, jusqu’à son arrestation en 2009.

Ce fait divers inspire ici Cédric Kahn, qui met de côté le sentimentalisme, refuse également de prendre parti pour l’un ou l’autre des parents et est concerné plutôt par le point de vue des enfants et la question de leur liberté dans cette situation. Le réalisateur exploite le potentiel narratif tendu de cette singulière cavale et confronte les deux premières années, aventureuses et heureuses aux yeux des enfants (6 et 7 ans), à la dernière, quand, adolescents, ils commencent à contester l’autorité du père.

Mais, en dépit du regard respectueux sur les personnages, de l’excellence de l’interprétation et d’un penchant marqué pour les acmés dramatiques, la réalisation reste à la surface de la réalité qu’elle décrit (la nature et les animaux ne sont ici qu’un décor). Ne nous ouvrant pas suffisamment à l’intimité de cette vie « sauvage », elle n’ébranle pas vraiment nos esprits domestiqués.

• Vie sauvage de Cédric Kahn, avec Mathieu Kassovitz, Céline Salette, 1h46, en salles le 29 octobre 2014.