Interaction entre le niveau de biosécurité et la consommation d’antibiotiques

L’incidence médiane¹ des traitements antibiotiques chez les reproducteurs et les porcelets en post­sevrage est significativement plus faible dans les élevages avec un bon niveau de bio­sécurité externe (prévention de l’introduction d’agents pathogènes dans l’élevage), de même que celle des porcelets en maternité dans le cas d’un bon niveau de biosécurité interne (prévention de la propagation d’agents pathogènes au sein de l’élevage). Ces résultats sont issus d’une étude menée entre mai et août 2013².

POSTSEVRAGE : PREMIER STADE POUR L’UTILISATION DES ANTIBIOTIQUES

L’étude a été conduite dans 60 élevages naisseurs-engraisseurs du Grand Ouest de la France, tirés au sort dans les bases GTE/GTTT (gestion technico-économique/gestion technique des troupeaux de truies) parmi ceux qui possèdent au moins 100 truies et qui engraissent 500 porcelets au minimum. Un questionnaire a été envoyé aux éleveurs afin de connaître leur perception des antibiotiques. Un même enquêteur a ensuite visité cha­que exploitation pour récupérer le document et en remplir un second avec l’éleveur sur les usages antibiotiques et les pratiques d’élevage relatives à la biosécurité externe et interne. L’étude révèle que les porcelets en postsevrage reçoivent la plus grande partie des traitements antibiotiques (27 % d’entre eux en moyenne prennent une dose journalière d’antibiotiques au cours du postsevrage), avec une forte variabilité des usages entre les élevages. La consommation en postsevrage est répartie principalement en trois familles : les polypeptides, les tétracyclines et les macrolides. Ils sont loin devant les porcelets en maternité (traités en majorité par les ß-lactamines et les macrolides), puis viennent les reproducteurs (truies, cochettes et verrats, traités pour 66 % avec des tétracyclines) et enfin les porcs charcutiers (macrolides et tétracyclines essentiellement). Les quinolones sont très peu employées dans chacun des groupes.

IMPORTANCE DE LA BIOSÉCURITÉ

Les incidences de traitement comparées à des scores de pratiques de biosécurité révèlent que, chez les porcelets en postsevrage, cette incidence est significativement plus faible dans les élevages qui présentent un score élevé de biosécurité externe, notamment lors de bonne gestion du « transport des animaux et d’élimination du lisier et d’animaux morts ».

Les incidences de traitements ne différaient pas significativement entre les groupes de haut et bas niveaux de biosécurité pour le contrôle des oiseaux et des rongeurs, l’approvisionnement en eau, l’alimentation et le matériel, les visiteurs et l’achat de semence ou d’animaux.

La gestion du transport et de l’élimination influe également sur l’incidence de traitement des reproducteurs, mais ce sont essentiellement « l’environnement et la région d’élevage » qui semblent avoir un impact pour cette catégorie. En maternité, la gestion de la biosécurité interne dans sa globalité a une influence significative : nettoyage et désinfection, utilisation du matériel, gestion des périodes de mise bas et d’allaitement, du postsevrage et de l’engraissement, et prise en charge des maladies.

RENTABILITÉ POUR LES ÉLEVEURS

L’enquête psychosociologique révèle que les éleveurs de porcs perçoivent des bénéfices élevés à utiliser des antibiotiques (les animaux guérissent rapidement et la mortalité est nettement réduite, selon leurs réponses), alors que les besoins perçus sont plutôt faibles. Parmi les mesures possibles qui leur sont proposées pour réduire l’usage des antibiotiques, la formule « Les vétérinaires peuvent seulement prescrire des traitements mais ne peuvent pas les vendre » obtient un score plus faible que celles qui impliquent directement l’éleveur ou le pénalisent financièrement : « Les éleveurs sont surveillés et si leur consommation est trop élevée, ils doivent prendre des mesures pour la réduire » et, surtout, « Si une consommation trop élevée d’antibiotiques est détectée, la rémunération de l’éleveur est réduite ».

Dans tous les cas, les exploitants perçoivent que les mesures qui ont un impact financier sur leur élevage sont fortement susceptibles d’influencer leur utilisation d’antibiotiques.

Cette étude conforte ainsi que la biosécurité joue un rôle en faveur de la réduction des usages des antibiotiques. Des analyses supplémentaires sont né­cessaires afin de décrire de façon qualitative le lien entre les pratiques mises en œuvre dans chaque élevage et l’usage d’antibiotiques.

• 1 L’incidence de traitement représente le nombre d’animaux pour 1 000 recevant une dose journalière d’antibiotiques au cours de la période à risque d’être traitée.

• 2 Collineau L., Belloc C., Hemonic A. et coll. Étude du lien entre niveau de biosécurité et utilisation d’antibiotiques dans les élevages de porcs. Proceedings JRP. 2014;46:141-146.