Les herbivores d’élevage face à l’homme

Xavier Boivin, chercheur au sein de l’UMR Inra-VetAgro Sup, s’intéresse, pour ses travaux, aux réponses des herbivores d’élevage face à l’homme.

« Être traité comme du bétail, est-ce que cela veut toujours dire la même chose ? Et la différence entre un animal de rente et l’homme est-elle toujours aussi marquée ? », interroge notre confrère Michel Baussier, président de l’Ordre.

En élevage, il y a de multiples occasions d’interactions entre l’homme et l’animal. Qu’est l’animal aux yeux de l’éleveur ? Selon Xavier Boivin, les études peuvent faire ressortir différentes conceptions : l’animal compagnon de travail (Lamine 2006), une relation professionnelle (Kling 2003, Porcher 2010). « Pour certains, c’est un animal instrumentalisé (une machine biologique), pour d’autres un animal communiquant ou encore un animal affectif. Il existe donc différentes visions du métier, différents niveaux d’intérêt », explique le chercheur.

« L’animal nous regarde autant qu’on le regarde » Au cours de ses recherches, Xavier Boivin essaye de sa­voir comment l’animal perçoit l’éleveur.

La relation en éthologie se construit à partir d’interactions régulières entre deux individus. La connaissance de la relation permet de prédire l’issue des futures émotions. « La relation prend un aspect factuel, car il y a des éléments que l’on peut prédire, poursuit-il. La peur ou la réaction des animaux vis-à-vis de l’homme est quelque chose d’appris à travers ces interactions. Cela a des conséquences en termes de bien-être et de productivité ».

Les croyances comportementales sont aussi importantes : « Si je crois à l’effet de mon comportement, j’ai plus de chance d’adopter ce comportement. Si je pense que caresser un animal a un effet bénéfique, je le ferai. Si je pense que caresser est anthropomorphique, je ne vais pas le caresser ». Un des enjeux est donc aussi de déconstruire ces croyances.

Notre confrère Béatrice Laffitte (T 93) a produit des travaux sur le sujet. Elle a observé des différences entre les élevages dont les propriétaires estiment avoir beaucoup de contacts avec leurs animaux dès le jeune âge et ceux où ce rapport existe peu ou pas.

La manière d’agira des conséquences

La distance de fuite se construit dès le jeune âge ou au sevrage. L’observateur extérieur voit l’importance de la présence de l’homme familier pendant la palpation rectale des vaches laitières par exemple : les animaux positivement manipulés montrent lors de cette activité une fréquence cardiaque moindre.

Si les mères ont un mauvais comportement vis-à-vis de l’homme, le veau va recevoir cet apprentissage. « C’est donc un cercle qui peut être vicieux ou vertueux ».

Dans les pratiques relationnelles, il existe des stratégies visant à améliorer le travail avec l’animal et à diminuer son stress. « Le défi de la transdisciplinarité est de traiter les perspectives humaines et animales de façon équivalente dans les esprits scientifiques, conclut Xavier Boivin. Dans les pratiques relationnelles, humains et animaux doivent être envisagés comme des partenaires de la relation ».