Formation
ANIMAUX DE COMPAGNIE
Auteur(s) : Thomas Brément
Cet article vise à faire le point sur le syndrome d’hypersensibilité-hyperactivité (HS-HA) du chien en insistant sur les aspects épidémiologiques et cliniques. Il s’appuie en particulier sur les résultats d’une étude menée à Nantes entre 2009 et 20121.
Le syndrome d’hypersensibilité-hyperactivité est un trouble qui apparaît dès les premiers mois de la vie du chien. Il est la conséquence d’un mauvais développement des voies neuronales responsables de l’apprentissage, de la mémorisation et du contrôle de l’activité motrice (hyperactivité, voie dopaminergique en particulier) et d’un dysfonctionnement des voies impliquées dans la régulation de la transmission des informations sensorielles (hypersensibilité, voie noradrénergique principalement), tandis que le chiot évolue dans un milieu hypostimulant en l’absence d’un adulte régulateur compétent.
Le syndrome HS-HA concerne plus de 30 % des animaux présentés en consultation de comportement. Les principaux motifs de consultation sont l’agressivité (30 % des cas), les destructions, une hyperactivité motrice et des vocalises.
Le syndrome HS-HA affecte davantage les chiens de moins de 1 an. Si aucune race ne semble statistiquement prédisposée, celles de type retriever (labrador et golden) apparaissent surreprésentées. En revanche, les conditions d’acquisition sont corrélées à l’apparition du syndrome. Ainsi, indépendamment de l’âge d’acquisition, les animaux acquis chez des particuliers sont statistiquement plus touchés. Ce phénomène peut s’expliquer par une adoption précoce des chiots ou par un interventionnisme excessif de la part des propriétaires entre la mère et ses chiots, qui empêchent l’apprentissage des autocontrôles (la morsure, en particulier).
De plus, contrairement à ceux des élevages professionnels, les chiots acquis chez des particuliers naissent, pour la plupart, d’une mère primipare, incompétente voire immature, ou elle-même atteinte d’un trouble du comportement qui altère ses capacités d’éducation. Enfin, les races de type labrador sont naturellement plus tolérantes à la douleur, y compris à la morsure des chiots, qui entraîne normalement une réprimande à l’origine de l’acquisition du contrôle de celle-ci.
→ La sémiologie du syndrome HS-HA est variée et il importe d’explorer de façon exhaustive les signes associés à un développement comportemental anormal, les comportements centripètes, centrifuges et mixtes (voir encadré). Une dizaine de signes cliniques fréquemment décrits peuvent être répertoriés (voir tableau).
→ Le diagnostic différentiel s’établit principalement avec les autres troubles du développement (syndrome de privation, dyssocialisation primaire), les sociopathies et les états d’hyperattachement.
→ Le syndrome HS-HA peut être associé à de nombreuses affections comportementales (voir graphique). Ainsi, les troubles de l’apprentissage sont fréquents en raison du déficit d’attention et de mémorisation. Le syndrome HS-HA peut être à l’origine d’un état émotionnel incompatible avec une émission et/ou une réception efficace des signaux de communication avec l’homme ou d’autres congénères, ou de l’octroi de prérogatives à un animal insistant et fatigant auquel les propriétaires cèdent (présentes chez 61,3 % des individus). Cette situation fait le lit de troubles de la communication (20 % des cas) et des sociopathies. De par leur étroite liaison aux conditions de développement, les troubles phobiques (phobie sociale, syndrome de privation) sont également fréquemment associés. L’évolution peut aussi se faire vers un hyperattachement ou une hyperagressivité secondaire, qui devient rapidement dangereuse (absence de contrôle de la morsure).
La maladie étant rarement spontanément réversible, le traitement associe une thérapie comportementale et une autre médicale. L’efficacité de la prise en charge dépend principalement de l’âge auquel elle intervient (meilleure avant la puberté).
Le tableau clinique sert de référence pour choisir le psychotrope le plus adapté, car il permet de déterminer les neurotransmetteurs majoritairement impliqués. Le traitement médical permet de favoriser le contrôle de l’activité motrice et le retour à un état d’équilibre émotionnel. Les molécules habituellement indiquées sont :
→ la sélégiline (chez le chiot ou en l’absence de troubles du sommeil et de la satiété, 0,5 mg/kg/j en une prise) ;
→ la fluoxétine (lors de stéréotypies, de troubles obsessionnels compulsifs, d’impulsivité, de troubles hiérarchiques, 2 à 4 mg/kg/j en une prise) ;
→ la fluvoxamine (lors de stéréotypies, de troubles obsessionnels compulsifs, d’impulsivité, de troubles hiérarchiques, 2 à 5 mg/kg/j en deux prises) ;
→ la clomipramine (lors de troubles du sommeil ou de stéréotypies, d’impulsivité, de troubles hiérarchiques, 2 à 4 mg/kg/j en une prise).
Le recours à l’alpha-casozépine est déconseillé.
Un “blanc” thérapeutique de 15 jours est respecté entre le sevrage et la mise en place d’un autre traitement agissant sur la sérotonine.
La thérapie comportementale est instaurée après que l’activité motrice du chien et son homéostasie sensorielle sont régulées (soit un délai de 3 à 4 semaines). Elle fait appel à la thérapie par le jeu, qui vise à enseigner à l’animal à contrôler son activité motrice et l’intensité de la morsure, et à des techniques issues de la régression sociale dirigée destinées à enseigner au chien l’inhibition sociale. Le traitement est long (plusieurs mois, voire des années) et une bonne alliance avec le client est indispensable.
La prévention repose sur l’optimisation des conditions d’élevage. Il convient de veiller à ce que ces dernières soient suffisamment stimulantes, à écarter de la reproduction des mères trop jeunes ou elles-mêmes atteintes du syndrome HS-HA, à avoir un nombre d’adultes régulateurs compétents suffisant pour la taille de la portée, à éviter la séparation trop précoce et le choix du chiot le plus turbulent.
1 Brément T. « Dominantes pathologiques en psychiatrie vétérinaire canine : étude bibliographique et rétrospective menée à Nantes entre 2009 et 2012 (229 cas) ». Th. Méd. Vét. Nantes. 2014;228.
Développement comportemental :
→ Lieu et mode d’élevage hypostimulants.
→ Incompétence maternelle (primipare, mère HS-HA, taille de la portée trop importante) ou séparation précoce de la mère (avant 8 semaines).
→ Apprentissages tardifs et acquisition difficile sur le long terme, obéissance aléatoire.
Comportements centripètes :
→ Déficit ou absence de satiété alimentaire.
→ Dyspepsie, jeux autour de l’écuelle.
→ Stéréotypies (tournis), troubles obsessionnels compulsifs.
→ Malpropreté urinaire et/ou fécale, lieux d’élimination aléatoires.
→ Hyposomnie (moins de 8 heures par nycthémère).
Comportements centrifuges :
→ Comportement exploratoire exacerbé et non contrôlé : hypersensibilité à tout stimulus, hypervigilance, hyperactivité motrice, déficit des autocontrôles (l’intensité de la morsure, en particulier), conduites infantiles, destructions spectaculaires, etc.
→ Absence de signal d’arrêt dans le jeu, chien monotâche.
→ Agressions rares chez le chiot mais communes chez l’adulte par irritation, avec un risque d’instrumentalisation rapide.
→ Qualités relationnelles et de communication avec le propriétaire altérées.
Comportements mixtes :
→ Chevauchements possibles sans caractère sexuel.
→ Altération des compétences maternelles.
Remarque : tous les signes cliniques ne sont pas nécessairement présents chez un même chien.
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