La gestion des plaies : utilisation raisonnée des dressings

La bonne gestion des plaies des équidés est essentielle pour favoriser une cicatrisation rapide. Les premières étapes en sont cruciales dans cette espèce délicate. En effet, la première phase de la cicatrisation chez le cheval se caractérise par une inflammation qui n’est pas très marquée. Dans la phase de réparation, une tendance à l’hypergranulation est observée et les plaies distales cicatrisent mal. Enfin, l’évolution est très lente lors de la maturation.

Selon le type de plaie, la cicatrisation n’intervient qu’en seconde intention. Dans ce cadre, l’emploi de compresses et de topiques adaptés est utile. Les pansements feront l’objet d’un article ultérieur.

PHASE DE DÉTERSION

La détersion des plaies, cet acte de soins essentiel de la première étape, est avant tout mécanique sous bonne pression. Les compresses appliquées visent pour la plupart à améliorer la détersion, par un effet antibactérien qui prévient la contamination. De plus, elles absorbent les exsudats, favorisent l’hydratation, stimulent l’épithélialisation, etc.

Il convient de changer les pansements fréquemment.

• Le pansement wet to dry consiste à appliquer un pansement humide au contact de la plaie, ce qui induit, par capillarité, un appel des matières vers les compresses sèches, continuant ainsi la phase de détersion. Le retrait de ce dispositif enlève toute la surface de la blessure. En termes de décontamination, le procédé est efficace dans les premières 24 heures. Dans tous les cas, son utilisation ne doit pas se prolonger au-delà de 72 heures car il soustrait aussi les fibroblastes.

• Le chlorure de sodium (NaCl) hypertonique à 20 % présente une action osmotique bénéfique. Cependant, s’il est toxique pour les bactéries, il l’est aussi pour les fibroblastes. Son emploi, utile pendant la phase de détersion, ne doit donc pas être poursuivi. Ce procédé fonctionne bien pour stimuler les plaies atones.

• Le pansement au chlorure de diakyl-carbamoyle (Sorbact®) absorbe les bactéries et permet l’hydratation des plaies nécrotiques sèches (compresses imprégnées de gel).

• Les gels, comme tous les produits qui hydratent la plaie, sont recommandés.

• Le miel est très intéressant. Celui de Manuka contient une enzyme, l’unique Manuka factor (UMF), désignant l’action antibactérienne spécifique de cette substance. D’autres miels fonctionnent, comme celui à base de thym. Il convient de s’assurer de la qualité du produit (pureté et absence de contamination). Attention, néanmoins, car le miel stimule la granulation.

• Les acides benzoïque, malique et salicylique présents dans Dermaflon® sont efficaces en détersion. Cependant, cette pommade n’a pas d’action cicatrisante dans les autres phases. Elle crée un pH acide, favorable à la détersion, mais ce n’est pas le topique optimal pour la suite de la cicatrisation.

• La kétansérine (Vulketan®) améliore aussi la réponse inflammatoire, en stimulant la réponse des macrophages, et son administration est donc bénéfique dès le début de la cicatrisation. Elle présente un intérêt potentiel en phase inflammatoire lorsque la détersion macroscopique est achevée.

• La larvothérapie marche très bien et gagnerait à être davantage utilisée, comme c’est le cas en médecine humaine. Grâce à leurs enzymes, les asticots digèrent le tissu nécrotique de la plaie, et seulement lui… C’est l’atout premier de cette technique. Les larves “mangent” le biofilm (sécrétion où se logent les bactéries, que les antibiotiques atteignent difficilement).

Biomonde est le laboratoire qui commercialise ces larves en Europe. Le système de commande est précis. Il s’agit d’une procédure d’autorisation temporaire d’utilisation (ATU) nominative qui ne concerne que les formes enfermées des larves, sous pansement.

PHASE DE RÉPARATION

Lors de cette étape, il convient d’obtenir une stimulation de la granulation, sans excès cependant, et de contrôler l’infection. Il est possible d’hydrater la plaie. Pour ce faire, tout ce qui est hydrogel est bénéfique.

• La compresse Curafil® est imprégnée de gel (eau purifiée, glycérine et polymère). Elle est indiquée lors de plaies sèches ou peu humides, ou hémorragi ques, de brûlures des premier et deuxième degrés, d’abrasions et d’escarres.

• Les compresses à base d’alginates sont composées de fibres tissées qui contiennent du calcium. Elles sont antihémorragiques et absorbent les exsudats. Elles ne présentent aucun intérêt sur un tissu de granulation sain. Elles sont utilisées en fin de phases de détersion et de granulation.

La granulation en est stimulée, et la vigilance est donc de mise. Ce procédé est efficace sur les escarres de poulains.

• Le pansement hydrocolloïde Algoplaque peut être intéressant en cas de plaie cavitaire.

• D’autres compresses sont disponibles sur le marché. Le polyhexaméthylène biguanide (PHMB) est un agent antibactérien d’intérêt en phase de granulation pour prévenir la recontamination (par exemple, application sur les greffes de peau).

• La mousse semi-occlusive et hydrophile est performante, surtout si un peu d’exsudat subsiste, en raison d’une bonne absorption.

PHASE DE MATURATION

Pour la fin de la cicatrisation, la protection est privilégiée. Il convient de contrôler le tissu de granulation et de prévenir l’inflammation chronique, qui est le facteur de l’hypergranulation.

• Les gazes imprégnées (paraffine ou vaseline) sont recommandées. Celles qui contiennent de la paraffine auraient une action antalgique. Ce type de compres ses est surtout réservé aux lacérations superficielles.

• Les films adhésifs sont semi-perméables, adhésifs et transparents. Ils conservent un milieu humide et limitent la pénétration bactérienne.

• Des compresses antiadhésives existent. Sur les plaies suturées, leur capacité d’absorption est variable.

• L’hypergranulation pose problème quand une inflammation trop importante est présente au niveau de la plaie. Vulketan® sous une forme topique présente l’avantage de pouvoir être appliqué sans bandage. Cette spécialité comporte de la kétansérine qui permet également de contrôler l’infection. Vulketan® est un gel stérile qui agit sur la microcirculation. Il prévient le développement du tissu d’hypergranulation et stimule la prolifération des fibroblastes.

• Cica-Care® en silicone est un pansement inerte qui peut aussi être utilisé dans le cadre de la cicatrisation. Il est efficace sur les plaies à risque de granulation ou après le parage d’un tissu de granulation.

• Les substances caustiques sont à proscrire car elles détruisent les fibroblastes.

• Le “triple antibiotic ointment” (à base de néomycine, de polymyxine et de bacitracine) est décrit. Dans certains cas, des pommades intramammaires peuvent être employées, en remplacement de l’utilisation systémique de ce médicament.

• L’activité de la sulfadiazine d’argent 1 % sur l’épithélialisation est controversée.

• L’acide fusidique est prescrit en pratique canine, mais, à ce jour, aucune étude ne précise son utilisation chez le cheval.