Françoise Grossetête dévoile son projet de rapport - La Semaine Vétérinaire n° 1629 du 09/05/2015
La Semaine Vétérinaire n° 1629 du 09/05/2015

RÈGLEMENT EUROPÉEN DU MÉDICAMENT VÉTÉRINAIRE

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ÉVÉNEMENT

Auteur(s) : Marine Neveux

Françoise Grossetête, eurodéputée, est rapporteure du dossier sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux médicaments vétérinaires. Ce règlement européen fera date pour le médicament vétérinaire. Le rapport a été remis à la commission de l’environnement (Envi) le 13 avril dernier. Interview avec son auteur.

Quels sont les trois axes majeurs d’évolution et les principaux défis que vous retenez de votre rapport ?

Premièrement, les dispositions visant à renforcer la lutte contre l’antibiorésistance, qui me paraissent absolument cruciales. La Commission européenne a fait un certain nombre de propositions en la matière mais il est nécessaire d’aller beaucoup plus loin. Je propose notamment d’interdire l’usage prophylactique des antibiotiques, de préciser l’article 107 sur la prescription et la vente, d’encourager la recherche dans le domaine de l’antibiothérapie, ou encore d’introduire une notion de réciprocité afin que les normes qui s’appliquent aux antimicrobiens en Europe s’appliquent aussi à la viande importée pour la consommation. Deuxièmement, les mesures visant à encourager la recherche et l’innovation (l’extension de la période de protection des données, par exemple), sans lesquelles nous ne parviendrons pas à améliorer la disponibilité des médicaments vétérinaires. Enfin, en ce qui concerne la pharmacovigilance, il nous faut en partie revenir sur la nouvelle approche de la Commission, basée uniquement sur la détection des risques. Un système hybride s’appuyant à la fois sur la soumission régulière de rapports périodiques de pharmacovigilance dans les toutes premières années de vie du produit, et seulement ensuite sur l’analyse de risques et la détection de signaux, me paraît plus adapté pour protéger la santé publique.

Le 5 février dernier, lors d’une table ronde organisée à Saint-Étienne, vous avez déclaré que vous n’iriez pas « jusqu’à prôner le découplage entre la prescription et la vente d’antibiotiques par les vétérinaires, même si certains eurodéputés y tiennent ». La menace d’un découplage vous paraît-elle toujours présente, même si le système français est reconnu comme l’un des meilleurs et que le couplage a justement montré sa pertinence ?

Nombre de mes collègues, notamment ceux des pays du Nord, estiment que l’autorisation des vétérinaires à prescrire et à délivrer des médicaments pose un problème éthique majeur. Il ne fait donc aucun doute que le découplage sera abordé dans les débats et les amendements. Cependant, comme je l’avais développé à Saint-Étienne, je ne crois pas que nous devrions aller jusque-là. En France, par exemple, le découplage poserait des problèmes pratiques importants. Pour ma part, j’ai simplement souhaité préciser l’article 107, concernant la prescription et la délivrance par les vétérinaires, en mentionnant le fait que les vétérinaires ne doivent être autorisés à délivrer des médicaments que dans les quantités nécessaires pour le traitement, seulement pour les animaux qu’ils soignent, et seulement après qu’un diagnostic vétérinaire a été posé à la suite d’un examen clinique de l’animal ou, dans des cas exceptionnels, d’un simple suivi sanitaire permanent de ce dernier.

L’établissement de la liste d’antibiotiques critiques doit aussi être précisé. Qu’en est-il à ce jour ?

La Commission européenne a en effet proposé dans son projet de règlement que certains antibiotiques, d’importance critique, soient réservés à la médecine humaine. C’est une proposition que je soutiens. Reste maintenant à définir les critères qui permettront d’établir cette liste. La Commission prévoit de le faire via des actes délégués, et non pas dans le corps du texte, ce que j’approuve également, car cette liste doit être établie sur une base scientifique solide et non après un débat politique. Dans mon rapport, je demande ainsi à la Commission de fonder la création de cette liste sur les recommandations qui lui ont été faites par l’Agence européenne des médicaments, notamment dans ses réponses aux questions de la Commission à ce sujet, publiées le 18 décembre dernier.

La proposition de règlement aborde les aliments médicamenteux pour animaux et la nécessité de définir des notions d’usage prophylactique et métaphylactique des antibiotiques. Prônez-vous l’interdiction de l’usage prophylactique pur ? Ou du moins une réglementation sévère ? Laquelle ?

Je pense en effet qu’il importe de maintenir une cohérence entre le texte sur les aliments médicamenteux et celui sur les médicaments vétérinaires. L’usage des antibiotiques pour améliorer les capacités des animaux est déjà strictement interdit par les textes européens. Mais il est nécessaire d’aller encore au-delà. Dans mon rapport, je propose donc une définition d’un traitement prophylactique, puis une interdiction stricte de l’usage prophylactique des antibiotiques, sauf s’il existe un sérieux risque d’infection pour l’animal (dans le cas d’une opération, par exemple). L’usage des antibiotiques à titre préventif ne doit en aucun cas venir compenser le respect des règles sanitaires et des bonnes pratiques d’élevage !

Dans un contexte d’utilisation raisonnée des antibiotiques, la vente en ligne des médicaments génère une grande inquiétude. Partagez-vous ces craintes ? Quelles sont les garanties de sécurisation nécessaires dans le règlement européen ? Ne peut-on pas redouter des difficultés pratiques à réaliser des contrôles efficaces ?

Je partage entièrement ces craintes concernant la vente en ligne d’antibiotiques et de médicaments vétérinaires disponibles uniquement sur ordonnance. En effet, la vente en ligne facilite les fraudes et la contrefaçon et complique la traçabilité des produits, pourtant cruciale en matière de vente d’antibiotiques. Dans sa proposition, la Commission européenne a souhaité mettre en place un certain nombre de barrières pour diminuer les risques (la création d’un label européen identifiant les sites « sûrs », par exemple), mais je pense que cela n’est pas suffisant, tout simplement parce que, comme vous le soulignez, il est quasiment impossible de réaliser des contrôles efficaces. ma position est donc claire : je souhaite interdire la vente en ligne de médicaments vétérinaires sur ordonnance. c’est l’une des lignes rouges de mon rapport et je suis déterminée à faire adopter cette position. je crois pouvoir compter en cela sur le soutien de mes collègues de différents partis.

Lire aussi « Les enjeux du médicament en Europe », paru dans La Semaine Vétérinaire n° 1618 du 20/2/2015, pages 16 et 17.

PROCHAINES ÉTAPES

• 15 juin : date limite de dépôt des amendements ;

• 15 juillet : examen des amendements en Envi ;

• 22 juillet : vote du rapport en Envi.

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