FORMATION
Pratique mixte
L’ACTU
Auteur(s) : Stéphanie Padiolleau
L’évolution des modes d’élevage et les enjeux présents et futurs orientent la gestion du risque parasitaire chez les herbivores, en particulier au pâturage.
Habituellement présenté en atelier, le parasitisme était, pour la première fois, le thème principal des journées nationales de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV), qui se sont tenues du 20 au 22 mai1. L’affluence ne faiblit pas, les praticiens et les exposants sont dé-sormais habitués à ce rendez-vous fréquemment organisé dans la cité des congrès nantaise. La formule demeure la même : un thème principal développé sous tous ses aspects en séances plénières et des ateliers parallèles, par espèces (abeilles, équins, petits ruminants) ou types de production, auxquels s’ajoutent des séances pratiques dans les locaux d’Oniris. Cette année, un atelier satellite dédié à la gestion des parasites des ruminants au pâturage, en lien avec les exigences du 3e plan national d’action en faveur des milieux humides, était également proposé.
Les moyens de gestion du parasitisme, dont l’utilisation d’antiparasitaires, et la personnalisation des plans de maîtrise constituent un enjeu important : les considérations économiques, sociétales et environnementales s’invitent dans les protocoles mis en place.
Le risque de résistance doit également être pris en compte, afin d’éviter la situation observée notamment en Océanie : en 2006, 94 % des élevages de bovins néo-zélandais montraient une résistance à au moins un principe actif. En 2013, en Australie, la résistance à l’abamectine était présente dans 77 % des cheptels ovins, et dans 96 % en ce qui concerne les benzimidazoles et le lévamisole. Les risques d’émergences et de réémergences sont également nombreux : des parasites exotiques (Fasciola magna, douve des cervidés répandue en Europe de l’Est, est désormais présente en Italie) ou la recrudescence de parasitoses que les traitements systématiques avaient rendues rares.
Peu de parasitoses sont des zoonoses en métropole : la toxocarose est la plus fréquente, avec une prévalence qui varie de 2 à 5 % en zone urbaine à 35 à 42 % en zone rurale. L’échinococcose alvéolaire demeure rare mais s’observe de plus en plus souvent. La cryptosporidiose n’est pas courante (0,02 à 0,1 %), mais le contact avec les veaux est une source de contamination humaine fréquente. Concernant la giardiose, la transmission de l’homme aux bovins est démontrée, mais pas l’inverse, alors que le chien pourrait être une source de contamination pour l’homme.
L’utilisation d’antiparasitaire s’accompagne de résistances, qui apparaissent après quelques années d’utilisation, plus ou moins selon le produit, le pays et le type d’élevage. En France, l’existence de résistance aux anthelminthiques chez les bovins n’est pas encore publiée (ce qui ne veut pas dire qu’il n’y en a pas), mais c’est déjà le cas pour les petits ruminants. Des cas de résistance de strongles intestinaux aux benzimidazoles sont rapportés chez les ovins, ainsi qu’un cas de résistance aux lactones macrocycliques. Il a été souligné, au cours des discussions, que des résistances peuvent évoluer de façon silencieuse et passer inaperçues aux yeux de l’éleveur. Lorsqu’un défaut d’efficacité des produits est suspecté, une déclaration de pharmacovigilance doit être faite auprès de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Non-efficacité et résistance ne sont pas systématiquement liées : il peut s’agir d’un mauvais usage des produits (dosage, conservation), d’un mauvais choix du moment du traitement, etc. Le respect d’un dosage adapté au poids des animaux ou à l’espèce est nécessaire. Il est conseillé de faire peser quelques animaux du lot traité, dont les plus gros pour écarter les risques de sous-dosage. Des interactions médicamenteuses peuvent également provoquer une baisse d’efficacité (la dexaméthazone réduit la concentration plasmatique de l’ivermectine quand elles sont administrées conjointement). La voie d’administration est également importante : le léchage des formulations percutanées peut induire des variations dans le dosage, et donc dans l’efficacité. Le protocole de confirmation de résistance fait appel aux tests de réduction de l’excrétion fécale d’œufs2.
L’impact des traitements sur l’environnement est pris en compte dans le choix des molécules par les vétérinaires. Des études d’écotoxicité sont demandées dans les dossiers d’autorisation de mise sur le marché des médicaments, effectuées en deux temps. Une première phase distingue, d’après le niveau d’exposition prédit, certains produits qui sont jugés “à risque” et évalués dans une seconde phase. Les antiparasitaires destinés aux animaux au pâturage subissent systématiquement une phase 2, à cause de l’excrétion fécale importante, ainsi que les médicaments destinés aux poissons. Les concentrations prévisibles (ou PEC, predicted environmental concentration) dans le sol, l’eau souterraine ou de surface sont déterminées et utilisées dans l’évaluation de la probabilité d’exposition. Le danger lié à cette exposition est estimé en fonction des effets observés chez certaines espèces représentatives des différents milieux terrestres et aquatiques exposés. Le ratio ensuite obtenu détermine le niveau de risque, faible s’il est inférieur à 1, ou justifiant des études supplémentaires quand il est supérieur à 1.
La gestion du parasitisme est complexe et de plus en plus personnalisée. Les parasites en cause ne sont pas les mêmes en stabulation ou au pâturage, et en fonction de l’âge et l’espèce des animaux. L’identification et l’évaluation du degré d’infestation par des analyses coproscopiques, sanguines ou nécropsiques, interviennent dans la détermination du risque par les praticiens : des protocoles de gestion adaptés peuvent alors être élaborés avec les éleveurs. Moment, durée, dosage, choix des animaux à traiter : tout concours à l’instauration de protocoles personnalisés, en fonction notamment de la nature et de l’utilisation des prairies. Le 3e plan national d’action en faveur des milieux humides prévoit la publication d’un document de synthèse sur les méthodes de diagnostic et les moyens de gestion du parasitisme des troupeaux en zones humides, avec formation et information des éleveurs et des vétérinaires. Le recours à des produits non allopathiques est en augmentation, et pas uniquement chez les éleveurs “bio” : les médecines alternatives ont l’avantage de ne pas avoir de temps d’attente, elles sont bien souvent qualifiées de “naturelles”, donc réputées suivre la mouvance sociétale, malgré une absence fréquente d’études d’efficacité et d’innocuité.
L’homéopathie devrait être écartée du débat, car elle ne propose pas de solution antiparasitaire préventive. La piste de la phytothérapie gagnerait à être explorée – certaines plantes et huiles essentielles possèdent des propriétés vermifuges –, mais elle est encore utilisée de manière très empirique, et son efficacité difficile à objectiver.
Des projets financés par le dispositif Casdar3 s’intéressent aux pratiques de maîtrise du parasitisme gastro-intestinal, avec des études de faisabilité et d’acceptabilité des outils de traitement ciblé, et de traitement sélectif. L’application chez les vaches laitières a été présentée, dont des stratégies de traitement ciblé, contre les strongles gastro-intestinaux : les résultats sont en faveur d’un traitement d’automne, à la rentrée en stabulation, par rapport à un traitement de printemps après environ deux mois à l’herbe.
La gestion du parasitisme devient à la fois personnalisée, adaptée à chaque élevage ou lot d’animaux, et globale, car les dimensions sociétales et environnementales sont maintenant prises en compte.
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