Mieux accompagner les SDF et leurs chiens

Selon un recensement effectué en 2010, la France compterait 30 000 à 50 000 binômes maître-chien à la rue. Ce sont souvent des jeunes en errance, qui choisissent de s’entourer ainsi d’un ou de plusieurs animaux. « Ces groupes ont été décrits par le sociologue Christophe Blanchard¹, commente Céline Sissler-Bienvenu, directrice d’Ifaw France et Afrique francophone, le Fonds international pour la protection des animaux. C’est pour créer du lien, se fonder une famille, que les SDF font reproduire ces chiens et les échangent entre eux ». Si quelques cas de maltraitance ou de violence existent (notamment dans les squats), Céline Sissler-Bienvenu souligne que « loin des clichés, la plupart de ces animaux de rue entretiennent une relation fusionnelle avec leur maître. Ils sont obéissants, habitués aux bruits, aux groupes et aux autres chiens de SDF. Les problèmes principaux concernent des cas de malnutrition et un manque de traitements vétérinaires, faute de moyens financiers (notamment pour des vaccins et des vermifuges). Sur Reims, nous avons noué un partenariat avec un vétérinaire très engagé, le Dr Bouche. Ifaw finance une partie des soins et responsabilise le maître en lui faisant verser une participation ». Comment agir ailleurs en France ? « Nous recommandons aux vétérinaires de se rapprocher des structures sociales, pour mettre en place une collaboration et un suivi. Les praticiens peuvent également nous contacter², de manière à ce que nous jouions éventuellement un rôle d’intermédiaires pour essayer de sensibiliser par téléphone les travailleurs sociaux à cette question. »

Avec le soutien du ministère du Logement

« Seules 30 % des structures d’accueil et d’hébergement pour SDF acceptent actuellement de loger le chien et son maître, poursuit Céline Sissler-Bienvenu. C’est pourquoi nous venons d’éditer un livret3, destiné à promouvoir cette pratique. Il va aussi être diffusé par le ministère du Logement, qui soutient notre action. Ifaw travaille pour que ces chiens de SDF, au lieu d’être perçus comme des obstacles ou des freins, soient au contraire considérés comme des atouts de reconquête sociale, en entrant dans le concept plus vaste de la médiation animale. Le chien peut servir pour engager la conversation avec le maître, pour lui parler d’hygiène. Les SDF avec chien ont moins d’addictions car ils se sentent responsables de l’animal. Il faut toutefois effectuer un travail d’accompagnement commun, notamment pour les réhabituer à vivre ensuite dans un logement clos. Ils ont aussi des angoisses quand ils sont séparés. Il importe donc de travailler sur tous ces thèmes de manière progressive. » Ces chiens de SDF, qui sont parfois de véritables bouées de sauvetage émotionnelles pour leurs maîtres, mériteraient assurément que l’on s’intéresse davantage tant à leur utilité qu’à leur sort…

• 1 Des routards prisonniers dans la ville. Article à télécharger sur sejed.revues.org/6292.

• 2 Ifaw France : 03 26 48 05 48 ; info-fr@ifaw.org.

• 3 http://bit.ly/1LCYnSZ.