TRIBUNE LIBRE
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Auteur(s) : Isabelle Lussot-Kervern
Selon l’annuaire Roy, plus de 400 confrères et consœurs pratiquent l’ostéopathie en France. La profession vétérinaire doit suivre de près les différentes évolutions législatives de cette pratique, en santé humaine et animale, afin que la situation des praticiens qui officient sur le terrain soit clarifiée.
Grosse secousse, le 7 juillet dans le monde de l’ostéopathie humaine : le ministère de la Santé publie la liste des écoles ayant obtenu un agrément pour une durée de cinq ans. Depuis 2007, plus de 60 écoles d’ostéopathie offraient des formations agréées.
Le couperet est tombé pour 60 % des écoles présentes sur le territoire qui perdent leur agrément. Une coupe drastique face à l’escalade de l’offre en formations pour une profession sans numerus clausus, avec des frais de scolarité compris entre 5 000 et 8 000 € par an et des formations de qualité très hétérogène. L’association Ostéopathes de France se réjouit sur son site internet : « Le problème de la démographie galopante de notre profession va enfin pouvoir se résoudre au cours de ces prochaines années. »
Avec presque un ostéopathe pour un peu moins de 3 000 habitants, la France comptait 22 318 ostéopathes en exercice en janvier 2015. À titre de comparaison, nos voisins anglais en dénombrent juste un peu plus de 5 000. Avec à la clé une rentrée mouvementée pour les étudiants en dernière année d’études dans une école ayant perdu son agrément et qui doivent en urgence trouver un moyen de finir leur cursus dans une école agréée… Et quid des autres étudiants ? Vont-ils, par défaut et en l’absence de texte de loi explicite, se replier sur l’ostéopathie animale ?
Face au développement des offres de formation en ostéopathie animale, les vétérinaires doivent garder une place centrale. Les manipulations ostéopathiques sont des techniques thérapeutiques, et il ne peut y avoir de traitement sans diagnostic. Il est utile de rappeler qu’à l’heure actuelle, seuls les vétérinaires ont suivi un cursus leur permettant d’établir un diagnostic et de conseiller un traitement approprié.
Cependant, la situation des ostéopathes animaliers (non vétérinaires) s’est quelque peu clarifiée après la parution de l’article L. 242-3-1-I, fin juillet. Leurs conditions d’exercice sont maintenant clairement définies par la loi. Ils devront justifier de compétences fixées par décret, être inscrits sur une liste tenue par le conseil régional de l’Ordre des vétérinaires et, surtout, respecter un code de déontologie spécifique. C’est la première fois que l’Ordre s’engage à élargir ses compétences à une autre profession que celle des vétérinaires. Même si les articles sont parus au Bulletin officiel, il reste néanmoins à rédiger les décrets qui définiront les compétences et le nouveau code de déontologie !
Pour les cas litigieux, la loi prévoit la mise en place d’une Chambre nationale de discipline. Si les textes sont appliqués, tout ostéopathe animalier non inscrit sur les listes visées par l’Ordre sera donc clairement en exercice illégal de la médecine vétérinaire.
L’ostéopathie est une discipline récente, dont la reconnaissance par le droit français ne remonte qu’à 2002. Les textes parus cet été constituent une première pierre à l’édifice de l’établissement d’une nouvelle profession. L’attrait financier représenté par les écoles de formation en ostéopathie humaine a conduit à de graves dérives. Les premières victimes sont les étudiants inscrits dans des écoles dont l’agrément a été retiré, et les diplômés qui, sur le terrain, peinent à gagner leur vie. Il suffit de consulter quelques forums pour voir que s’installer en tant qu’ostéopathe devient de plus en plus difficile en raison du nombre élevé de praticiens. Et les agréments qui viennent d’être retirés montrent bien que leur formation était de qualité inégale.
Comme mentionné dans le dossier paru en mai 20141, même si cette discipline est sans doute amenée à se développer au sein de la profession vétérinaire, elle ne pourra garantir un emploi que pour un faible nombre de praticiens. À titre d’exemple, une simple règle de trois permet de chiffrer les besoins en ostéopathie équine. Avec une estimation très large de soins ostéopathiques de 30 % de chevaux identifiés, seuls 200 praticiens équivalent temps plein suffisent. Pour les petits animaux, l’ostéopathie ne concerne encore, pour le moment, qu’une petite partie d’entre eux. Éthiquement, il est légitime de se poser la question de la formation d’ostéopathes animaliers et de leur capacité à vivre de leur métier à long terme.
Les vétérinaires continuent de leur côté à œuvrer pour la reconnaissance de cette médecine manuelle dont les résultats intéressants sur le terrain restent à confirmer par des études scientifiques valides. Selon l’annuaire Roy, plus de 400 confrères et consœurs pratiquent l’ostéopathie en France. Un certain nombre d’entre eux ont passé, cette année, un diplôme interécole (DIE) d’ostéopathie et les deux écoles privées qui proposent des enseignements exclusivement aux vétérinaires en forment une cinquantaine tous les deux ans. Pour le moment, la formation dispensée dans les écoles vétérinaires n’a pas été reconduite.
Les vétérinaires formés en ostéopathie se regroupent au sein de différentes associations, comme Osteovet-France et l’European Veterinary Society for Osteopathy (EVSO)2, dont l’objectif est de promouvoir cette médecine manuelle très prometteuse.
1 Voir La Semaine Vétérinaire n° 1584 du 10/5/2014, pages 23 à 30.
2 Les 2 et 3 octobre prochains, l’EVSO tiendra son deuxième congrès de médecine ostéopathique vétérinaire à Berlin, avec un programme riche de différents intervenants venus de toute l’Europe. http://bit.ly/1KnECgb.
3 Responsable de la commission médecines non conventionnelles de l’Association vétérinaire équine française (Avef), secrétaire adjointe de l’EVSO.
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