CONFÉRENCE
Pratique mixte
FORMATION
Auteur(s) : Jean-Marie Denoix*, Marine Neveux**
Fonctions :
*Professeur
Cirale, Goustranville (Calvados).
Article rédigé d’après une présentation
faite lors de l’Équi-meeting
maréchalerie du Pin-au-Haras (Orne),
les 25 et 26 septembre 2015.
L’Équi-meeting du Pin-au-Haras s’est déroulé fin septembre autour du thème fédérateur : « Maréchal-ferrant et vétérinaire, deux experts pour un objectif : la performance du cheval ». Nos confrères Bruno Baup et Sébastien Caure, notamment, font partie du comité d’organisation de ces rencontres riches en échanges entre chercheurs, institutionnels et professionnels de la maréchalerie. L’un des sujets de cette édition concernait les lésions ligamentaires du pied du cheval.
Les lésions ligamentaires du pied impliquent les différents ligaments de l’articulation interphalangienne et l’appareil podotrochléaire. Ces ligaments sont très sollicités en compétition : propulsion avant l’obstacle, épreuves de dressage, etc. Les contraintes probablement les plus accidentogènes sont celles qui sont asymétriques quand le cheval prend un virage. Elles sont responsables de desmopathies (entorses) ou d’enthésopathies (lésions d’insertion), les dernières étant peut-être les plus douloureuses.
Au cours de l’examen clinique, le praticien observe le cheval sur le cercle pour que les manifestations cliniques soient plus visibles et l’identification meilleure. En effet, les mouvements de collatéromotion et de rotation produits mobilisent les articulations sur un plan qui n’est pas physiologique pour le cheval. C’est aussi la raison pour laquelle des lésions peuvent apparaître lorsqu’un cheval est trop souvent entraîné sur des cercles serrés. Pour une articulation, les mouvements de rotation sont les moins bien tolérés, car les ligaments ne supportent pas bien les torsions (un ligament est fait pour s’allonger).
Au niveau de l’articulation interphalangienne, les ligaments se situent entre la deuxième et la troisième phalange. Quand le cheval tourne sur un cercle à main gauche, le ligament collatéral latéral va être détendu, mais le ligament opposé sera extrêmement tendu. C’est le résultat de l’ouverture articulaire (de la collatéromotion).
En cas de rupture complète du ligament, il est possible de plâtrer, car se crée une instabilité articulaire et l’inflammation chronique peut entraîner une détérioration irréversible du cartilage. Lors de lésions moins sévères, d’entorses modérées, des fers asymétriques posés par le maréchal-ferrant favorisent la mécanique du ligament, même si le cheval est maintenu à un certain niveau d’activité. Lorsque, par exemple, le ligament collatéral médial est touché, il convient d’adapter les exercices : mettre le cheval sur sol souple et ne pas tourner à main correspondante, car c’est la situation responsable de la douleur, de la lésion et de son entretien. Le sol choisi permet d’éviter que l’extension de ce ligament soit trop forte. Une ferrure asymétrique est utilisée. Il s’agit d’une vraie ferrure kinésithérapique pour modifier les contraintes biomécaniques. C’est le meilleur moyen thérapeutique contre les affections du pied. L’objectif est de soutenir le pied du côté de la lésion et de favoriser le roulement du côté opposé pour éviter la tension du ligament.
Une ferrure avec une branche médiale plus large, en oignon, permettra de soutenir le pied et le roulement externe sera favorisé par un biseau accentué sur la branche externe en mamelle. Le cheval ne doit pas évoluer sur un sol ni trop profond ni trop dur, mais sur un sol intermédiaire, pour utiliser les propriétés mécaniques du terrain et optimiser l’intérêt de la ferrure.
Autre exemple : lors de lésions sévères au niveau du ligament collatéral avec une douleur à l’extension interphalangienne. Dans ce cas, un fer inversé (à l’envers, asymétrique) est utilisé, avec une branche médiale plus large et un roulement sur la branche externe et en mamelle externe. La garniture est contre-indiquée en cas de douleurs sur les ligaments collatéraux, car elle exagère l’effet des bras de levier et les contraintes chez les chevaux de sport (un pied large ne convient pas à un cheval de sport qui doit tourner court).
Les crampons sont également à éviter quand le cheval reprend les exercices.
L’os naviculaire est encadré de quatre ligaments qui subissent une contrainte identique à l’os naviculaire lui-même. Derrière l’os sésamoïdien se situe le gros tendon perforant.
Chaque fois que l’articulation interphalangienne distale se met en extension, les tensions se développent sur le ligament sésamoïdien lors de la propulsion. À la réception de l’obstacle se produit un relâchement des ligaments sésamoïdiens. Plus le boulet descend, plus ce relâchement est important. Inversement, à la propulsion, l’extension interphalangienne induit de fortes tensions sur les ligaments sésamoïdiens.
Le ligament annulaire digital distal, qui couvre la face postérieure du ligament, fonctionne comme le tendon perforant : quand le boulet descend, il est complètement relâché ; en revanche, lors de la propulsion, la tension est maximale.
Les chevaux qui présentent des lésions de ces deux ligaments vont donc avoir les mêmes symptômes : réduction de la phase postérieure de la foulée, le cheval a du mal à pousser ; des signes caractéristiques des lésions de l’appareil podotrochléaire ou du ligament annulaire digital distal.
Les lésions des ligaments sésamoïdiens peuvent aussi apparaître lors des appuis asymétriques, en cas de tension asymétrique du ligament sésamoïdien distal, d’autant que le travail sur le cercle renforce les contraintes.
Les manifestations peuvent aller d’une boiterie très sévère à une boiterie discrète. Le degré d’expression clinique varie. Ces ligaments ont une tension maximale lors de la phase de propulsion, donc il convient de limiter l’extension interphalangienne distale qui apparaît à la fin de la propulsion en favorisant le roulement du pied.
Pour faciliter la cicatrisation ou la tolérance d’une lésion de ces ligaments, le roulement antérieur est favorisé, avant tout grâce au parage et à la ferrure kinésithérapique. Au niveau du parage, la pince doit être raccourcie (réduction des contraintes sur les ligaments sésamoïdiens). Idem pour le pied, afin d’éviter les bras de levier exagérés. Le but est de faire décoller les talons en réduisant la tension sur les ligaments sésamoïdiens. Le fer à l’envers, le fer napoléon, fournit un bon support de la foulée et favorise le roulement antérieur. Dans la propulsion, il a donc une efficacité maximale pour réduire les contraintes sur le ligament annulaire distal et sur les sésamoïdiens. Les fers à l’envers sont plus efficaces que les fers en œufs. Le roulement est plus important que le soutien des talons, car les contraintes sont plus fortes au cours de la phase de propulsion. Concernant la tolérance à long terme de ces fers à l’envers, on notera que les chevaux peuvent les supporter pendant des années et même en compétition.
• Chaque cheval est particulier. Il convient d’adapter le traitement et l’entraînement à la conformation de l’animal et à la discipline, s’il a des défauts d’appui.
• L’objectif est de traiter des individus, donc le fer doit être adapté à la lésion et à la clinique. Au cours de la cicatrisation et durant l’amélioration de l’état du cheval, il convient de faire évoluer la ferrure. Un entraînement sur un sol souple, mais réactif, est requis.
• La ferrure est essentielle. Ensuite, ce qui prime, c’est la nature des exercices que le vétérinaire va recommander pour gérer la situation.
• À retenir comme principe général : moins travailler sur le cercle, car il concentre les contraintes mécaniques sur un côté du pied au lieu de les répartir sur le pied. Les échauffements en longe ne sont pas idéaux pour des chevaux qui subissent des contraintes ligamentaires.
• À la base, un bon diagnostic est indispensable pour savoir ce qu’il faut traiter. Il repose sur une meilleure connaissance de la biomécanique des affections basses. Lorsque l’origine de ces lésions est identifiée, un exercice de prévention peut être recommandé.
Pratique Vétérinaire Équine, numéro spécial à paraître en octobre 2015 sur les Progrès dans le diagnostic et le traitement des boiteries chez les chevaux.
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