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Auteur(s) : Michaella Igoho*, Clarisse Burger**
Un nouveau rapport parlementaire à gauche, une proposition de loi à droite : experts économiques et politiques s’affairent à réformer le Régime social des indépendants. Le point.
Un désastre, ça ne marche pas ». C’était la phrase lancée en mars dernier par Emmanuel Valls concernant la réforme du Régime social des indépendants (RSI). Ses dysfonctionnements de gestion et ses bugs informatiques ont provoqué l’ire des affiliés, ces chefs d’entreprise indépendants qui n’ont pas hésité à manifester leur ras-le-bol dans la rue. Ce régime très critiqué et sur lequel se sont déjà penchés experts et parlementaires va-t-il s’améliorer ou finalement disparaître ? Aujourd’hui, de nouvelles pistes sont ouvertes pour sortir de ce système jugé trop complexe et peu efficient par les usagers et/ou les politiques.
Un nouveau rapport « sur le fonctionnement du RSI dans sa relation avec les usagers », établi par Sylviane Bulteau, députée de la Vendée (Parti socialiste) et de Fabrice Verdier, député du Gard (PS), a été soumis au gouvernement le 21 septembre. Parallèlement, une proposition de loi a été présentée par Bruno Lemaire, député de l’Eure (Les Républicains) et Julien Aubert, député du Vaucluse (LR), et un avis du Conseil économique, social et environnemental (Cese) a été émis pour sauver la protection sociale des usagers du RSI.
Tous s’accordent sur la nécessité de le réformer, tout en tenant compte des préoccupations de ses affiliés. De son côté, l’Union nationale des professions libérales (Unapl) surveille cela de près, tenant à ce que son régime social spécifique soit préservé).
Dans sa version finale, le rapport comporte 20?mesures visant à améliorer les échanges entre le RSI et ses affiliés. Certaines d’entre elles devraient être incluses dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS pour 2016). Elles proposent notamment :
• Le maintien du régime autonome des indépendants
L’une des solutions envisagées était la fusion de l’activité du RSI avec celle de la mutuelle agricole (Mutualité sociale agricole ou MSA) et le régime général, afin de regrouper « des populations proches en termes d’identité professionnelle ». N’apportant pas une solution concrète pour calmer les inquiétudes des usagers du RSI, cette piste a rapidement été écartée à la suite des auditions menées. Leur rapprochement est cependant recommandé pour permettre à ce régime d’avoir accès aux données de l’assurance maladie. L’objectif est de déployer une offre de service adaptée, en matière de prévention sanitaire et sociale.
• L’uniformisation et la simplification du barème des cotisations
Aujourd’hui, cinq taux différents sont appliqués aux affiliés du RSI. Le rapport préconise d’uniformiser le barème des cotisations à un taux unique de 11,50 %, afin de le rendre plus lisible par ses cotisants. Par ailleurs, le recouvrement de la cotisation à la formation professionnelle serait confié à la Direction générale des finances publiques (DGFIP).
• Un régime des indemnités journalières plus équitable
Il s’agit de réduire le délai de carence pour le versement des indemnités journalières de sept à trois jours, pour les arrêts de travail de plus de sept jours. Le rapport demande la validation en qualité de trimestre assimilé des périodes de 90 jours de perception d’indemnités journalières, au titre d’un congé maternité ou d’une maladie. Aussi, la validation de trois trimestres par an pour la retraite de base est préconisée, au lieu de deux actuellement.
• L’amélioration de la relation avec les usagers
Faire aboutir rapidement le chantier courrier pour améliorer la lisibilité de l’information envoyée aux assurés constitue une priorité. Les députés souhaitent développer la pratique du rendez-vous systématisé, promouvoir une offre dématérialisée et former les usagers à son utilisation.
Parmi les mesures phares de la proposition de loi, l’adoucissement de l’obligation de s’affilier au RSI, et ce en permettant aux travailleurs indépendants (non agricoles) qui le souhaitent d’opter pour le régime général pour une durée de 36 mois, avec tacite reconduction. D’autres propositions feront certainement débat, telles que la création d’un fonds d’indemnisation des cotisants ayant subi un préjudice du fait des dysfonctionnements du RSI, le recours limité aux huissiers de justice pour le recouvrement des cotisations par le RSI aux seuls cas ayant donné lieu à une décision de justice, mais aussi la possibilité d’étaler sur 36 mois le règlement des cotisations, en cas de diminution substantielle du chiffre d’affaires des cotisants. Le texte prévoit un « droit opposable à la retraite » pour les travailleurs indépendants. Cela permettrait à tout affilié au RSI de percevoir, au bout de quatre mois, une pension de retraite provisoire qui serait par la suite révisée dans un délai maximum de six mois.
Le Cese a été saisi en mars dernier par le président du Sénat, Gérard Larcher, afin qu’il émette un avis sur le RSI. Publié le 22 septembre, celui-ci recommande de simplifier la déclaration des cotisations en évaluant le dispositif actuel du “3 en 1” et de faciliter l’exercice des droits des usagers du RSI en étudiant les conditions de rapprochement des cotisations et des droits. En outre, le Cese juge nécessaire d’accompagner les indépendants, notamment avec des formations à la création et à la gestion d’entreprise.
Michel Chassang
Président de l’Unapl.
Un nouveau rapport parlementaire, une proposition de loi pour réformer le RSI… Qu’en dit l’Unapl ?
Le RSI a, en effet, connu de graves dysfonctionnements, et des réactions violentes de la part des affiliés ont pu être observées. Ce sont surtout les artisans et les commerçants qui ont subi ces bugs dus, entre autres, à la création de l’Interlocuteur social unique (ISU). Car les professions libérales, certes également affectées, ont pu bénéficier d’une gestion honorable et correcte des organismes conventionnés. Le projet de loi, l’avis du Cese en matière de recouvrement et le rapport parlementaire sont de nouvelles propositions de solutions. Il y a deux options : soit le rattachement du RSI au régime général, soit l’intégration progressive laissant le choix libre aux cotisants entre le RSI et le régime général. Nous défendons le principe de régime social spécifique des professions libérales et des indépendants. Et nous avons eu l’assurance que le RSI ne serait pas touché. Le pire est évité, sa disparition est écartée.
Mais le projet de loi PLFSS 2016 prévoit un autre mécanisme pour le recouvrement des cotisations ?
Nous avons pu voir ce projet de loi, son article 11 prévoit un recouvrement des cotisations des professions libérales par les Urssaf1 et non plus par le RSI. C’est à côté de la plaque ! C’est, en quelque sorte, recréer un interlocuteursocial unique (dont nous avons pu voir les écueils), cette fois pour les professions libérales. Il n’est pas question de prendre ce risque.
Que préconisez-vous à la place de cet article 11 ?
Nous allons tout faire pour l’enlever ou le modifier dans le projet de loi PLFSS 2016. Nous ne pouvons pas le laisser en l’état. Pourquoi reproduire les mêmes erreurs subies par les cotisants du RSI ? De plus, cette mesure enlèverait un peu de souveraineté à notre Régime social des indépendants. Notre bureau national se réunit ce jeudi, pour y réfléchir.
PROPOS RECUEILLIS PAR CLARISSE BURGER
Sylviane Bulteau
Députée de la Vendée.
Que faut-il retenir du rapport que Fabrice Verdier et vous avez établi ?
L’un des objectifs de notre rapport est de “réhumaniser” le RSI et d’améliorer la proximité avec ses usagers. Il s’agit de simplifier en renforçant les prestations proposées, comme le mi-temps thérapeutique qui existe déjà pour les salariés ou encore l’abaissement du délai de carence. Nous proposons le “3 en 1” : en un seul courrier, l’assuré recevrait le calcul et le montant de la régularisation de l’année précédente, l’ajustement des cotisations et des contributions sociales provisionnelles de l’année civile en cours, ainsi que le montant provisoire de celles de l’année suivante. Nous recommandons aussi un entretien téléphonique préalable avant un rendez-vous physique et le déploiement de médiateurs de terrain indépendants, déjà mis en place en Bretagne.
Que prévoit dès à présent le gouvernement ?
Parmi les mesures déjà mises en œuvre, l’accélération des remboursements des cotisations a pris effet dès juillet. Mais certaines questions restent en suspens, nous attendons le retour du gouvernement sur notre demande d’audit indépendant du système informatique du RSI et notre proposition d’expérimentation de l’auto-déclaration et de l’auto-liquidation. Nous souhaitons aussi la mise en place d’un comité de suivi, dont la composition n’a pas été clairement définie. Mais nous souhaitons que les parlementaires en charge de cette mission y soient associés, de même que les représentants d’usagers, de syndicats professionnels ou du ministère de tutelle.
Que pourrait intégrer le projet de loi PLFSS pour 2016 ?
Je pense au temps partiel thérapeutique ou à l’uniformisation du barème des cotisations.
PROPOS RECUEILLIS PAR MICHAELLA IGOHO
Bruno Lemaire
Député de l’Eure.
Quelle est votre estimation du coût des dysfonctionnements du RSI ?
Le principal coût est subi par nos chefs d’entreprises et la société toute entière. Les difficultés du RSI ont causé un grand nombre de faillites, dont certaines ont été suivies de drames pour les familles : visite d’un huissier, séparations, voire suicides. Le RSI s’est aussi trouvé privé de ressources. La Cour des comptes estimait en 2010 qu’en raison des erreurs commises dans le recouvrement, près de 1,5 milliard de cotisations manquaient au régime. En 2013, il restait encore à recouvrer 14,2 milliards d’euros. Des sommes considérables qu’il a bien fallu compenser en augmentant les prélèvements, notamment pour les autres régimes. Les mesures que je propose avec Julien Aubert ne génèrent aucune dépense significative. Au contraire, elles permettront au régime de réaliser des économies tout en étant plus simple. Le bouclier social que l’on propose d’étendre à tous les indépendants devra faire l’objet d’un chiffrage précis. Je gage que son coût sera plus faible que le scandale du RSI !
Quels points de votre texte jugez-vous essentiels ?
Nous souhaitons redonner de la liberté aux assurés du RSI en permettant à ceux qui le souhaitent de rejoindre le régime général. Notre proposition de loi comporte aussi un droit opposable à la retraite : les assurés doivent pouvoir compter sur leur pension dans un délai de quatre mois, après avoir déposé leur demande, et ce, dès 2016. Nous avons souhaité simplifier le règlement des cotisations et permettre aux indépendants de comprendre le calcul de leurs montants. Nous proposons donc, sous dérogation, qu’il leur soit désormais possible d’opter pour l’auto-déclaration et l’auto-liquidation de leurs cotisations sociales.
Enfin, nous proposons d’encadrer le recours aux huissiers et la gestion des litiges entre les assurés et le régime : la conciliation et la recherche d’une solution amiable doivent primer. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, loin s’en faut.
PROPOS RECUEILLIS PAR MICHAELLA IGOHO
des confrères sondés en ligne n’ont pas été satisfaits du RSI.
Julien Aubert
Député du Vaucluse.
Quel a été l’accueil du RSI concernant votre proposition de loi ?
Le président du RSI se dit tout à fait ouvert à nos propositions, qu’il juge intéressantes et déjà amorcées. Nous n’avons pas eu de retour de la part du gouvernement. J’ai cependant eu un échange avec la députée Sylviane Bulteau. Nous avons des points de convergence, notamment sur les notions de calcul des cotisations.
En ce qui concerne l’affiliation, un choix micro-économique est à faire. Aujourd’hui, tout ne fonctionne pas avec le RSI. L’idée est de poser le principe de bouclier social. Nous allons plus loin que le gouvernement, qui sera forcé de prendre des décisions sur des thèmes concrets.
Qu’en disent les professions libérales ?
Elles ont l’impression d’être normées, encadrées, avec de fortes charges et un nombre d’heures de travail qui frise parfois l’indécence. Elles auraient préféré sortir de ce système et ne vont pas tarder à donner leur avis. Il convient de libérer les individus en leur proposant un régime qui leur facilite la vie. Si nous arrivons à faire cette révolution copernicienne, nous aurons fait un grand pas !
Quels coûts avez-vous évalués pour cette réforme du RSI ?
Nous demandons conseil aux finances publiques, c’est l’exécutif qui peut accomplir cette mission.
PROPOS RECUEILLIS PAR CLARISSE BURGER
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