Deux hommes et des moutons

Comme Des Chevaux et des Hommes¹, ce nouveau film islandais exploite la force du lien qui unit la population rurale de l’île nordique à ses animaux domestiques. Pour son second long métrage de fiction, Grímur Hákonarson brosse un portrait intimiste d’une Islande rustique, à l’écart du monde. Usant, comme le film sus-cité, de cet humour noir, ironique, qui caractérise les productions scandinaves, il ne s’y cantonne pas pour autant, car le récit glisse vers le conte tragique pour s’achever avec de vrais accents épiques de saga. La fable n’en est pas moins minimaliste. Peu de protagonistes : un troupeau de moutons (de race autochtone, descendante de celles amenées par les Vikings), un border collie, quelques personnages secondaires – dont une impeccable vétérinaire – et, pour rôles principaux, deux frères éleveurs : vieux garçons à la barbe blanche vivant sur la même exploitation mais brouillés, ne se parlant plus depuis 40 ans. Tandis que leurs moutons rivalisent au concours agricole local, la confirmation que l’un d’eux est atteint de tremblante (présente sur l’île depuis la fin du XIX^e siècle) impose, par les autorités sanitaires, l’abattage total du cheptel. Contre le terrible arrêt, l’insoumission, qui enflamme et esseule davantage chaque frère, finira par les réunir. Un film sobre, une ode de glace et de feu à la fraternité. Fraternité des hommes et des bêtes face à l’adversité du monde. Elle puise ici sa vigueur de la solitude d’une terre aussi hostile que grandiose.

Béliers de Grímur Hákonarson, avec Sigurour Sigurjónsson, Theodór Júlíusson, Islande, 1 h 33, sortie le 9 décembre 2015.

• 1 Voir La Semaine Vétérinaire n° 1593 du 11/7/2014, page 48.