Indispensables mangroves

Il y a un an, dans l’indifférence générale, une gigantesque marée noire agressait, au Bangladesh, la plus grande mangrove du monde, classée au patrimoine mondial de l’Unesco¹. Cet écosystème forestier qui se développe sur le littoral des régions tropicales, dans la zone de balancement des marées, est composé de palétuviers. Ces arbres résistent à une salinité élevée, à l’immersion de leurs racines et à la faible oxygénation du sol due à la vase. Les mangroves servent de nurserie à de nombreuses espèces marines et sont très riches en larves de crevettes, crustacés et poissons. Le lien entre la richesse halieutique et la présence de mangroves est avéré. Ces dernières minimisent également les dégâts des cyclones et des tsunamis, en “cassant” l’énergie des vagues et des vents. Elles absorbent une partie des polluants organiques, comme le phosphore ou l’azote, qui peuvent être déversés par les rivières. Les mangroves jouent aussi un rôle important dans le cycle du carbone, qu’elles stockent en grande quantité (même si elles représentent seulement 1 % des surfaces des forêts tropicales). Notamment car les palétuviers ont une croissance très rapide et développent une biomasse importante.

Ce sont les écosystèmes qui disparaissent au rythme le plus alarmant. Ils s’étendent sur 150 000 km², soit un recul d’au moins 30 % ces 20 à 30 dernières années. En cause, l’urbanisation, mais surtout l’élevage des crevettes, dont les bassins ont remplacé la plupart des mangroves naturelles au Vietnam ou en Indonésie. Ces bassins sont rentables quelques années, puis la productivité baisse, ce qui conduit à déboiser plus loin. Idem en Amérique latine et en Équateur.

Il est indispensable d’agir pour protéger ces milieux naturels. À cet égard, l’action de l’ONG² Planète urgence, qui replante des mangroves en Indonésie, est remarquable. Le tsunami de 2004 en Asie aura été un électrochoc pour les consciences. Le CNRS³ a même déclaré 2015 « année de la mangrove ». Au Vietnam, les efforts consistent notamment à calculer la surface minimum à laisser entre chaque bassin aquacole afin que la mangrove puisse continuer à fonctionner et à conserver quelques palétuviers au milieu de ces zones de production, comme en agroforesterie.

• 1 Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture.

• 2 Organisation non gouvernementale.

• 3 Centre national de la recherche scientifique.