La passion du métier

Le cinéma ne remplace pas la vie, il s’en nourrit et, dans le meilleur des cas, ouvre une fenêtre sur elle pour l’éclairer. Si les films de Thomas Lilti parlent si bien de l’exercice de la médecine, c’est parce qu’il l’a lui-même pratiqué, travaillant en centre hospitalier universitaire comme son père, puis assurant des remplacements en médecine générale. C’est donc naturellement qu’après le jeune interne d’Hippocrate (2014)¹, il se tourne maintenant vers la figure du médecin de province. Rien n’a vraiment changé depuis Balzac. Praticien aguerri, Jean-Pierre est dévoué à sa patientèle. Si entièrement qu’il semble irremplaçable. Quand il apprend qu’il est lui-même gravement malade, il se voit contraint d’accueillir et de former une collaboratrice fraîchement diplômée, Nathalie, infirmière reconvertie en généraliste. Mais passer la main n’est pas facile (beaucoup de confrères en milieu rural se reconnaîtront dans le portrait de ce médecin…).

Astucieux récit d’apprentissage croisé, le scénario, patent et toujours attentif à être explicite, n’évite parfois pas la démonstration. Inspiré toutefois par l’expérience du réalisateur, le film, lui, reste juste dans ce qu’il montre. Et sincère dans ses intentions. Adepte d’un naturalisme à la fois documentaire et romanesque, le cinéaste réussit un touchant plaidoyer en faveur d’une médecine plus humaine et qui pose subtilement sur la table le problème de la désertification médicale. Ce faisant, il confirme son talent pour un cinéma populaire et social.

• 1 Voir La Semaine Vétérinaire n° 1595 du 5/9/2014, page 51.

• Médecin de campagne de Thomas Lilti, avec François Cluzet, Marianne Denicourt, 1 h 42, France, sortie le 23 mars.