Une meilleure reproduction quand les vaches maintiennent leur état corporel

Les vaches qui peuvent limiter leur perte d’état corporel et produire moins de lait lors d’une restriction alimentaire sont celles qui se reproduisent le mieux. C’est le résultat d’une étude présentée aux journées 3R en décembre 2015 par Nicolas Bédère, de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) de Saint-Gilles, en Ille-et-Vilaine.

Deux stratégies

Cette étude a été menée avec deux troupeaux de 30 à 35 vaches holsteins et normandes chaque année, de 2006 à 2015, pour un total de 516 lactations. Ces animaux sont affectés à deux systèmesalimentaires herbagers avec vêlages groupés sur 3 mois. Le système “haut”¹ permet une forte production laitière et une perte d’état corporel modérée, alors que le “bas” limite la production laitière et provoque un plus fort amaigrissement lors de la lactation.

L’effet du système est vérifié : les vaches produisent davantage de lait avec le régime alimentaire haut (2 131 kg de plus chez les holsteins, 1 132 kg chez les normandes) et s’amaigrissent moins lors de la lactation (0,5 point d’écart de note d’état corporel, ou NEC, chez les deux races).

Lors de restriction alimentaire, les vaches produisent ainsi moins de lait. Toutefois, les stratégies de modulation de la production laitière et de l’état corporel diffèrent selon la race. Les holsteins mobilisent leurs réserves de façon importante, afin de tenter de préserver leur niveau de production, alors que les normandes privilégient le maintien de leur état corporel au détriment de la production de lait.

D’autres différences sont observées entre les deux races, quel que soit le système alimentaire : les holsteins produisent davantage de lait que les normandes, avec un état corporel inférieur. De plus, la durée d’anovulation post-partum n’est pas affectée par l’alimentation et est plus longue de 6 jours chez les holsteins par rapport aux normandes, avec davantage de retards ou de phases lutéales prolongées. Enfin, le nombre d’inséminations artificielles, ainsi que le taux de celles qui se sont soldées par un vêlage sont inférieurs chez les holsteins.

Impacts sur la reproduction

Toutefois, le système alimentaire impacte la reproduction des animaux. Les vaches affectées au système haut expriment moins d’acceptations du chevauchement que celles du système bas. Ainsi, plus la production laitière est élevée, moins les ovulations sont détectées.

De plus, le régime alimentaire affecte significativement le taux de première et seconde inséminations (IA 1&2) se soldant par un vêlage chez les holsteins, qui passe de 40 % dans le système haut à 32 % dans le bas. En parallèle, le taux de non-fécondation et de mortalité embryonnaire précoce évolue de 38 % pour le système haut à 52 % pour le bas. En revanche, le taux de mortalité embryonnaire tardive est supérieur dans le système haut (16 % contre 9 % dans le bas), et le système alimentaire n’affecte pas le taux d’avortement. Cela semble être expliqué dans la bibliographie² : les taux de non-fécondation et de mortalité embryonnaire précoce seraient liés aux réserves corporelles de l’animal (notes d’état corporel inférieures dans le système bas), et le taux de mortalité embryonnaire tardive serait associé à une pente de production laitière élevée (supérieure dans le système haut).

En revanche, le système alimentaire n’a aucun effet sur le taux d’IA 1&2 se soldant par un vêlage chez les normandes (46 %). Les vaches qui peuvent limiter leur production laitière et maintenir leur état corporel en cas de restriction alimentaire seraient ainsi celles qui se reproduiraient le mieux en système herbager avec des vêlages groupés sur 3 mois.
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¹ Système alimentaire “haut” : pâturage tournant + 4 kg de concentrés en période de reproduction, ensilage de maïs, d’herbe, luzerne, concentrés et fourrages en proportions différentes en périodes de vêlage et de tarissement.

Système alimentaire “bas” : pâturage tournant sans concentrés en période de gestation, ensilage d’herbe et fourrages en vêlage et tarissement.

² Cutullic E., Delaby L., Gallard Y. et coll. Towards a better understanding of the respective effects of milk yield and body condition dynamics on reproduction in holstein dairy cows. Animal. 2012;6:476-487.