QUESTIONS-RÉPONSES
PRATIQUE CANINE
Auteur(s) : ÉMILIE VIDÉMONT
Vous avez des questions pratiques ? Nous avons exposé vos problématiques à un spécialiste, qui vous apporte ses réponses. Cette semaine, Émilie Vidémont, spécialiste en dermatologie, répond à vos interrogations sur les dermatoses allergiques du chat.
Non, pas toujours. En effet, elles peuvent se manifester sous la forme d’une dermatose prurigineuse (prurit diffus, prurit cervico-facial, alopécie extensive ou auto-induite), mais aussi sous la forme d’une dermatite miliaire ou de lésions du complexe granulome éosinophilique (ulcère atone, granulome éosinophilique et plaque éosinophilique), ces deux manifestations étant rarement prurigineuses.
L’alopécie extensive est une manifestation clinique qui présente différentes causes. Les dermatoses allergiques sont le plus souvent impliquées. L’alopécie extensive peut néanmoins être due à une atteinte comportementale. Sa mise en évidence doit donc conduire le clinicien à poser des questions ciblées au propriétaire pour rechercher d’autres manifestations d’un trouble comportemental (propreté, prise alimentaire, interaction avec le propriétaire et les autres animaux, etc.), l’atteinte cutanée étant très rarement le seul signe du trouble comportemental.
Ces lésions peuvent se manifester sous trois formes : ulcère atone, granulome éosinophilique et plaque éosinophilique. La cause principale est une dermatose allergique souvent compliquée d’une surinfection bactérienne. Beaucoup plus rarement, une ectoparasitose (cheylétiellose, otacariose, gale notoédrique) pourrait être en cause. Une origine idiopathique est également avancée par certains auteurs, notamment chez les jeunes animaux.
La dermatite par allergie aux piqûres de puces est liée à une hypersensibilité aux allergènes salivaires injectés par la puce. La présence de quelques parasites peut donc suffire à induire ce phénomène. Par ailleurs, il arrive que le chat ingère une partie des parasites présents sur sa peau via le toilettage ou le léchage associé à l’hypersensibilité, ce qui réduit encore la probabilité de les observer. L’absence de visualisation de puces ne doit donc pas conduire à écarter une dermatite par allergie à leurs piqûres.
Il n’existe actuellement pas d’examen complémentaire suffisamment sensible et spécifique. Il convient donc, lors de dermatose d’origine allergique chez le chat, de toujours commencer par exclure le rôle des piqûres de puces. Cela repose sur trois axes :
- la mise en place d’un traitement insecticide du chat. Le clinicien doit choisir, de préférence, un produit qui agit le plus rapidement possible afin de limiter l’injection des allergènes salivaires de la puce. Cette vitesse d’action doit être conservée dans le temps ;
- le traitement de toutes les espèces sensibles vivant en contact avec le chat ;
- le traitement de l’environnement avec un produit insecticide, le mode d’application de celui-ci (spray, fumigène, etc.) devant être adapté à l’habitat de l’animal.
Une allergie alimentaire se développe après une ingestion plus ou moins longue du trophoallergène en cause et il n’est pas rare que l’animal mange l’allergène responsable depuis des mois, voire des années. Une allergie alimentaire doit donc être suspectée chez tout chat présentant une dermatose prurigineuse non saisonnière ou l’un des quatre grands syndromes cliniques décrits dans cette espèce (prurit cervico-facial, alopécie extensive, dermatite miliaire, lésions du complexe granulome éosinophilique). Il n’existe aucun examen complémentaire – validé scientifiquement – à l’heure actuelle pour explorer une allergie alimentaire. La seule façon de la diagnostiquer est de mettre en place un régime d’éviction, ménager ou à base d’hydrolysats, pendant 6 à 8 semaines, puis de réaliser un test de provocation.
La dermatite atopique est envisagée chez le chat lorsque les causes parasitaires, bactériennes, fongiques et les hypersensibilités liées aux piqûres de puces et à l’alimentation ont été exclues, via des examens complémentaires appropriés et une démarche allergologique différentielle. Contrairement à ce qui est décrit chez le chien, la dermatite atopique chez le chat ne correspond pas à un phénotype précis et les mécanismes pathogéniques demeurent flous. Le diagnostic est un diagnostic d’exclusion, certains auteurs préfèrent parler de dermatose allergique non liée aux piqûres de puces, ni à l’alimentation.
Actuellement, le dosage des IgE sériques manque de spécificité et de sensibilité et les résultats sont mal corrélés à la clinique. Par ailleurs, il existe des variations entre les laboratoires proposant ces dosages. Ceux-ci ne peuvent donc en aucun cas être utilisés pour diagnostiquer une dermatite atopique. En effet, certains chats atopiques présentent des titres faibles ou nuls, alors qu’ils peuvent être positifs pour des chats non atopiques. Les dosages doivent donc être réservés aux cas pour lesquels un diagnostic de dermatite est établi et lorsque le clinicien souhaite mettre en place une désensibilisation. Notons cependant que, même dans ces conditions, la valeur de ce dosage est actuellement incertaine.
La désensibilisation peut être envisagée lorsqu’un diagnostic de dermatite atopique est établi. Elle donne des résultats très variables chez le chat. En outre, le possible développement d’un fibrosarcome secondaire aux injections répétées doit être envisagé et discuté avec les propriétaires.
La prise en charge de la dermatite atopique chez le chat repose essentiellement sur la mise en place d’un traitement immunosuppresseur. Les corticoïdes peuvent être utilisés ponctuellement par voie systémique ou locale. Leur utilisation à long terme risque d’induire des effets secondaires. La ciclosporine constitue un des traitements de choix. Elle dispose d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) chez le chat pour le traitement des dermatoses allergiques chroniques (Atopica® chat, Novartis). Elle est initialement prescrite à la dose de 7 mg/kg/j, jusqu’à la disparition des signes cliniques, obtenue généralement en 4 à 8 semaines. La plus petite dose efficace est ensuite recherchée en diminuant très progressivement la fréquence d’administration. Dans la moitié des cas environ, une administration deux fois par semaine permet de contrôler la dermatite atopique sur le long terme. Bien qu’il n’existe actuellement pas d’AMM chez le chat, plusieurs publications nord-américaines rapportent l’efficacité de l’oclacitinib (Apoquel®, Zoetis) ; la dose nécessaire pourrait être plus élevée que celle communément utilisée chez le chien.
Les effets secondaires les plus fréquemment observés sont des vomissements et des diarrhées. Ils sont principalement rencontrés en début de traitement et disparaissent généralement après quelques semaines. Leur occurrence peut être diminuée en administrant le médicament avec un peu d’aliment, ce qui n’impacte pas l’efficacité du traitement. Les chats ayant accès à l’extérieur et étant traités avec de la ciclosporine présentent un risque accru de développer une toxoplasmose avec une traduction clinique s’ils sont exposés au protozoaire.
Bien que l’acéponate d’hydrocortisone (Cortavance®, Virbac) n’ait pas d’AMM chez le chat, son utilisation semble intéressante chez cette espèce lors de dermatose allergique. Certains sujets semblent néanmoins difficilement tolérer l’application sous forme de spray.
Même si quelques études semblent indiquer un intérêt pour la réduction du prurit associé aux dermatites allergiques, l’efficacité des antihistaminiques est controversée chez le chat et leur effet semble, le plus souvent, décevant.
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