L’absurde par l’absurde

Puisque notre monde actuel est de plus en plus comparé à une jungle (économique, urbaine, professionnelle, etc.), sans pitié pour les plus vulnérables, pourquoi ne pas filer littéralement la métaphore ? Pour son second long métrage, Antonin Peretjatko, porte-drapeau de la comédie potache et libertaire, largue la république en plein cœur de la forêt guyanaise, où il égare également Vincent Macaigne et Vimala Pons, protagonistes déjà de La Fille du 14 Juillet (2014).

Dans une France légèrement parodique – le statut de stagiaire est devenu l’eldorado de nos jeunes diplômés –, un trentenaire maladroit finit par décrocher un stage au ministère de la Norme. Il est aussitôt envoyé outre-mer avec l’insigne responsabilité de certifier aux normes européennes le chantier Guyaneige qui, pour relancer le tourisme local, prévoit de construire en pleine jungle la première piste de ski indoor d’Amazonie (au moment où Charlie Hebdo¹ révèle un projet de mine d’or en Guyane, on ne saurait tomber plus à pic). Enchaînant les mésaventures, ce cinéma baroque, qui ne se veut ni réaliste ni psychologique, choisit d’éclairer l’absurde par l’absurde, utilisant l’humour comme une loupe pour pointer quelques travers hexagonaux. La surface est comique, le sous-texte politique. En montrant que la jungle n’est pas seulement soumise à la loi du plus fort mais que celle, foisonnante, du vivant est bien plus romanesque et poétique, le film prend le parti joyeux de célébrer ce qui échappe à la norme.
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¹ « La mine d’or guyanaise d’Attali, Juppé et Macron », Charlie Hebdo n° 1244 du 25/5/2016.

La Loi de la jungle d’Antonin Peretjatko, avec Vimala Pons, Vincent Macaigne, Pascal Légitimus, Mathieu Amalric, France, 1 h 39, sortie le 15 juin 2016.