ANALYSE
PRATIQUE MIXTE
Formation
La proportion de minéraux et de vitamines consommés dans la ration du cheval ne représente que quelques pourcents de la masse ingérée. Cependant, ces éléments sont essentiels au bon fonctionnement de l’organisme.
Ces dernières décennies, de nombreux travaux de recherche ont eu pour objectif de préciser les besoins minéraux et vitaminiques du cheval. En parallèle, les pratiques d’alimentation ont fortement évolué. Les quantités nécessaires à l’ajustement de la ration peuvent ainsi être optimisées au regard des données nouvelles.
Au xixe siècle, les recommandations alimentaires sont principalement focalisées sur les quantités d’aliments à apporter et sur la gestion de l’alimentation, mais pas encore sur les apports de chaque élément nutritionnel. À titre d’exemple, Heuschling recommandait dans les années 1840, comme ration d’un cheval« de grosse cavalerie et d’artillerie », 4 kg d’avoine, 4 kg de foin et 5 kg de paille. Jusqu’au milieu du xxe siècle, cette conception évolue peu pour les équins.
Les premières recommandations chiffrées concernant les besoins en minéraux et en vitamines n’apparaissent que dans la première version du Nutrient Requirements of Horses (National Research Council, NRC), en 1949. Dans cet ouvrage, seuls le calcium et le phosphore font l’objet d’indications chiffrées pour les minéraux. Les recommandations de l’époque sont, de plus, principalement basées sur des extrapolations de travaux conduits dans d’autres espèces, comme les bovins ou les ovins, chez qui les recherches sont plus avancées. Jusque dans les années 1960, les travaux sur l’alimentation du cheval restent marginaux.
L’étude des besoins en minéraux et en vitamines du cheval connaît une forte progression dans les années 1970. Les préconisations actuelles s’inspirent encore fortement des travaux de Hintz et Schryer (États-Unis), ou de Meyer (Allemagne). Les données nouvelles, de ces chercheurs puis de leurs successeurs, permettent d’identifier les éléments nécessaires au fonctionnement de l’organisme, les doses qui mènent à des carences et celles qui conduisent à des excès toxiques. Elles servent également à améliorer l’estimation des besoins nutritionnels des chevaux dans des conditions de conduites ou de stades physiologiques différents : au repos, à l’exercice, en croissance, en gestation, en lactation, etc.
Aux États-Unis (NRC), en Allemagne (Gesellschaft für Ernährungsphysiologie, GEH), en France (Institut national de la recherche agronomique, Inra), aux Pays-Bas (Centraal Veevoederbureau, CVB), etc., les données internationales sont analysées et mènent à des tables de recommandations. Régulièrement, celles-ci sont revues et ajustées au regard des nouvelles informations. Cependant, en fonction des publications retenues, les recommandations varient entre systèmes internationaux (encadré ci-contre).
Les pratiques d’alimentation comprennent les notions de gestion de l’alimentation (quantités distribuées, périodes et modes de distribution, etc.) et de caractéristiques des aliments utilisés (matières premières, valeurs nutritionnelles).
Concernant la gestion de l’alimentation, les pratiques observées et recommandées diffèrent d’une époque à l’autre. La diversité des aliments concentrés présentés autrefois aux chevaux était importante et dépendait des ressources disponibles localement : céréales (avoine, orge, blé, seigle, maïs), pois, lin, haricots, pomme de terre, fruits, citrouille, châtaignes, mais aussi pain, œuf voire poisson ! Aujourd’hui, une plus grande standardisation est observée dans les matières premières apportées.
Une évolution importante des pratiques provient du développement des aliments concentrés industriels, appelés officiellement aliments complémentaires de fourrage. Au milieu du xxe siècle, l’alimentation des chevaux était basée sur les fourrages et les céréales. Aujourd’hui, la majorité des structures équines intègrent des aliments industriels à leurs rations. Ainsi, en 2014, environ 12 millions de tonnes destinées aux chevaux ont été consommées dans le monde, dont 250 à 300 000 tonnes en France en comptant les importations.
Dans les aliments industriels, des concentrés de minéraux, d’oligoéléments et de vitamines sont généralement ajoutés. Les concentrations peuvent varier en fonction de la population cible (élevage, loisirs, sport de haut niveau, etc.). Le profil minéral et vitaminique des aliments industriels est différent de celui des céréales brutes (encadré ci-dessus).
Quantités distribuées et ratios fourrages/concentrés
Les quantités journalières recommandées depuis les années 2000 intègrent une part de fourrage plus importante et un apport d’amidon plus raisonné (encadré ci-après, page 40). Ceci est notamment lié à une meilleure connaissance de la physiologie digestive du cheval. De faibles volumes de fourrage et des apports élevés d’amidon contenu dans les céréales sont ainsi reliés à différentes maladies d’origine alimentaire.
En parallèle de cette évolution globale, des pratiques spécifiques à l’activité des équidés ont été développées. À titre d’exemple, la proportion de fourrage (herbe ou foin) dans la ration d’une jument gestante est en moyenne de 90 % ; pour un cheval d’endurance, elle est de 80 à 90 % ; pour un cheval de club, de moins de 50 %.
Les recommandations concernant les compléments minéraux et vitaminiques évoluent également. Par exemple, si aujourd’hui il est unanimement recommandé de laisser une pierre à sel à disposition des chevaux, Anon notait en 1908 que « l’ajout de sel à la ration du cheval n’est pas nécessaire ».
L’objectif du rationnement minéral et vitaminique est de couvrir les besoins nutritionnels tout en respectant le fonctionnement de l’organisme. Des apports insuffisants peuvent conduire à des carences. Au contraire, s’ils sont excessifs, ils peuvent être toxiques ou sources de déséquilibres du métabolisme minéral et vitaminique.
Les carences en minéraux et en vitamines étaient autrefois fréquentes dans les populations équines, notamment dans les villes où la distribution de fourrage restait limitée. De nombreux cas de maladies, notamment d’ostéoporose, sont ainsi décrits dans la littérature scientifique du XIXe siècle.
Aujourd’hui, les principaux risques de carences minérales et vitaminiques sévères concernent les chevaux qui n’ont pas accès à une pierre à sel et qui sont nourris avec des fourrages et des céréales brutes. Les animaux peuvent toutefois souffrir de certaines carences sans présenter de signes cliniques majeurs. Cependant, leurs performances sportives et zootechniques risquent d’en être affectées.
En fonction des minéraux, des oligoéléments ou des vitamines considérés, les seuils de toxicité aiguë varient : apporter 10 fois la dose recommandée d’iode est plus problématique pour l’organisme que 20 fois la dose de cobalt… Hors intoxications aux métaux lourds, celles aux oligoéléments essentiels (iode, sélénium, cuivre et zinc) sont les moins rares. Elles sont généralement observées en cas de conduite sur des terrains souillés, de distribution d’aliments inappropriés ou d’ajout irraisonné de compléments minéraux et vitaminiques à la ration.
La nature des éléments apportés influe sur leur biodisponibilité. Par exemple, à ingestion équivalente, le sélénium organique est mieux absorbé et retenu par l’organisme que le sélénium inorganique. Consommé à faible dose, le premier peut ainsi avoir un effet plus avantageux pour l’organisme qui l’utilisera mieux. Par contre, à forte dose, il est plus rapidement problématique.
Enfin, les concentrations en éléments synergiques et antagonistes du contenu digestif sont un facteur de variation du métabolisme minéral et vitaminique (encadré ci-dessous). Il est donc important de raisonner les doses distribuées par élément, mais également en tenant compte des interactions entre ceux-ci. Pour le cheval, quelques ratios sont ainsi utilisés, comme le ratio phosphocalcique ou le ratio zinc/cuivre.
En conclusion, il est recommandé d’éviter les apports trop élevés qui risqueraient de perturber l’équilibre minéral et vitaminique : pour la majorité des éléments, deux à trois fois les recommandations internationales constituent un apport à ne pas dépasser.
L’alimentation à base de fourrages et de céréales est souvent carencée, principalement en minéraux et en oligoéléments. En fonction des aliments choisis et des quantités distribuées, les autres types de rations sont parfois aussi sources de carences ou d’excès en minéraux et en vitamines. Ces risques peuvent être mis en évidence par un bilan nutritionnel réalisé avec le nutritionniste ou le vétérinaire.
•
POINTS FORTS
Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »
L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.
En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire
Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.
Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.
Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire