CONFÉRENCE
PRATIQUE CANINE
Formation
Auteur(s) : CHARLOTTE DEVAUX
Les tumeurs buccales représentent 6 à 7 % des cancers chez le chien, et sont le quatrième le plus fréquent dans cette espèce. Parmi elles, sont observés statistiquement : 40 % d’épulis (le plus souvent bénins), 25 % de mélanomes, 15 % de carcinomes épidermoïdes, 7 % de fibrosarcomes et 3 % de papillomes. Ces cancers sont retrouvés chez des chiens d’environ 9 ans, deux fois plus souvent chez les mâles et surtout chez les races prédisposées comme le cocker, le berger allemand, le chow-chow et le golden retriever.
Épulis fibromateux
L’épulis fibromateux est très fréquent. Il se rencontre principalement chez l’adulte de 7 à 8 ans. En général, il se présente sous la forme d’une tumeur unique, excepté chez le boxer qui est prédisposé à développer une forme multicentrique, présente dans toute la bouche. Sa localisation préférentielle est la face labiale du maxillaire. Cette tumeur a un aspect exophytique, rose, très ferme et lisse. L’évolution se fait vers l’augmentation de taille et l’ulcération, mais il reste souvent bénin. Le traitement repose sur l’exérèse complète avec résection de la dent et de l’os alvéolaire, les récidives sont alors assez faibles (moins de 17 % des cas).
Épulis acanthomateux
Rare (moins de 3 % des tumeurs de la bouche), il s’agit en général d’une tumeur mandibulaire située au niveau des incisives ou des canines et qui se manifeste par des dents instables et/ou manquantes. C’est une tumeur délabrante et envahissante, qui présente une agressivité locale, avec une infiltration osseuse dans 80 % des cas. Une exérèse complète et large (hémimandibulectomie) permet d’abaisser le taux de récidive à 10 %. En cas d’infiltration des marges, une radiothérapie est recommandée.
Papillome
Assez rare (3 % des tumeurs buccales), cette tumeur touche surtout les animaux de moins de 1 an. Elle est d’origine virale et présente une contagiosité pour les chiens immunodéprimés ou âgés. Elle a un aspect assez caractéristique : exophytique, blanc, irrégulier et rugueux au toucher. Aucun traitement n’est nécessaire, une régression spontanée s’opère en 1 à 2 mois. Si cette régression n’a pas lieu ou que les lésions occasionnent une gêne importante, une exérèse chirurgicale peut être proposée, sachant qu’un risque de récidive locale existe. Aucun traitement médical n’a prouvé son efficacité.
Mélanome
Tumeur maligne la plus fréquente, elle est principalement retrouvée chez les races de petite et moyenne taille, mais aussi chez le berger allemand et le golden retriever. Il se retrouve chez des animaux plus âgés, de 11 ans en moyenne. C’est le plus exophytique, il se présente sous la forme d’une masse infiltrante, plus ou moins pigmentée (voire rose en cas de mélanome achromique), molle, souvent ulcérée et à croissance rapide. L’envahissement osseux est moins fréquent que pour les autres tumeurs, mais les métastases ganglionnaires et pulmonaires sont fréquentes et précoces. Sans traitement, le pronostic est très mauvais (65 jours de survie). Le traitement est palliatif et consiste en une exérèse très large. Malgré cela, une récidive locale est observée dans un cas sur deux. Le mélanome est sensible à la radiothérapie, mais peu sensible à la chimiothérapie. Les anti-COX-2 peuvent être employés. L’immunothérapie par le vaccin Oncept®-Melanoma (disponible en Amérique du Nord) est controversée.
Carcinome épidermoïde non amygdalin
Il s’agit de la deuxième tumeur maligne la plus fréquente, surtout chez les races de plus de 23 kg, qui y sont prédisposées, et chez les animaux qui vivent en ville, pour lesquels la pollution augmente de 10 % le risque de développer cette affection. Elle est souvent observée en zone mandibulaire rostrale. Elle fait généralement moins de 4 cm et présente un aspect exophytique avec une nécrose de surface. Il s’agit de la tumeur buccale la plus ulcérative et térébrante, et elle provoque souvent une ostéolyse. Les métastases sont tardives (nœuds lymphatiques et poumons). Le traitement consiste en une exérèse complète, large et agressive. Si les marges sont saines, les récidives ont lieu dans moins d’un cas sur trois et les survies sont supérieures à 1 an. Si les marges sont infiltrées, les récidives sont probables et une radiothérapie est conseillée. Un traitement médical adjuvant à base d’anti-inflammatoires non stéroïdiens anti-COX-2 peut être mis en place. Une chimiothérapie à base de carboplatine peut aussi être réalisée.
Fibrosarcome
Moins fréquente, cette tumeur est surtout retrouvée chez les races de grande taille. Elle apparaît le plus souvent sous la forme d’une tumeur unique sur le maxillaire, entre la canine et la carnassière. Son aspect est exophytique, rose à rouge, ferme, lisse. C’est une tumeur de grande taille avec une base large très infiltrante. L’évolution spontanée se fait vers un envahissement local et osseux, avec une ostéolyse dans 70 % des cas. Les métastases sont tardives, mais l’infiltration locale est problématique. L’exérèse très large, avec des marges chirurgicales saines, permet une survie de 24 mois.
Carcinome épidermoïde amygdalien
Rare, mais très malin, avec des métastases précoces, le carcinome épidermoïde amygdalien est surtout observé chez des races de petite taille et en ville, où la pollution augmente le risque par dix. Il est agressif localement, infiltre toutes les structures locales et métastase dans les ganglions, puis dans les poumons. Malgré le traitement local, régional et général, la survie est faible (10 % à 1 an).
Bilan d’extension
Le bilan d’extension local, régional et à distance se fait à l’aide du scanner, qui donne un contour précis et bien défini de la tumeur et permet d’évaluer les ganglions et le thorax. Si des anomalies sont révélées sur les nœuds lymphatiques lors de cet examen, il est conseillé de profiter de l’anesthésie de l’animal pour réaliser des cytoponctions ganglionnaires. À la suite de ces examens, le stade de la tumeur est obtenu en fonction de sa taille, de l’état des ganglions et de la présence ou non de métastases1, ce qui permet d’établir un pronostic.
Chirurgie
Au terme du bilan d’extension et si le propriétaire est motivé, une chirurgie large et agressive est pratiquée avant même d’avoir le diagnostic histologique. L’intervention est douloureuse et nécessite une bonne analgésie, par exemple une anesthésie tronculaire. La réalimentation a lieu environ 24 heures après la chirurgie. Une alimentation humide pendant 1 mois est conseillée, avec un rinçage de la bouche à l’eau tiède pour assurer l’hygiène buccale.
Diagnostic histologique
Le diagnostic histologique, réalisé après la chirurgie, permet de connaître le type de la tumeur et l’état des marges. En fonction du type tumoral, la nécessité d’un traitement adjuvant est évaluée. Si les marges ne sont pas saines, une radiothérapie (sur les tumeurs radiosensibles) est préconisée. Pour les tumeurs avec un fort potentiel métastatique, la chimiothérapie est préférée. L’association de tous ces traitements est possible, mais il n’existe pas de consensus.
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