Épopée chirurgicale

Réparer les vivants est d’abord un roman de Maylis de Kerangal¹, le récit tendu d’une transplantation cardiaque orchestrée en un jour et une nuit, comme un passage de relais, par une chaîne humaine qualifiée. Précis et documenté, le livre déroule les fils médicaux et humains de cette métamorphose, de la tragédie à la vie. Après un accident de la route, Simon est en état de mort encéphalique au Havre. Moins de 24 heures plus tard, son jeune cœur va être greffé à Paris dans le corps de Claire. Après le succès du roman, vendu à 200 000 exemplaires depuis sa parution en 2014, l’enjeu d’une adaptation à l’écran (il y en a déjà eu deux au théâtre) n’est pas narratif mais dans la capacité de sa forme à partager autrement le champ du sensible. En dépit d’indéniables qualités – maîtrise de la mise en scène, talent des interprètes –, le défi est à moitié relevé ici. Avec une grande virtuosité mais également de la retenue, Katell Quillévéré parvient à faire exister chacun des protagonistes et restitue, sans pathos, toute l’intensité émotionnelle de cette épopée scientifique. La matérialité des descriptions documentaires du livre est ici relayée par l’effet de réel des images hospitalières qui nous confrontent à de véritables scènes de chirurgie cardiaque. Mais en évinçant trop vite le souffle onirique du départ – qui annonce l’anéantissement de Simon et sa survivance dans la mémoire de ses proches –, ce réalisme assumé prive le film d’aller au-delà d’une élégante transposition du livre.
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¹ Éditions Gallimard, collection “Verticales”.

Réparer les vivants de Katell Quillévéré, avec Tahar Rahim, Emmanuelle Seigner, Anne Dorval, Bouli Lanners, Kool Shen, Dominique Blanc, Alice Taglioni, sortie le 2 novembre.