La transformation numérique des structures vétérinaires - La Semaine Vétérinaire n° 1696 du 15/11/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1696 du 15/11/2016

DOSSIER

Auteur(s) : CLARISSE BURGER ET FRANÇOISE SIGOT 

En s’appropriant des outils numériques performants, les entreprises vétérinaires vont pouvoir gagner en productivité, optimiser leur relation client et améliorer leur image tant traditionnelle que digitale. La transition numérique des structures vétérinaires est aujourd’hui hétérogène. Cette mutation est plus que jamais nécessaire, alors que six Français sur dix se servent d’Internet comme source d’information en amont d’un achat.

L’heure est venue pour les entreprises vétérinaires de se transformer et d’effectuer leur mue numérique, si elles veulent se développer et rester compétitives, à l’ère du digital. Toutes les fonctions d’une entreprise sont impactées par les nouvelles technologies, et de nouveaux modes d’organisation du travail induits par cette révolution numérique se développent. Les situations sont actuellement hétérogènes. Certaines structures vétérinaires ont déjà bien progressé sur ce point, d’autres doivent reconsidérer cette mutation et leur modèle économique, alors qu’à l’extrême certaines partent de zéro. Les niveaux de maturité face à cette transition numérique varient d’une structure à l’autre, selon leur capacité à changer de culture et d’organisation, et selon leurs compétences numériques à disposition. Exploiter les données d’une plateforme en cloud, utiliser les objets connectés, des outils d’analyse de données intelligentes, appréhender le big data, etc. sont autant d’actions et de termes liés à la transformation numérique. Pour autant, choisir les outils et les équipements nécessaires à cette mue comme opérer la gestion du changement n’est pas si évident pour les très petites structures (TPE) plus ou moins bien préparées, et dont les moyens sont limités. Force est de constater que les grandes structures, telles que les centres hospitaliers vétérinaires (CHV), sont avancées dans leur transition numérique, comme Frégis à Arcueil, dans le Val-de-Marne, doté de technologies de pointe, et Massilia à Marseille, dans les Bouches-du-Rhône (voir page 45). Concernant la communication, par exemple, le site web de Frégis a été créé il y a cinq ans et demi. Pour Cyrill Poncet, l’un des associés du CHV, « c’est un support de communication pour nos vétérinaires et pour les clients, qui peuvent s’informer sur la maladie de leur animal. L’objectif est de leur donner une information de qualité et de contrer ce fléau d’informations erronées sur Internet ». Aussi, Frégis est présent sur les réseaux sociaux (YouTube, Facebook, entre autres).Toutefois, les confrères qui exercent dans d’autres conditions, notamment ceux offrant leurs services vétérinaires à domicile, ont également pris en main leur mutation digitale, comme le démontre la structure Vetalia (voir page 44).

Une transition numérique réussie devrait apporter à une structure vétérinaire plusieurs atouts, à commencer par une image classique et digitale renforcée ; une communication optimisée, au travers des réseaux sociaux, avec l’aide également d’un extranet client et/ou d’un intranet partagé entre les collaborateurs de la clinique ; une relation client plus efficace, incluant la prise de rendez-vous sur Internet, le rappel de vaccins par e-mail, etc. C’est aussi un moyen de se démarquer de la concurrence, un gain de productivité pour l’entreprise qui se recentre sur son cœur de métier, gérant les tâches administratives et marketing avec des outils plus performants (numérisation des données administratives, logiciel de gestion de la relation client ou GRC, etc.).

À plus grande échelle, le gouvernement a lancé, il y a quatre ans, son programme d’aide à la transition numérique pour les TPE et les petites et moyennes entreprises (PME), afin qu’elles s’approprient ces outils digitaux et qu’elles gagnent en compétitivité (encadré ci-contre).

Clarisse Burger

QUELQUES CHIFFRES DU BAROMÈTRE NUMÉRIQUE


•Plus de 1 Français sur 2 déclare disposer d’un smartphone ;

•6 personnes sur 10 mobilisent Internet comme source d’information en amont d’un achat ;

•52 % des personnes utilisent leur mobile pour naviguer sur Internet et 44 % téléchargent des applications ;

•35 % de la population est équipée d’une tablette ;

•89 % : l’équipement en téléphonie mobile dépasse de 3 points celui en téléphonie fixe ;

•51 % des Français écoutent ou téléchargent de la musique sur Internet ;

•35 % regardent des vidéos sur le Web et 37 % la télévision ;

•52 % participent aux réseaux sociaux ;

•83 % craignent pour la protection de leurs données personnelles et le besoin de confiance se ressent notamment dans le domaine de la santé.

Source : Conseil général de l’économie, baromètre numérique 2015.

LE PROGRAMME TRANSITION NUMÉRIQUE

Lancé par le gouvernement en 2012, le programme Transition numérique aide les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME) à s’approprier les nouveaux usages numériques et à intégrer ces technologies pour améliorer leur compétitivité. Il s’appuie sur un maillage territorial de plusieurs centaines de conseillers au numérique du secteur public et des consultants du secteur privé. Ces experts venant des chambres de commerce et d’industrie (CCI), des chambres de métiers et de l’artisanat et des espaces publics numériques informent les TPE et les PME sur les bonnes pratiques digitales.

TROIS QUESTIONS À  LAURENT PONTEGNIER 

« ON ÉCONOMISE UN CINQUIÈME DE SON TEMPS AVEC DES OUTILS DIGITAUX ADAPTÉS »

Comment peut-on définir la transition numérique ? Où en sont aujourd’hui les entreprises françaises sur ce point ?
Elle regroupe l’ensemble des moyens numériques permettant d’accroître la productivité et la compétitivité d’une organisation, quelle que soit sa taille. Nos entreprises sont plutôt en retard par rapport aux autres pays européens, spécialement les très petites entreprises (TPE) au sein desquelles nous constatons une barrière d’ordre générationnelle. L’autre barrière est organisationnelle. Souvent les dirigeants de TPE sont seuls et n’ont pas les moyens de se faire aider.
Pourtant, l’enjeu est de taille puisque l’on constate que l’on économise en moyenne un cinquième de son temps lorsque l’on s’équipe d’outils digitaux performants et adaptés à son entreprise.

Quels sont les enjeux de cette révolution technologique ?
Une organisation présente sur Internet et/ou sur les réseaux sociaux parvient beaucoup mieux à recruter, car elle envoie un message de modernité et de dynamisme. Et, contrairement à des idées qui perdurent, le budget n’est plus un frein. Il y a encore cinq ou six ans, le passage au numérique imposait de s’équiper d’ordinateurs et de logiciels coûteux. Aujourd’hui, on ne paie que ce que l’on consomme, puisque la plupart des services informatiques sont payables à l’unité. Seule l’étape de la migration qui vise à faire passer les données du format papier au format numérique peut être un peu coûteuse, mais elle est compensée par le gain de productivité. Par ailleurs, avec la profusion d’acteurs dans le secteur de l’édition de logiciels, il est facile de trouver une solution adaptée à ses besoins.

Quelles sont les clés pour réussir sa mutation numérique ?
Pour mener à bien la transition numérique, il vaut mieux se faire aider. En effet, les offres sont nombreuses et parfois trompeuses et, comme dans beaucoup d’autres domaines, les entreprises peuvent avoir tendance à se suréquiper. Face à cette myriade d’offres, il est important de privilégier des marques fortes, plus pérennes que les nouveaux venus. Quant à la sécurité des données, il est préférable d’opter pour des solutions hébergées en France. Enfin, avant de signer un contrat, il est primordial d’avoir réalisé un audit de ce que l’on souhaite informatiser, afin de choisir une solution parfaitement paramétrée à ses besoins.

Propos recueillis par Françoise Sigot

« NOTRE TRANSITION NUMÉRIQUE EST LE FRUIT D’UNE VOLONTÉ AFFIRMÉE »

Au sein de notre structure, c’est une vraie question. En lançant un service vétérinaire à domicile qui fonctionne 24 h/24, nous ne pouvions pas ignorer que le numérique aurait une place très importante dans notre quotidien. Notre transition numérique s’articule autour de trois points. D’abord, la création d’outils nous permettant d’organiser notre activité. En effet, nous avons fait développer un logiciel de gestion de la relation client (GRC) afin de gérer l’ensemble de nos interventions, depuis le coup de téléphone du client jusqu’à l’envoi des comptes rendus d’interventions à celui-ci et à son vétérinaire traitant. Ce logiciel nous permet également d’adresser les factures par e-mail et d’encaisser les règlements via un service de paiement en ligne. Le deuxième point concerne notre présence sur Internet et les réseaux sociaux. Étant dépourvus d’enseigne, cette présence est décisive pour nous faire connaître. Nous avons donc investi dans un site internet et l’un des associés assure un rôle de community manager.
Pour ce qui est de la partie administrative de notre activité, le numérique est très présent. Nous sommes en train de rassembler l’ensemble des données administratives dans un seul logiciel qui nous permettra d’accéder à nos données partout où l’on se trouve. En interne, cette organisation a été plutôt bien acceptée par nos collaborateurs. Ceux qui peuvent, au départ, se montrer réticents sont vite séduits par ces nouveaux outils qui facilitent leur travail.
S’agissant de la relation avec les clients, elle est aussi impactée par cette transition puisque nos vétérinaires arrivent chez eux avec un ordinateur – il y a encore quelques années, ils avaient même ordinateur et imprimante –, ce qui peut surprendre… De moins en moins, car les clients également apprécient de recevoir leur facture sur leur portable, de ne pas avoir à poster un chèque et, peut-être plus encore, de savoir que leur vétérinaire est destinataire lui aussi d’un compte rendu précis de notre intervention.
Quant au volet du matériel, nous avons des outils performants et nous intervenons dans des territoires où la couverture en réseau est plutôt satisfaisante. Nous avons quand même investi dans un système nous permettant de travailler, même si le réseau est défaillant. La transition numérique est assez naturelle au sein de notre structure. C’est aussi le fruit d’une volonté affirmée, car nous sommes convaincus que le marché vétérinaire doit suivre ce mouvement.

Propos recueillis par Françoise sigot

Christophe Le Dref Cofondateur de Vetalia, vétérinaire associé et président de l’Association des vétérinaires à domicile (Avad)

Structure

Service d’urgences vétérinaires Vetalia (Paris et région parisienne) : 11 vétérinaires, dont 3 associés, et 7 vétérinaires régulateurs et conseils.

Défi numérique

Opérer la transition numérique d’une structure de vétérinaires à domicile, en pleine évolution.

Solutions

- Développement d’un logiciel de relation client (compte rendu d’intervention, réponse téléphonique, vétérinaire, paiement en ligne, etc.).

- Mise en place d’une base de données accessible de tous points.

- Présence sur le Web.

« CELA REPRÉSENTE UN COÛT IMPORTANT, TOUTEFOIS RENTABLE »

Nos cliniques vétérinaires à Marseille sont informatisées depuis des années avec un logiciel métier qui, aujourd’hui, est un peu à la peine. Pour Massilia, nous allons opter pour GmVet, un logiciel SaaS1 déjà testé et adopté par plusieurs de nos confrères du groupe VetSet, dont je fais partie (20 cliniques et deux centres hospitaliers vétérinaires répartis sur le territoire national). Les logiciels métiers sont le cœur de notre activité vétérinaire, des outils de gestion et maintenant de communication nécessaires mais plus suffisants au regard des nouveaux enjeux de notre profession. Nous disposons d’un site internet pour Massilia qui a un peu plus de trois ans mais qui ne nous satisfait plus. Nous avons fait appel il y a six mois à une société de webmarketing qui prépare notre futur site et qui prend en charge la totalité de notre communication, tant digitale que classique. Elle a aussi pour tâche de mettre en place notre intranet, afin que nos salariés et nos collaborateurs puissent bénéficier des protocoles et des processus que nous avons élaborés et pour que chacun contribue à enrichir la base de données.
Nous souhaitons également aller vers la prise de rendez-vous en ligne en intégrant cette fonctionnalité dans notre futur logiciel métier, pour désengorger notre secrétariat et enfin être disponible. À travers cette démarche digitale, notre objectif est de gagner en efficacité afin de pouvoir concentrer nos ressources humaines sur le client : c’était la base de notre certification ISO 9001. Davantage de numérique signifie, pour l’ensemble des collaborateurs de nos structures, moins de tâches administratives, donc plus de temps pour notre cœur de métier. Tout cela représente un coût important, que nous pensons toutefois rentable. Et, pour l’instant, le retour sur investissement calculé est largement positif. Nous poursuivons notre évolution sur la voie de la transition digitale.

Propos recueillis par Françoise sigot

1 Software as a service.

Philippe Dhalmann Vétérinaire associé au CHV Massilia (Marseille, Bouches-du-Rhône).

Structure

Centre hospitalier vétérinaire Massilia (groupe Animédis) à Marseille (Bouches-du-Rhône) : 9 vétérinaires et 2 confrères intervenants.

Défi numérique

Gagner en efficacité en opérant une refonte des logiciels métiers et du site internet.

Solutions

-Logiciel métier en mode SaaS (avec, entre autres, prise de rendez-vous en ligne).

-Mise en place d’un intranet et d’outils de communication avec l’aide d’un prestataire.

« NOTRE EXPÉRIENCE DE L’ÉLEVAGE CONNECTÉ S’EST HEURTÉE À DES INCOHÉRENCES »

Le point de départ de la transition numérique se situe dans notre clinique à la fin des années 1980. À cette époque, nous avons informatisé la comptabilité avec un logiciel “maison”. Puis, nous avons acheté un logiciel de gestion quelques années après. Aujourd’hui, nous avons automatisé presque tout ce qui peut l’être dans notre pratique. Les tâches administratives, bien sûr, de la comptabilité aux ordonnances. Sur notre cœur de métier, nous disposons d’une radio numérique et nous bénéficions d’une interface nous permettant de réaliser une transmission automatisée des résultats d’analyses directement dans le fichier client. En canine, le rappel des vaccins se fait par e-mail. Nous gérons, par ailleurs, en direct notre site internet, ainsi que notre page Facebook, même si cela nous prend du temps, car nous essayons d’être réactifs et de l’alimenter régulièrement. Nous avons notamment mis en place sur cette page les “happy mondays”, qui permettent aux clients de réserver leurs croquettes le lundi et de bénéficier de tarifs préférentiels.
Mais il subsiste au sein de notre clinique des opérations non automatisées, pour plusieurs raisons. D’abord, parce que beaucoup de nos clients éleveurs ne sont pas encore prêts à recevoir leur facture ou les comptes rendus de visites par e-mail, soit parce qu’ils ne sont pas connectés, soit parce que cela ne fait pas partie de leur culture. En canine, en revanche, nous parvenons petit à petit à installer plus de relations par e-mail avec notre clientèle. L’autre motif du maintien d’opérations non informatisées réside dans le fait que l’ensemble du département du Cantal n’est pas couvert par la 3G et encore moins par la 4G, donc il faudrait envisager des systèmes embarqués autonomes, si nous souhaitions pousser plus loin l’informatisation, ou nous connecter chez les éleveurs, mais cela serait plus compliqué à gérer que de laisser une ordonnance au client et de la saisir ensuite sur informatique, une fois à la clinique. Enfin, il subsiste aussi des freins technologiques et liés à notre façon de pratiquer. Ainsi, nous avons tenté l’expérience de l’élevage connecté, mais nous nous sommes heurtés à une somme d’incohérences entre le logiciel et nos pratiques, donc nous avons très vite jeté l’éponge. Même si cette expérience a été décevante, nous souhaitons aller plus loin en matière de transition numérique, mais selon notre rythme et celui de nos clients.

Propos recueillis par Françoise sigot

Éric Février et Jacques Fleury Vétérinaires associés à la clinique du Saint-Laurent (Saint-Mamet- la-Salvetat, Cantal)

Structure

Clinique vétérinaire du Saint-Laurent à Saint-Mamet- la-Salvetat (Cantal) : 6 vétérinaires et 2 ASV.

Défi numérique

Automatiser et informatiser toutes les opérations (pouvant l’être) d’une clinique mixte.

Solutions

- Numériser la relation client (système de rappel de vaccins par e-mail, compte rendu de visite, etc.).

- Optimisation du site internet et de la page Facebook (lancement des “happy mondays”).

- Systèmes embarqués autonomes adaptés au Cantal, sans accessibilité 3G et 4G garantie.

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