Et si la psychologie du maître était intégrée aux consultations vétérinaires comportementales ?

Le vétérinaire comportementaliste connaît les besoins éthologiques de l’animal, mais il n’est pas formé à la psychologie humaine, alors que le propriétaire joue un rôle essentiel dans la thérapie », explique Sarah Jeannin. Cette dernière assiste depuis trois ans aux consultations comportementales de l’École vétérinaire d’Alfort, dans le cadre de sa thèse d’éthologie. Cette expérience s’est révélée positive, au point que Thierry Bedossa, praticien à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), souhaiterait collaborer de façon permanente avec Sarah Jeannin.

Prendre en compte les besoins de l’animal et du propriétaire

Inspirée des thérapies familiales systémiques, cette méthode de prise en charge tient compte de l’environnement physique et relationnel de l’animal. Un problème comportemental chez le chien peut en effet être lié à son tempérament, à sa santé ou à des séquelles de mauvais traitements dans le passé, mais il peut également l’être à ses conditions de vie avec ses propriétaires. Ceux-ci aiment leur animal, mais ignorent souvent ses besoins. Ils peuvent avoir des exigences trop élevées par rapport à son degré de développement (il doit être propre rapidement, par exemple). Ils ont également des interprétations erronées de son comportement, telles que « Il se venge », or aucune étude scientifique ne montre que le chien peut mettre en place un scénario de vengeance. Ils ont encore des projections sur l’animal en tant qu’objet de substitution d’un enfant ou seul souvenir vivant d’un parent décédé. Enfin, le chien peut être un soutien dans une période de mal-être (maladie, deuil, etc.). « Beaucoup de personnes vues en consultation sont elles-mêmes stressées, anxieuses ou traversent des moments difficiles, et il convient de repérer cette souffrance psychologique », explique Sarah Jeannin. En effet, cela peut avoir des répercussions importantes sur la qualité de vie de l’animal, soit car le maître est moins à l’écoute de ses besoins, soit par contagion émotionnelle (empathie), car le chien est très sensible à l’état émotionnel des humains qui lui sont proches. Ainsi, il est important d’aider le propriétaire à prendre conscience de ses représentations afin de changer sa vision et de mieux répondre aux besoins de son animal.

Tempérer le discours et rassurer, sans juger

Lors de la consultation, il est important de ne pas le juger, mais de l’écouter afin de déterminer ses erreurs et de lui expliquer avec bienveillance comment les corriger. La présence du psychologue instaure ce cadre rassurant. Si certains propriétaires sont d’abord gênés, la grande majorité d’entre eux se sent en confiance et parle plus facilement, de leur animal et d’eux-mêmes. Ils comprennent qu’ils sont dans un espace de parole libre, et qu’ils peuvent se confier sur leur sentiment d’impuissance face au comportement de leur animal, parfois de culpabilité, de découragement ou de colère.

Le psychologue observe la personne, son état émotionnel, ses attitudes envers le chien, le vétérinaire, etc. Il peut alors tempérer le discours du praticien en fonction de la personnalité et de la sensibilité du propriétaire. Il peut, par exemple, expliquer que les conseils délivrés sont des recommandations et non des reproches, et cela évite à la personne de se braquer. « L’application des conseils nécessite des changements d’habitudes et des bouleversements dans la vie du propriétaire, c’est pourquoi il est essentiel qu’il se sente soutenu dans cette démarche. L’écoute empathique, qui prend en compte son vécu et ses attentes, peut l’aider à passer du sentiment de culpabilité à une prise en charge responsable de son animal, afin de retrouver une relation harmonieuse avec lui. » Enfin, si besoin, le psychologue peut également, après la consultation et en lui parlant seul à seul, orienter la personne vers un psychothérapeute ou un médecin psychiatre qui pourra l’aider.
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