Xavier Lévy : « Nous manquons de compétences en génétique » - La Semaine Vétérinaire n° 1697 du 23/11/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1697 du 23/11/2016

ENTRETIEN

PRATIQUE CANINE

L'ACTU

Auteur(s) : PROPOS RECUEILLIS PAR SERGE TROUILLET 

« Entre les généticiens fort compétents mais peu écoutés et le monde de l’élevage, qui exerce par essais et erreurs, les vétérinaires seraient tout à fait capables, estime Xavier Lévy (A 03), de se poser en chefs d’orchestre de la gestion des maladies génétiques. »

Quelle est la vocation du Geres ?

Le groupe d’étude en reproduction, élevage et sélection (Geres) regroupe l’essentiel des grands acteurs en France de la reproduction, de l’obstétrique, de l’élevage et de sa sélection génétique. Comme tous les groupes d’étude de l’Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie (Afvac), sa vocation est d’informer et de former les vétérinaires. Dans un esprit de confraternité. Pour chacun de ses membres, partager ses compétences de spécialiste, ce n’est pas les perdre, mais au contraire s’obliger à en acquérir de nouvelles, qui continueront à faire la différence.

Notre démarche, à cet égard, ne procède pas d’un corporatisme de défense de la profession. Elle vise à contribuer, par tous les moyens permettant le transfert à nos confrères de connaissances nouvelles, à ce que les animaux soient bien soignés. Nous restons également dans notre rôle de spécialiste quand nous invitons à prendre en considération, dans la prise de décision, quelle qu’elle soit, certains points techniques.

Qu’ont apporté les nouvelles règles1 pour l’élevage et la vente des chiens et des chats ?

Les élevages sont en phase de professionnalisation, même si cela reste encore familial : deux tiers des éleveurs français ne font pas plus d’une ou deux naissances par an, parfois trois. Cependant, l’activité demeure précaire. La nouvelle réglementation, en vigueur depuis le 1er janvier 2016, porte une vraie promesse, celle de la hausse du niveau professionnel des élevages.

À l’inverse, elle risque de rebuter de nombreux éleveurs amateurs qui faisaient une ou deux portées par an pour la passion d’une race, en raison des obligations auxquelles ils sont désormais soumis, notamment celle de se déclarer éleveurs. Cela peut aussi conduire à privilégier les éleveurs multiplicateurs, c’est-à-dire ceux qui font de l’élevage pour faire naître du chien et le vendre, sans forcément prendre en considération tous les caractères de sélection.

Quel bilan faites-vous des visites d’élevage ?

De nombreux vétérinaires ont souhaité se former pour réaliser ces visites rendues obligatoires par l’arrêté du 3 avril 20142. C’est heureux car, longtemps, la profession s’est désintéressée de l’élevage, dans toutes ses composantes. Elle ne peut pas se permettre de perdre ces activités. Avec cette redéfinition des règles logistiques, administratives et de suivi des élevages, le vétérinaire a été replacé au centre d’un dispositif qui induit une veille sanitaire et un réseau de bonnes pratiques. Il doit y rester.

Nos formations, au Geres, ont ainsi été conçues pour lui permettre d’effectuer efficacement sa visite dès le lendemain : vérifier des points clés, juridiquement obligatoires et sanitairement fortement recommandés, rédiger un rapport simple et concis, aider à la rédaction d’un règlement sanitaire. Nous travaillons dorénavant à éditer un guide de bonnes pratiques, qui sera distribué gratuitement à nos confrères.

Comment expliquez-vous l’engouement autour de l’obstétrique ?

Cette thématique prospère en effet avec la professionnalisation de l’élevage. Les incidences économiques des difficultés rencontrées lors de la reproduction, pour des animaux de sélection qui valent cher, sont prégnantes. La dimension sentimentale, également, joue de plus en plus chez des particuliers attachés à ce que tout se passe bien quand ils font une portée. Il y a en quelque sorte une boboïfication de l’obstétrique. Et les vétérinaires, pour cet accompagnement, manquent globalement de compétences. Nous envisageons d’organiser des roadshows en 2017 sur « comment faire un suivi de chaleur », « comment dater une gestation », entre autres thèmes. Nous communiquerons aussi sur des pathologies mal connues, par exemple le syndrome d’hypertension intra-abdominale mis en évidence au centre de reproduction des carnivores du Sud-Ouest (Crecs) en 2015, que l’on rencontre fréquemment chez les races brachycéphales avec une mortalité aiguë en fin de gestation.

Qu’en est-il de la sélection génétique ?

Là encore, les vétérinaires, et je m’inclus dans le nombre, manquent de compétences en génétique. Qu’il s’agisse de lire un pedigree, de connaître les maladies génétiques dans les différentes races, de faire une analyse critique d’un test génétique. Dans ce secteur où affluent de toutes parts les propositions mercantiles, les éleveurs sont ainsi livrés à eux-mêmes.

Pourtant, entre les généticiens fort compétents mais peu écoutés et le monde de l’élevage, qui exerce par essais et erreurs, les vétérinaires seraient tout à fait capables de se poser en chefs d’orchestre de la gestion des maladies génétiques ; d’avoir un raisonnement, une méthodologie, une procédure. L’Afvac s’est emparée de cette notion pratique et mettra en place une formation dédiée en 2017-2018.

Où en est la stérilisation par vaccination ?

Ce qui est le présent et l’avenir, en la matière, c’est l’implant de desloréline pour la contraception médicalisée.Typiquement, c’est ce que l’on devrait fortement recommander pour une femelle boxer dès la période prépubère. Cette contraception de longue durée, qui est réversible, est en effet une solution extrêmement élégante pour ces chiens qui souffrent souvent de complications après une stérilisation chirurgicale. Quant à la vaccination, à propos de laquelle les Anglo-Saxons sont particulièrement à l’œuvre, elle a quelques résultats chez le chien, beaucoup moins chez le chat. Elle ne figure ni dans le présent du vétérinaire ni même dans un futur proche.

Le pathologique entre-t-il dans votre champ d’intérêt ?

Bien sûr. Si le Geres est toujours associé à la reproduction assistée, il se préoccupe tout autant de la maladie de la prostate et des tumeurs mammaires, pour ne citer que ces affections. Il fait le lien entre tous les spécialistes, qu’il s’agisse des imageurs, des radiothérapeutes ou des internistes, entre autres, pour proposer une vue presque généraliste de la reproduction et de la pathologie de la reproduction. Cette approche synthétique lui permet d’offrir le meilleur aux propriétaires. C’est de cette collaboration entre les uns et les autres que sont issus les progrès de notre discipline. Au service du vétérinaire généraliste.

1 Voir La Semaine Vétérinaire n° 1646 du 16/10/2015, pages 10 et 11.

2 Voir La Semaine Vétérinaire n° 1584 du 10/5/2014, pages 14 et 15.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur