De la nécessité du disciplinaire - La Semaine Vétérinaire n° 1700 du 13/12/2016
La Semaine Vétérinaire n° 1700 du 13/12/2016

ACTU

L a chambre de discipline de l’Ordre des vétérinaires a la difficile tâche de régler les litiges relatifs à l’éthique de la profession. La responsabilité des vétérinaires ne peut être tranchée que par les juridictions pénales ou civiles, mais l’action disciplinaire, elle, dispose d’une juridiction qui lui est propre et qui est organisée selon les grands principes du droit et notamment le double degré de juridiction, le principe du contradictoire, le respect de la présomption d’innocence, etc. Présidée par un magistrat mais composée de professionnels, cette chambre est saisie le plus souvent par des particuliers ou par des professionnels membres des ordres régionaux qu’ils président. L’avantage d’une telle composition paritaire est de faire en sorte que le droit soit éclairé par la pratique que seuls détiennent ceux qui, dans leur exercice, sont confrontés à la réalité des soins apportés aux animaux.

L’on pourrait penser que l’institution d’une telle juridiction d’exception serait à contre-courant de l’histoire qui l’a créée mais, en définitive, la pression mise sur la prévention incite à penser que rappeler aux vétérinaires la norme applicable à leur activité, comme en donnent l’occasion les litiges dont en sont saisies les chambres régionales et nationale, est incitative de l’excellence vers laquelle doit tendre l’exercice vétérinaire dans son ensemble, d’autant plus que les missions qui sont confiées aux vétérinaires concernent de très près la protection de la santé publique.

Sur le plan strict du comportement et de son éthique, l’on peut aussi se demander si l’approche individuelle ne devrait pas suffire. On parle tellement de l’école de la République que l’on s’étonne de ce que tout le monde ne connaisse pas la règle et ne l’applique pas de la même manière. Mais, en réalité, la difficulté est la règle.

La règle de droit est simple, la morale l’est moins qui appartient, à travers l’éthique, au droit flou.

C’est ainsi que les statistiques, dont le langage est celui des chiffres, permettent de dire que, de moins en moins, les affaires pendantes concernent la confraternité, mais, de plus en plus, la traçabilité dont le vétérinaire est l’un des acteurs. Si le nouveau code veille toujours au maintien de la confraternité, il a poursuivi une évolution historique constante vers l’accroissement de la garantie de qualité du service offert par la profession de vétérinaire au public et à l’État.

Le monde a évolué, le métier aussi, dont les exigences sont importantes et la technicité difficile à cerner. Les moyens de communication mis à disposition sont une tentation de déborder la publicité autorisée et restreinte, au point de poser le problème de savoir si elle est acceptable. L’arrivée de nombre de vétérinaires étrangers qui n’ont pas eu la formation dispensée sur le territoire national peut poser problème aux concurrents, qui se voient contraints de respecter la norme qu’ils ont l’avantage de connaître. Il s’en déduit que, plus que jamais, la déontologie a besoin d’être respectée, mais aussi d’être connue.

Il suffit de rappeler combien la perte de repères entre professions libérales et professions commerciales, exercice indépendant et entreprise, exercice personnel et exercice en groupe, exercice individuel et exercice en société, doit être perpétuellement réajustée.

Il dépend de la déontologie d’apporter des précisions et des changements sur les lieux d’exercice, sur les notions de domicile professionnel et sur les établissements vétérinaires. C’est ainsi que le nouveau Code de déontologie développe le cas des établissements de soins vétérinaires, cabinets, cliniques, centres hospitaliers et centres de vétérinaires spécialistes, pour lesquels un arrêté d’application apporte des éclaircissements, des précisions et d’incontestables progrès quant à leurs cahiers des charges respectifs, non seulement en matière d’équipements, mais surtout de ressources humaines compétentes.

De même, il est notable que se développe fortement la liberté d’expression et de communication du vétérinaire, parallèlement à l’accroissement de sa responsabilité professionnelle. C’est dire combien la liberté de communication emprunte à la liberté d’expression, mais aussi combien celle-ci se mesure à la déontologie.

Le vétérinaire est libre de communiquer, mais en échange d’une obligation d’informer de façon complète, honnête et appropriée.

Il doit communiquer en liberté mais décemment, car il appartient à la catégorie des professions libérales, et ne peut pratiquer sa profession comme un commerce en vantant l’objet de sa prestation. La nécessaire adaptation de cette liberté à la réalité a déjà suscité des interrogations et des incompréhensions, mais le nouveau code est venu mettre un terme à une période de flottement qui, compte tenu de la rigueur des textes, commandait d’interdire ce qui ne paraissait pas nuire à la profession et présentait un réel décalage par rapport au vent libertaire qui s’élève en Europe.

Comme le rappelait le président de l’Ordre dans son discours de vœux de l’année 2016, un terme connu mais davantage utilisé devient un maître-mot, c’est le mot respect. L’entendre, c’est déjà l’appliquer : respect de soi, des animaux, du client, du public, de l’État. Respect de sa profession, y compris de son Ordre.

Le questionnement éthique du professionnel qu’est le vétérinaire est quasiment permanent. Si la règle éthique est moins précise que la règle juridique, elle est aussi complexe, puisqu’il faut appliquer à la fois la transparence et le secret, l’indépendance et le respect, tout en assumant et revendiquant sa pleine responsabilité.

À une époque où l’on ne traite aucun événement dramatique sans cellule de crise, il ne faut pas s’étonner que toutes les professions libérales, y compris celle des vétérinaires, se voient dicter nombre d’attitudes et définir autant de règles. Le rêve serait de n’en pas avoir mais, cela étant, même en présence de la règle, il faudra d’autres modes que la norme pour apprendre à communiquer, le comportement individuel fruit de l’éducation et de la place dans la société peut se voir affecté d’un certain nombre de correctifs et l’on peut toujours se dire que là où le disciplinaire s’exerce, c’est là où elle existe mais que si elle a échoué, elle n’en a pas moins fixé le prix de la qualité. Il faut alors que se rencontrent dans un lieu idéal d’exercice le professionnel et le maître de l’animal et qu’ils se comprennent au-delà de l’affectif qui préside à toute vie partagée avec l’animal, comme deux êtres humains qu’ils sont avant d’être respectivement spécialiste et usager de la profession.

ANNE-ÉLISABETH CRÉDEVILLE

est conseiller doyen honoraire à la Cour de cassation et présidente de la Chambre nationale de discipline.
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