ACTU
Depuis mon enfance, il me semble n’avoir jamais été entourée que de personnes aimant les animaux. Bien sûr, devenue vétérinaire et évoluant au sein d’un cercle d’amis vétérinaires, il ne pouvait en être autrement.
Quel choc lorsque, à la faveur d’un déménagement, j’ai fait la connaissance de personnes profondément indifférentes, voire hostiles aux animaux. J’ai alors pris conscience du fait qu’il est possible d’avoir peur, voire très peur de ces compagnons différents, si on ne sait pas comment se comporter en leur présence.
Je comprends pourquoi j’ai ressenti le besoin d’élever mes filles en présence d’un ami animal. N’est-il pas important d’apprendre d’autres formes de communication, notamment celle non verbale, non gestuelle, qui passe par le regard ? On dit que la parole a été donnée à l’homme pour cacher sa pensée. Le regard n’a-t-il pas été donné à l’animal pour exprimer la sienne ?
La relation entre animaux est franche, simple et directe. Ils ne connaissent pas le pire défaut humain, l’hypocrisie.
Dans son numéro de juillet 2016, la revue trimestrielle de la Fondation droit animal, éthique et sciences (LFDA) cite Octave Mirbeau : « Les chiens, qui ne savent rien, comprennent ce que nous disons, et nous, qui savons tout, nous ne sommes pas encore parvenus à comprendre ce qu’ils disent. » J’essaie alors de comprendre comment il est possible d’aimer l’homme au point d’en détester les autres êtres vivants.
« Vétérinaire, un beau métier », dit-on souvent, un métier rêvé par tant d’enfants. Mais finalement, si l’animal ne vaut rien, sommes-nous utiles ? Oui, car la frontière entre l’homme et l’animal est de plus en plus fine. Nous avons, cette année, établi des liens solides entre anesthésistes vétérinaires et “humains”, des médecins sont intervenus dans le congrès européen d’anesthésie vétérinaire à Lyon et une session d’anesthésie vétérinaire a été ouverte au congrès de la Société française d’anesthésie et de réanimation. Aucune frontière ne sépare nos deux médecines !
Le modèle animal de laboratoire est de plus en plus critiqué car il ignore les facteurs de comorbidité, et le sacrifice animal n’en vaut peut-être pas toujours la peine. En revanche, nous avons beaucoup à apprendre de nos patients animaux (ceux qui présentent des pathologies spontanées). La recherche clinique est donc essentielle pour nous permettre de répondre à nos interrogations quotidiennes de praticiens vétérinaires, et ces questionnements sont sans doute communs à ceux des médecins. Ils doivent aussi alimenter la recherche fondamentale.
Diverses questions me viennent à l’esprit. Quelle valeur notre société accorde-t-elle aux animaux ? Ceux que nous mangeons, mais aussi ceux avec lesquels nous travaillons et ceux qui nous offrent leur amitié, ou, peut-être, à qui nous imposons la nôtre ! À quel point les exploitons-nous ? L’homme est-il vraiment en haut de la pyramide de l’évolution ? Qui détruira notre planète, mettant ainsi fin à toute forme de vie : l’homme ou l’animal ? Sur quoi repose notre hiérarchie des espèces ?
Nos intelligences sont différentes, pourquoi les comparer ? Pourquoi ne pas définir et respecter la place de chacun, homme et animal, et profiter de nos interactions, de nos dépendances ?
Dans un éditorial du Point, le 17 octobre 2013, Matthieu Ricard écrit que « lorsqu’une société accepte comme allant de soi la pure et simple utilisation d’autres êtres sensibles au service de ses propres fins, n’accordant guère de considération au sort de ceux qu’elle instrumentalise, on ne peut parler que d’égoïsme institutionnalisé ». C’est ce qu’exprimait Gandhi dans sa célèbre maxime : « La grandeur et le développement moral d’une nation peuvent se mesurer à la manière dont elle traite ses animaux. »
Au xviie siècle, dans son Discours de la méthode, publié en 1637, Descartes écrivait que « le plus grand préjugé de notre enfance est de croire que les bêtes pensent ». Le siècle suivant, Jeremy Bentham lui répondait que « the question is not “Can they reason?”, nor “Can they talk?”, but “Can they suffer?” »
La reconnaissance de la douleur chez l’animal lui a servi d’ascenseur social et l’animal est aujourd’hui reconnu comme un être sensible, mais pas encore par tous, car encore faut-il en avoir les moyens ! Les attitudes et le droit (directive 2010/63/UE, article 515-14 du Code civil) évoluent en faveur de la cause animale, comme ils ont évolué envers le racisme et le sexisme, mais tout aussi lentement.
Il suffit d’observer les événements actuels pour comprendre que nous ne sommes pas si parfaits, pas si forts. Apprendre le respect de la vie, n’est-ce pas apprendre le respect de toutes les vies, sans considération de race, de religion… ou d’espèce ?
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KARINE PORTIER (A 96)
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