DOSSIER
Entre épidémies et fraudes, ces dernières années ont été animées par des scandales alimentaires qui ont fait l’actualité. La réglementation européenne appliquée aux contrôles officiels en matière de sécurité des aliments tend à évoluer vers davantage d’efficacité et de transparence, de même que le rôle du vétérinaire officiel.
En avril 2014, des discussions ont été engagées au niveau européen afin de lancer la révision du règlement (CE) 882/2004 relatif aux contrôles officiels menés d’un bout à l’autre de la chaîne agroalimentaire. Selon ce texte, les États membres, dont la France, sont responsables de son application sur leur territoire et aux frontières extérieures de l’Union européenne, afin que les animaux et les produits destinés à la consommation humaine soient conformes à cette législation. En septembre 2016, les eurodéputés de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire (Envi) adoptaient des propositions visant à renforcer ces contrôles officiels effectués de la fourche à la fourchette. Afin de remédier aux manquements constatés, de nouvelles dispositions ont pour objectif de garantir que les citoyens européens achètent et consomment des produits sains, d’améliorer la santé des consommateurs et de prévenir les crises alimentaires. « Cette législation définira des principes généraux clairs et communs à tous les secteurs de la chaîne alimentaire. Elle était attendue depuis longtemps, au vu de la complexification de la chaîne agroalimentaire. L’équipe du Parlement, le Conseil et la Commission se sont employés à rendre les contrôles plus efficaces, moins bureaucratiques et moins coûteux pour les opérateurs », a expliqué Giovanni La Via (Parti populaire européen ou PPE, Italie), président de la commission Envi. Le 19 décembre 2016, le Conseil a adopté sa position en première lecture sur la base du compromis conclu avec le Parlement européen. Cette décision « ouvre la voie à l’adoption définitive du règlement par le Parlement européen lors d’une prochaine session plénière », prévue entre le 13 et le 16 mars prochains. « Les nouvelles règles aideront à combattre les fraudes et les scandales alimentaires, renforçant ainsi la confiance des consommateurs. Nous voulons que nos citoyens fassent confiance à nos régimes de contrôle et soient rassurés par la qualité de ce qu’ils mangent », a déclaré Gabriela Matecná, ministre slovaque de l’Agriculture et du Développement rural et présidente du Conseil. Si l’objectif affiché est de protéger les consommateurs, cette réforme est aussi l’occasion de placer le vétérinaire au cœur de ce dispositif.
Dans un rapport1 de 2013 sur le fonctionnement global des contrôles officiels de la sécurité alimentaire, de la santé animale et du bien-être des animaux, la Commission européenne estime que les États membres, dont la France, assurent un niveau satisfaisant de mise en œuvre des contrôles officiels sur la chaîne alimentaire, en particulier en ce qui concerne la santé animale. Des axes d’amélioration restent cependant nombreux. En effet, sur la question de l’identification électronique des petits ruminants, elle note une disparité importante entre les États membres dans la mise en œuvre de ce système. Des manquements ont en effet été constatés concernant l’utilisation de l’identification électronique à des fins de gestion et de lutte contre les maladies, certains pays étant en avance sur d’autres sur son emploi. « L’utilisation de bolus électroniques s’avère plus fiable sur le terrain que les marques auriculaires, mais exige des compétences spécifiques et une assistance technique, qui a été fournie dans certains des États membres concernés », précise la Commission. Même constat en ce qui concerne la rage, où des audits menés dans un certain nombre de pays ont démontré des faiblesses dans la réalisation des campagnes de vaccination. En raison des manquements constatés, de nouveaux instruments sont prévus dans la proposition de règlement afin de renforcer la surveillance et les performances des autorités de contrôle.
Les nouvelles règles votées dans le cadre du trilogue européen visent donc à améliorer l’efficacité des contrôles effectués par les États membres, afin de garantir notamment la sécurité des denrées alimentaires. Le nouveau système de contrôles officiels simplifie et rationalise le cadre juridique existant. Il pose en effet « un ensemble unique de règles de contrôle applicables à la plupart des secteurs de la chaîne agroalimentaire ». Il considère, de par son champ d’application étendu, les spécificités des différents secteurs, « mais permet toujours des ajustements tenant compte de leurs besoins spécifiques (l’inspection des viandes, des contrôles de protection des animaux, par exemple) ou des risques nouvellement identifiés ». Le Syndicat national des inspecteurs en santé publique vétérinaire (SNISPV) a milité auprès des pouvoirs publics pour que l’action publique en matière de gestion des risques alimentaires, vétérinaires et phytosanitaires « s’affranchisse des complexités administratives qui subsistent et soit repensée dans le cadre moderne d’une approche intégrée et simplifiée du contrôle de la chaîne alimentaire, indépendante des actions de soutien économique » 2. Le syndicat rappelle que ce sujet est clairement abordé par les règlements communautaires.
Le rôle de contrôleur officiel, au début de la chaîne alimentaire, revient généralement aux vétérinaires, du fait de leur niveau de formation, nécessaire pour effectuer de telles inspections. Le rôle du vétérinaire officiel est l’un des points clés de cette nouvelle proposition de règlement. En juin 2014, un avis d’un groupe d’experts vétérinaires et d’experts phytosanitaires, remis au conseil “Agriculture et pêche”, préconisait notamment de clarifier le rôle « que doit jouer le vétérinaire officiel dans l’exécution des contrôles officiels pratiqués sur les animaux vivants et les produits d’origine animale ». Un considérant 36 bis stipule clairement que les États membres devraient faire appel à des vétérinaires officiels. Le texte définit un vétérinaire officiel comme étant un agent ou un titre désigné par les autorités compétentes et possédant les qualifications requises pour effectuer les contrôles officiels. Le caractère officiel de son rôle repose d’abord sur son mode de désignation. Celle-ci devra contenir les tâches pour lesquelles il a été désigné. Ce vétérinaire peut également recourir à un auxiliaire officiel, qui travaille sous son autorité et sa responsabilité.
Une fois désigné, le vétérinaire devra faire preuve de transparence. En effet, la proposition de règlement exige que tout vétérinaire officiel nommé prouve l’absence de conflit d’intérêts avec la filière agroalimentaire. Dans le cas contraire, sa nomination pourra être remise en cause.
En France, le contrôle sanitaire ante- et post-mortem, assuré par des vétérinaires inspecteurs, est déjà prévu dans la législation, ce qui n’est pas le cas dans tous les États membres. La question de la présence permanente d’un vétérinaire officiel dans les abattoirs a été posée par le Parlement européen. Les eurodéputés ont proposé d’imposer la présence permanente d’un vétérinaire officiel lors des inspections ante- et post-mortem. Sa présence ou celle d’un auxiliaire officiel était également demandée dans les ateliers de découpe pendant le travail des viandes. Ces différentes propositions n’ont pas été retenues par la Commission et le Conseil, « puisque ces amendements porteraient atteinte à l’objectif de permettre, sans abaisser le niveau de sécurité alimentaire, une utilisation plus efficace des ressources affectées au contrôle et une réduction des charges des autorités compétentes ».
Autre nouveauté, le texte prévoit la protection des lanceurs d’alerte, comme c’est déjà le cas en France pour les risques sanitaires et environnementaux. La proposition européenne demande à ce que les États membres mettent en place des mécanismes efficaces et fiables pour encourager le signalement aux autorités compétentes des infractions potentielles ou avérées. Des protections minimales sont citées, telles qu’une protection appropriée contre les représailles, les discriminations ou autre type de traitement inéquitable pour le personnel qui signale les infractions. Des garanties sont aussi prévues pour tout lanceur d’alerte, comme la protection des données à caractère personnel.
Un article dédié à la transparence des contrôles officiels vise à garantir un niveau élevé de transparence. Les autorités publiques auront l’obligation de rendre publiques les informations dites pertinentes concernant l’organisation et l’exécution des contrôles officiels. Elles devront notamment publier le type, le nombre et le résultat des contrôles officiels, le type et le nombre de manquements détectés, les mesures prises et les sanctions. La Commission pourra fournir aux États membres les orientations nécessaires afin d’affiner les informations à publier. Cette exigence de transparence concerne aussi le financement des contrôles officiels, qui se fait au moyen de redevances perçues auprès des opérateurs. Les autorités publiques devront faire preuve de transparence sur la méthode, les données utilisées pour fixer les redevances et leur utilisation. Le texte prévoit que le financement se fasse « en toute transparence, de sorte que les citoyens et les entreprises comprennent la méthode et les données employées pour fixer les redevances et soient informés de l’utilisation des recettes provenant de ces redevances ». Le Parlement a tenté de supprimer les redevances obligatoires et de laisser leur application à l’appréciation des États membres, de même que l’exemption des redevances pour les micro-entreprises. La Commission a rejeté ces propositions, « car elles seraient contraires à son objectif d’assurer le financement durable des autorités de contrôle et une participation plus équitable des opérateurs au financement du système de contrôle ».
Plusieurs amendements ont été introduits par le Parlement européen, afin d’imposer aux États membres qu’un vétérinaire officiel effectue des contrôles physiques sur les animaux entrant dans l’Union européenne. Cette proposition a été rejetée à la fois par la Commission et par le Conseil, « étant donné que les contrôles physiques sur certains produits d’origine animale, comme le lait en poudre et les viandes en conserve, ne nécessitent pas forcément l’expertise d’un vétérinaire ». En compromis, le Conseil propose que les vétérinaires officiels examinent des lots d’animaux et des lots de viandes et d’abats comestibles. Selon la Commission, cette solution est plus envisageable pour permettre « une affection plus efficace des ressources vétérinaires ».
Proposée par le Parlement européen, la création des centres de référence européens pour le bien-être des animaux devient une obligation juridique. Ils seront chargés d’apporter une expertise à la Commission sur les questions liées au bien-être animal. Leur personnel devra avoir « les qualifications requises et être doté d’un niveau élevé d’expertise scientifique et technique en matière de relations entre l’homme et l’animal, de comportement animal, de psychologie animale, de santé et de nutrition animales en rapport avec le bien-être des animaux et d’aspects du bien-être en rapport avec l’utilisation commerciale et scientifique des animaux, tout en tenant compte des aspects éthiques ».
La proposition de règlement prévoit la création de centres de référence européens pour l’authenticité et l’intégrité de la chaîne agroalimentaire. Ils auront pour rôle d’appuyer, par leur expertise, la Commission pour détecter notamment les faux produits destinés à la consommation humaine. Pour cela, il est prévu qu’ils aient «
la capacité d’effectuer ou de coordonner des recherches aux niveaux les plus avancés en matière d’authenticité et d’intégrité des produits et de développer, d’appliquer et de valider les méthodes à utiliser pour la détection de violations intentionnelles
».
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Source : proposition de révision du règlement (CE) 882/2004.
BILAN 2015 DES CONTRÔLES OFFICIELS EN FRANCE
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