PRÉVENTION DU SUICIDE
ACTU
ÉVÉNEMENT
Auteur(s) : BÉNÉDICTE ITURRIA
En tant que fléau de la profession, le suicide des vétérinaires est une problématique dont s’emparent de plus en plus d’instances professionnelles.
En avril dernier, l’Australian Veterinary Association a vivement recommandé aux vétérinaires de répondre à l’enquête Risque psychologique, comment les vétérinaires se comportent avec leurs clients et collègues 1 , mise en place par l’université de Murdoch. Ce questionnaire anonyme, à remplir en ligne, a pour but d’étudier si les relations entre les praticiens et leurs collègues et clients peuvent protéger ou au contraire dégrader leur santé mentale. Cette recherche fournira des éléments pratiques importants pour les cliniques vétérinaires, notamment pour les informer sur les risques de suicide, les conseiller sur la mise en place de stratégies de prévention précoce du passage à l’acte, développer une formation afin de faciliter les interactions entre collègues et clients visant à améliorer les relations avec le personnel et à augmenter la satisfaction de la clientèle. À l’image de l’association australienne, la prise de conscience de la prévalence élevée de troubles psychiques chez les vétérinaires conduit de plus en plus d’organisations professionnelles à se préoccuper de la santé de leurs adhérents. Garantir le bien-être des praticiens est devenu un enjeu majeur et les initiatives en ce sens se développent dans certains pays2.
Tel est le cas de l’American Veterinary Medical Association (AVMA), qui représente plus de 89 000 vétérinaires aux États-Unis. Cette association est consciente que la fatigue, la frustration et l’angoisse ressenties par certains confrères peuvent conduire à des sentiments d’incompétence, d’impuissance et de désespoir et ainsi raccourcir une carrière ou générer un environnement toxique au sein d’une équipe vétérinaire. Il est essentiel de prendre des mesures pour que chaque praticien puisse s’occuper de sa propre santé émotionnelle et mentale. De plus, les collègues d’un vétérinaire en détresse doivent pouvoir repérer son mal-être en décodant d’éventuels signes avant-coureurs.
L’AVMA a pour cela élaboré plusieurs outils disponibles sur son site dans la rubrique “Wellness and peer assistance” (“Bien-être et assistance des pairs”)3. Sur cette page d’accueil, l’association conseille de commencer par remplir en ligne un questionnaire d’auto-évaluation, le ProQOL (Professionnal Quality of Life), qui mesure les effets positifs et négatifs de l’aide aux personnes victimes de souffrances et de traumatismes. Largement validé et développé à la base pour des prestataires de santé humaine, il a été adapté aux vétérinaires et a été conçu pour permettre une introspection pouvant servir de point de départ pour une remise en question. Il se concentre notamment sur trois points essentiels : la satisfaction, le stress et la fatigue de compassion (encadré ci-contre). Le praticien a ainsi la possibilité de déterminer lequel de ces états le caractérise le plus. Il peut également naviguer sur le site de l’AVMA, où sont disponibles pléthore d’outils et de liens internet qui l’aideront à prendre soin de lui et à élaborer un programme pour améliorer son équilibre : méthodes de gestion du stress, vidéos de méditation, techniques de relaxation et de respiration, conseils pour combiner avec succès vie privée et vie professionnelle, et même astuces pour gérer ses finances et entretenir sa condition physique, facteurs indissociables du bien-être personnel. Une rubrique est aussi consacrée à un programme de bien-être pour toute l’équipe vétérinaire (hygiène de vie, communication positive, encouragements). Enfin, une section intitulée “Get help” recense toutes les structures d’entraide indispensables pour sortir un vétérinaire en détresse de son isolement.
De plus, l’AVMA propose un programme pilote visant à former des “coachs de bien-être des vétérinaires”, permettant de reconnaître les signes avant-coureurs chez une personne qui envisage le suicide, d’établir un dialogue et de l’orienter vers une aide adaptée. Il ne se substitue pas à l’assistance professionnelle, mais il peut être un outil essentiel pour sauver des vies. Environ 5 000 membres de l’AVMA et de sa branche étudiante, la Student AVMA (SAVMA), pourront suivre cette formation gratuitement sur le principe du premier arrivé, premier servi. Le programme pourrait être élargi à l’avenir, en fonction de l’intérêt et du succès auprès des membres. La formation, qui dure une heure, se fait en ligne par le biais de l’Institut QPR (Question, Persuade, Refer), fondé en 1999 et qui a dispensé cet enseignement à plus de un million de personnes non professionnelles de la santé mentale. Les diplômés du programme sont habilités à contacter les confrères qui connaissent des moments difficiles et à les orienter vers des ressources appropriées.
Toujours aux États-Unis, VetFolio, la plateforme d’information et de formation en ligne de la North American Veterinary Community (NAVC) et de l’American Animal Hospital Association (AAHA) a créé le Wellbeing Resource Centre, un portail contenant une gamme complète d’informations et de cours pour aider les vétérinaires à se concentrer sur leur santé physique, émotionnelle et mentale. Au Royaume-Uni, la Mind Matters Initiative (MMI), créée en 2015 par le Royal College of Veterinary Surgeons (RCVS), vise à améliorer la santé mentale et le bien-être des vétérinaires, des étudiants, des auxiliaires spécialisés vétérinaires et des dirigeants de cliniques. La MMI propose une série de séances de formation, dont certaines conjointement avec la British Small Animal Veterinary Association (BSAVA), tels que le cours intitulé Mental Health Awareness, qui a pour but de mieux comprendre les signes et les symptômes d’une mauvaise santé mentale et de savoir comment communiquer avec les gens qui en sont atteints. Le RCVS aide aussi, par des ateliers, les vétérinaires avec un rôle managérial à épauler leurs collègues ayant des problèmes psychologiques. Des ateliers du sommeil sont également proposés.
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Dans le domaine de la médecine vétérinaire, la féminisation de la profession ne cesse de croître. Parce que les femmes souffrent en général plus souvent de dépression et de pensées suicidaires que les hommes, vous aurez probablement une proportion plus élevée de vétérinaires qui subissent ces facteurs de risque de suicide
», indique Randall Nett, épidémiologiste et coauteur d’une enquête sur la santé mentale des vétérinaires (encadré ci-contre). La mise en place d’initiatives telles qu’évoquées s’avère donc plus qu’indispensable pour garantir le bien-être de la profession dans le futur.
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2 Dans l’Hexagone, les vétérinaires peuvent faire part de leur mal-être auprès de l’association à but non lucratif Vétos-entraide, structure de prévention et de soutien d’urgence créée en 2002 par des confrères. L’Ordre peut également intervenir en soutien de situations difficiles.
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